Guidoni, le divin cadeau !

(photo non créditée)

En ces temps de raréfaction des supports physiques, de disette, ne comptez pas trouver les disques qu’il vous manque pour compléter une collection. Pour Guidoni, surnommé à ses débuts « l’amant de la pénombre », c’était même peine perdue depuis des lustres, depuis qu’il a été chassé des majors et bien avant.

C’est dire si l’initiative d’EPM, ce grand petit label touché par la crise mais pas coulé, est une bénédiction aussi importante dans le monde de la chanson que la réouverture de Notre-Dame (seuls les médias ne le sauront pas…) : un coffret qui se déplie, se déploie sur 5 CD. Et 94 titres. Ce n’est certes pas l’intégrale, loin s’en faut, mais s’il est une action de grâce, c’est bien celle-là. Saluons-la, au besoin signez-vous.

Ça débute (le CD 1) par un Olympia qui nous était jusqu’alors inédit, celui de 1981, juste après le succès de son premier vrai album de l’année précédente, Je marche dans les villes (dont on retrouve l’essentiel des titres) et de sa prestation remarquée au Théâtre en rond, de son passage fracassant au Grand Échiquier de Jacques Chancel, avant le magnifique Crime passionnel, d’où sont ici repris quatre titres sur le CD suivant. Cet Olympia est celui de la révélation de ce chanteur au visage fardé, comme un miracle arrivant en chanson, un avènement rare pour ceux qui déjà prophétisaient la fin de celle-ci, au prétexte qu’il n’y aurait plus de grands : en arrivait un, qui plus est délicieusement sulfureux, servi par les magnifiques et riches textes de Pierre Philippe (celui qui, peu après, tricotera à Juliette, parmi ses plus belles chansons, dont les fameuses « Rimes féminines »). Faire l’Olympia à ses tout débuts de carrière ne correspondant pas alors à une opération commerciale mais bien à la reconnaissance d’un talent exceptionnel.

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Il en manque cependant à cette pourtant somptueuse anthologie, et de beaucoup. Les quatre CD restants n’étant qu’une super compile aux titres tirés d’une quinzaine d’albums (de 1977 à 2022) et de quelques 45 tours, soit quarante-cinq ans de bons et loyaux services. Mais quand même, ça nous montre, même en raccourci, en accéléré, l’œuvre de Guidoni. Et nous rappelle ses hauts et ses bas discographiques, au gré des labels et producteurs, de l’enthousiasme des journalistes prescripteurs ou de leurs suspects oublis : des disques sanctifiés, d’autres tellement discrets qu’ils en furent injustement sacrifiés.

Tout va bien, Chanson pour un cadavre exquis, Midi-minuit, Mort à Venise, Le Bon berger, Djemila, Chromo, Tous des putains, Marseille, Vérone véronal, Aux tourniquets des grands cafés, Cas particulier, Chasse à l’enfant (en duo avec Juliette), Comme un autre (avec Jeanne Cherhal), Légendes urbaines, Monocle et col dur… le répertoire est vaste, exigeant, parfois déroutant, toujours passionnant. Ce coffret au dérisoire prix (s’il y a miracle, il est là) repave nos mémoires de l’essentiel d’un énorme, d’un incontournable artiste. Il nous annonce au passage la sortie, d’ici à quelques mois, d’un nouvel album à l’enseigne d’EPM. Si ça c’est pas une bonne nouvelle…

Jean Guidoni, Y’a un climat, anthologie 5 CD, EPM/Polydor/Universal 2024. Le site de Jean Guidoni, c’est ici ; ce que NosEnchanteurs a déjà dit de lui, c’est là.

« Djemila » :

« Tout va bien » :