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Gérard Delahaye, à l’ouest de l’Eden

Gérard Delahaye (photo Fabienne Ogier)

Gérard Delahaye (photo Fabienne Ogier)

Ça fait un demi-siècle qu’il chante (son premier 45 tours remonte à 1972). Lui, c’est Gérard Delahaye mais, méfiez-vous, il y a plusieurs bonhommes en un seul : celui qui, avec ses compères Ewen et Favennec, forme le formidable trio EDF (six albums), celui chanteur pour jeune public (douze albums à ce jour) et celui, mis en jachère depuis presque dix ans, de chanteur tout public. C’est celui-ci qu’on retrouve, par ce Jardin d’Eden, son dixième album, avec toujours autant de plaisir.

Un jardin d’Eden qui doit être à peu près celui de la superbe acrylique sur toile, L’arbre aux oiseaux, de Marie Amalia, qui illustre le livret de cet album : une rivière, une végétation dense et variée, des animaux qui frèrent ensemble (et pas le moindre humain). « C’est pas loin d’un jardin d’Eden / C’est tout près d’un rêve éveillé / On se disait que ce serait comme ça pour l’éternité ».

Parfois quelques sonorités plus celtes que d’autres – on ne se refait pas – dans ces mélodies apaisantes dont on ne sait si elles ont appelé les mots ou si c’est l’inverse. Nous sommes « en Bretagne, au bord de la mer verte et bleue », sur un bout de cette Terre « pays de cocagne, chic planète », l’eau y coule, les jours s’écoulent, pays d’harmonie. Nul besoin d’un qui vivrait en haut : « Toi qui tues / Toi qui maudis / Toi qui mutiles / Reste dans ton paradis / Et ainsi soit-il / Quel que soit ton nom / Reste dans ton paradis / Laisse-nous tranquilles / Et ainsi soit-il. »

pour-jardin-d-eden-gerard-delahaye-a-convie-des_6145804_676x577pC’est un disque de grande sérénité, de sagesse, de mélancolie, de chevaleresques regrets. Quelques touches d’humour qui, on le sait, lui est coutumier. Et des mots toujours bien sentis, qui peuvent se faire flèches à peine mouchetées, comme dans ce D’abondance et de liberté, où il nous entretient de ceux pour qui on dresse des barbelés : « Tu peux m’appeler sans papiers / Tu peux m’appeler réfugié / Tu peux m’appeler immigré / Moi je m’appelle exilé ».

Qu’il nous conte l’histoire d’une guitare de Gao, qu’il déclare – avec ses amis Patrick Ewen et Yvon Le Men – que Shahespeare is not dead, qu’il fasse sonner cloches et chapelles pour un dieu qui n’est plus que musique, qu’il appelle de ses vœux L’âge d’or qui « n’est pas loin / Il est là / A portée de la main tu le vois », ce Jardin d’Eden est comme collier de perles, toutes belles, parure d’empathie et de dignité, de multiples plaisirs musicaux (avec violon, flûtes, guitares, basse et contrebasse, uillean pipe, viole de gambe, calebasse, godjé, percussions…). Même si la voix de Delahaye s’érode un peu avec l’âge, notre Breton nous offre là un de ses plus beaux disques. On ne l’en remerciera jamais assez.

 

Gérard Delahaye, Jardin d’Eden, Dylie/Coop Breizh 2021. Le blog de Gérard Delahaye, c’est ici ; ce que NosEnchanteurs a déjà dit de lui, c’est là.

« D’abondance et de liberté » : Image de prévisualisation YouTube

Une réponse à Gérard Delahaye, à l’ouest de l’Eden

  1. babou 12 février 2022 à 15 h 34 min

    Une bien belle réussite, probablement un des meilleurs albums de l’artiste ; tout est dit en délicatesse, on alterne de la légèreté à la gravité sans jamais être accablé par le propos. Les arrangements sont riches dans leur diversité, assurément de la très belle ouvrage. Je lui attribue une victoire de la musique pour cet album.

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