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Alan Stivell : re-pressage des quatre albums mythiques

 

Alan Stivell (photo Gilles Pensart)

Alan Stivell (photos Gilles Pensart)

S’il fut, entre tous, un instrument légendaire, c’est bien la harpe celtique, qui ne trouvait plus sa place que dans l’imaginaire celte et les histoires dont ce peuple n’est pas avare. Elle n’était plus depuis longtemps qu’un symbole du pure poésie ; la révolution irlandaise la fera aussi symbole politique.

C’est le rêve fou d’un homme, Jord-Georges Cochevelou, qui rêve de recréer cette harpe celtique « reliant la Bretagne actuelle aux temps de sa liberté, [qui] serait un des moteurs du relèvement ». Bien que n’étant nullement luthier, il termine son prototype en 1953, sous les yeux ébahis de son fils Alan qui, dès après l’avoir touché, a l’envie d’apprendre à en jouer, tant que quelques mois plus tard il en joue pour la première fois en public, à la Maison de la Bretagne à Paris.

Le rêve fou est devenu réalité. Même le terme « harpe celtique » a été ré-inventé par Jord-Georges, le papa : on n’admettait auparavant que le terme de harpe irlandaise. Le fils, vous l’avez compris, n’est autre que celui qui, plus tard prendra le pseudo d’Alan Stivell. En 1960, à l’âge de seize ans, après un 45 tours, Alan Cochevelou sort son premier 33 tours, Telen Geltiek (Harpe celtique, dont il a de plus dessiné la pochette) : des mélodies populaires de Bretagne, d’Irlande et d’Ecosse, harmonisées par son père.

STIVEL ABIl faudra attendre six années encore, après qu’Alan ait écumé les clubs de folks, les festivals et MJC, pour que sorte LE disque emblématique, celui qui va éveiller en nous cet immense sentiment de naissance ou du résurgence, c’est selon. Venue de l’Ouest, nourrie de l’intérieur, la vague folk va être tsunami, lame de fond qui va nourrir un après 68 où la chanson devient revendication, devient identités, où des festivals et associations naissent comme champignons après la pluie et nous offrent la plus belle et riche scène qui puisse être.

« C’est avec la vague du folk-song que [l’]influence celtique a atteint son apogée. C’est ce courant, synthèse d’une continuité ethnoculturelle volontaire et d’une adaptation au monde moderne qui m’a poussé à lancer un folk-song breton » dira Stivell.

Le 33 tours Reflets sort en décembre 1970, avec ces titres de légende : Reflets, Suite des montagnes, Brocéliande, Son ar chistr, Suite irlandaise… Rien que les évoquer vous en ramène les airs fameux. Le premier disque de Gilles Servat sortira l’année suivante. Puis, en 1972, le fameux Renaissance de la harpe celtique de Stivell ainsi que l’avènement de ces trois Jean de Nantes qu’on retiendra vite sous le nom de Tri Yann.

ALAN_STIVELL_MEDIA_V3-05_crédits @Gilles PensartLe breton Alan Stivell est incidemment né en Auvergne en 1944, comme d’ailleurs Gilles Servat, né lui en Gascogne l’année suivante. Ils n’en sont pas moins bretons, plus même. Car, avec entre autres les Tri Yann, ils sont plus que quiconque les oriflammes de la renaissance de la musique et de la chanson celtiques, qui, sans être forcément sur les mêmes scènes, font chorus avec les Magny, Ribeiro, Béranger, Corringe, Escudero, Solleville, Higelin ou Lavilliers de cette fabuleuse décennie. Nous avons raison d’avoir aimé, plus encore, cette décennie-là.

Un demi-siècle après, ressortent à l’identique les quatre albums mythiques d’Alan Stivell : Reflets (1970), Renaissance de la harpe celtique (1972), Chemins de terre (1973) et E Langonned (1974). A l’identique certes mais remastérisés, qui plus est en édition limitée.

Comment dire… A nouveau la magie opère, déconnectée de l’espace et du temps, de tout ce que nous avons connu depuis. Ces quatre albums, travaillés chacun avec une optique particulière, quasiment un projet politique au sens le plus noble du terme, ont gardé leur puissance d’origine. Leur charme, leur total envoûtement. On sait que, par la suite, Stivell, à jamais précurseur, à jamais rassembleur, s’est essayé à des tas d’autres pistes, additionnant à son art les plus prestigieuses collaborations, qu’il est devenu sans conteste la figure tutélaire de la sono mondiale, l’un des artistes les plus respectés de la planète, il n’empêche. Ces quatre opus (n’y manque vraiment que l’emblématique Stivell à l’Olympia de 1972) sont le socle d’une œuvre invraisemblable. Les poser sur sa platine vous fout les frissons : à la fois vous retrouvez vos vingt ans et vous vous propulsez dans l’avenir de la word-music. C’est simplement enthousiasmant !

 

Chez [Pias] 2023. Ce que NosEnchanteurs a déjà dit de Stivell, c’est là.

 

« Brocéliande » : Image de prévisualisation YouTube

« Suite des montagnes » : Image de prévisualisation YouTube

Une réponse à Alan Stivell : re-pressage des quatre albums mythiques

  1. HUMENRY 4 décembre 2023 à 8 h 44 min

    La France, s’est soudain mise à la poursuite, à la recherche et à l’invention de son histoire musicale. Les recherches des artistes américains venaient d’en faire de même : quête alimentée par l’évolution gourmande des nouveaux styles de jeu de guitare, de banjo, d’autoharp. Alan a mis en route un magnifique projet, d’abord breton, celte puis hexagonal et pour finir international.
    Nous n’avions peur de rien, nous nous mettions en route sur des chemins de traverse, avec audace, générosité, inconscience et en toute liberté. Tout allait de mieux en mieux en compagnie d’un public curieux puis passionné. Les salles de quartier, les granges, les Mjc, devenues chapelles dans une écoute recueillie faisaient le plein pour des artistes inconnus.
    Alan est arrivé avec sa harpe magique et nous à bouleversés : c’était beau, c’était frais, nous avions le sentiment d’être déjà dans sa musique. Tant de bretons ont suivi ce « guide-druide » exprimant simplement leur bonheur d’être des vivants, la force de leur colère face à un système qui ne respectait pas les opprimés, les sans-toit, les affamés et faisant vivre leurs rêves d’une
    « société-réparée », leurs utopies au travers de leurs mots et de leur musique.
    Merci Michel

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