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Avignon Off 2017. Un chien dans un je de filles !

(copie d'écran)

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11 juillet 2017, Claire Diterzi dans « Je garde le chien, Journal d’une création », La Manufacture à Avignon,

 

Débarquer in Avignoun et se dire qu’on va devoir chroniquer un certain nombre (pour ne pas écrire un nombre certain) des 1480 spectacles du Off, c’est un peu comme arriver au pied de l’Everest en tongs, short et t-shirt. Mais, l’avantage de l’Himalaya, c’est de pouvoir garder le nez pâle. Alors que, ici, on risque juste un coup de sommeil et de piquer du nez.

Mais, en ce mardi, pas de risque de ce côté-là. En effet, en allant voir « Je garde le chien, d’après Journal d’une création », à 11h30 à La Manufacture (lieu « capteur de nouveautés » qui, comme dab, fait montre d’une programmation pointue et innovante autour des écritures contemporaines), j’ai retrouvé une Claire Diterzi déterminée et au meilleur de sa forme. On connaît depuis longtemps l’originalité et la volonté de la tourangelle d’aller creuser des micro-sillons en dehors des champs cultivés par la « chanson française ». Et depuis les années 90, on peut dire qu’elle en a semé des grains de beauté et de fantaisie dans le pays sage de la musique parolée ! Au point de faire pousser de drôles de belles plantes, que les spécialistes de la spécialité ont bien du mal à faire rentrer dans les jardins à la française prévus à cet effet.

D’ailleurs, dès le début de cette « performance » (j’ai longtemps hésité sur le mot idoine à poser ici) qu’est Je garde le chien, elle précise explicitement ce qu’elle recherche dans son travail : « J’aimerais faire de la chanson contemporaine. Comme j’aime le théâtre contemporain. Et la danse contemporaine. Mais, ça n’existe pas. Quand on sort des clous avec une chanson, on est illégitime, voire prétentieux. Pour les gens, une chanson doit répondre à des critères sentencieux qui les rassurent par leur familiarité. Elle doit être codée avant sa naissance pour correspondre à des coordonnées ancrées depuis 1806 dans leur base de données. Et ce n’est pas trop ça que j’attends de l’art. » Voilà qui devrait donner du grain à moudre à une frange non négligeable du lectorat de NosEnchanteurs

Et Je garde le chien n’échappe pas aux velléités iconoclastes de cette « moi, sonneuse, battante ». Mais, ce qui est clair et nous éclaire, c’est que Claire ne cherche pas à nous entraîner dans ses positions affirmées et dans ses révoltes : nul prosélytisme là-dedans. Juste une femme qui, se racontant, pose posément les grandes étapes et anecdotes de sa vie avec un naturel confondant, terme pris là au pied de l’être. Car la performeuse m’a littéralement fait fondre avec elle, au fil de ce qu’elle nous livrait (pour s’en délivrer ?).

Le procédé de « re-présentation » choisi est celui d’une lecture augmentée. Ce qui signifie que l’artiste a choisi le fil conducteur de sa vie pour nous entrainer dans les méandres d’une existence comme les autres (mais qui revêt tout de même le caractère exceptionnel d’une véritable œuvre créative). Et pour ce faire, Claire Diterzi se réfère à un spectacle musical qu’elle avait monté en 2015 avec le dramaturge argentin Rodrigo Garcia, à partir des textes de celui-ci, auxquels Claire avait apporté l’expérience de son existence, et intitulé 69 battements par minute. C’est donc ce texte qui constitue la trame narrative de « Je garde le chien ». Et en fait une sorte d’autobiographie à cœur ouvert qui pulse avec la vitalité d’une femme délivrée des contraintes du carriérisme et des courbettes à faire en direction de ceux qui sont en place (il y a deux ans, elle a dit « merde » aux producteurs qui ne lui donnaient pas les moyens d’exercer sa créativité en toute liberté).

17361781_1265116093526010_5788729596694990840_nJe disais donc qu’il s’agit d’une lecture. Mais pas que… En effet, des images vidéo-projetées, des paroles sur bande son et quelques chansons où elle s’accompagne d’un ukulélé font de cette performance de La Diterzi un spectacle complet, mais dépourvu de tout artifice. Ici, c’est la simplicité qui règne. Comme le ton adopté par l’artiste, qui fait ici montre d’une humilité rare, en se racontant sans pathos ni affect, ni affectation, dans la vérité d’une lumière crue. Et je n’ai pas du tout envie de rentrer dans le fond du spectacle en en disséquant le contenu et le propos. Car son fil conducteur étant une vie ponctuée de grandes histoires et de petites anecdotes, on pourrait y prêter de l’intérêt ou non (ceci étant dit, quand on a vécu certaines des périodes citées, il y a de quoi s’y retrouver et kiffer sa race : ah, le fan de Johnny à qui elle achète ses t-shirts sur Le Bon Coin… et les papiers peints de nos chambres des années 70 !).

Non, ce qui, selon moi, fait la beauté de cette proposition, c’est que, avec sa façon d’être -naturelle, fonceuse, sans tabou apparent, posant les choses à la place qui lui semble être juste- Claire Diterzi fait montre de franchise, d’indépendance, d’irrévérence, de volonté et de hardiesse. Et la chanson éponyme de son spectacle, « 69 battements par minute » raconte bien tout ça : « Soixante-neuf / Battements par minute / Donnons la danse / Au tempo de mon cœur / À pied d’œuvre / Je vais droit au but / Ainsi, j’avance / Au rythme de mon cœur » Et celle que son père appelait Clairon (et qui affirme elle-même être un vrai mec) assume avec l’assurance d’une conviction chevillée au corps qu’elle est bel et bien une femme d’aujourd’hui, qui place sa liberté au-dessus de toute autre considération. Et je crois bien que, bien qu’il y en ait une foultitude d’autres, c’est pour cette principale raison que je l’aime.

 

Le facebook de Claire Diterzi, c’est ici ; ce que NosEnchanteurs a déjà dit d’elle, c’est là. Off d’Avignon, La Manufacture (2a rue des Écoles), tous les jours à 11h30 (relâche le 19 juillet). Image de prévisualisation YouTube

Une réponse à Avignon Off 2017. Un chien dans un je de filles !

  1. Popp 18 juillet 2017 à 0 h 04 min

    Vous nous mettez l’eau à la bouche avec votre article élogieux. J’apprécie énormément les chansons de C Diterzi et la voir se mêler au théâtre me donnerait presque l’envie d’enfourcher ma bicyclette pour me rendre à Avignon, si ce n’était trop loin …

    Répondre

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