Aubercail 2016 : Aubervilliers versus Castelsarrasin
Commencée avec Sourigues, la soirée se poursuit avec un monument de la chanson française. Une œuvre de plus de 450 chansons ancrées dans l’inconscient collectif.
60 ans de carrière, Commandeur de l’Ordre des Arts et des Lettres… Autant dire que le public d’Aubercail, les yeux écarquillés comme des mouflets, trépignait d’impatience : il attendait Perret avec une vive émotion et un capital sympathie que l’on ne rencontre que très rarement.
Dès l’entrée en scène Pierrot est acclamé en rejoignant ses fidèles musiciens sur une brève intro musicale festive des jolies colonies de vacances. Joël Roulleau, son guitariste depuis 28 ans, Gilou Lecouty, son célèbre joueur de soufflet à punaises depuis le Miocène supérieur, Maud Pages au violoncelle, François Ducroux à la contrebasse et Claude Walch à la batterie.
Deux heures durant, Pierrot nous fera voyager, de l’émotion à la tendresse. Nous replongera dans l’enfance. On jubilera entre humour et grivoiserie et on saluera ses engagements humanistes. Si le bonheur n’est pas toujours pour demain, ce soir il est partagé pleinement avec son public. Qui dès les premiers titres chante en chœur, Adèle, Au café du canal, Estelle et Mon ptit loup au texte bouleversant d’humanité et d’empathie en soutien aux femmes violées. Femmes battues viendra compléter le message : « Oui c’est à toutes les femmes battues / Qui jusqu’ à présent se sont tues / Frappées à mort par un sale con / Que je dédie cette chanson ». Mais ces violences, parfois aussi morales, Pierrot les dénonce courageusement sur scène avec la femme grillagée, chanson qui, à sa sortie, lui valu, des menaces de la part de crétins intégristes qui mériteraient de bons coups de pieds au culte. Dès l’intro de Lily, qui demeure, peut être avec Saïd et Mohamed de Cabrel, la plus belle chanson écrite contre le racisme, le public fait chorus avec Pierrot, pétri d’émotion. Les instants de concert comme ceux-là ne s’expliquent pas. L’artiste réussit à déclencher un moment de grâce par la somme des énergies émotionnelles individuelles.
Le secret de Perret, c’est passer de la gravité à la franche rigolade tout en finesse. Le Zizi fonctionne toujours à merveille, je vous assure, même (et surtout) sur la partie andropausée du public. Le Cul aussi, « Qu’il soit couvert ou bien nu, qu’il soit épilé ou barbu, les timorés sont tous vaincus ».
À près de 82 printemps, l’homme est pétillant, malicieux. Il jubile et rit à l’avance encore surpris lui-même des « bêtises »qu’il a écrites.
Viendra le long medley (oui, je sais, « pot pourri » en français mais c’est tellement laid !). Les incontournables ! Pierrot sait qu’il ne peut y échapper sous peine d’une émeute et par les temps qui courent gardons-nous des coups de matraques. Pierrot joue avec son complice Gilou qui amorce les quelques notes d’intro à l’accordéon. Ma ptite Julia, Au Tord boyau, Tonton Cristobal, Le plombier, Quand le soleil entre dans la maison, Je suis de Castelsarrasin, Cuisses de mouche, Les Baisers,Vaisselle cassée… À défaut de gardon, Pierrot taquine le public à chaque chanson et le défie de retrouver les paroles de ses chansons les plus anciennes. Tacite complicité : tout le monde connaît tout par cœur, ce qui nous donne le medley le plus long du monde, la plupart des chansons étant chantées en intégralité. Pierrot n’oubliera pas la défense de l’environnement avec Donnez nous des jardins, dont il confiera l’avoir écrite dans les années 60, lorsqu’il vivait en HLM à Gennevilliers. Il fera cadeau d’un Bercy Madeleine à un public francilien bien familier des stations de métro en avouant qu’il fait un bide total lorsqu’il la tente en province. Au gré des rappels et avant une standing ovation bien méritée, Pierrot terminera le spectacle avec Les jolies colonies de vacances, Blanche et La cage aux oiseaux.
Une soirée Aubercail forcément d’exception qui laisse la douce sensation étrange de redevenir enfant, bercé par des chansons à la saveur des longs voyages en voiture, les jours de départ en vacances. Tout chez Pierre Perret respire la convivialité et le carpe diem.
Le site de Pierre Perret, c’est ici ; ce que NosEnchanteurs a déjà dit de lui, c’est là. L’album photo « Pierre Perret » de Vincent Capraro, c’est ici.
Florilège, n’est-ce pas mieux que medley ou pot-pourri, qui, effectivement, s’il peut être suavement parfumé, résonne mal à nos oreilles ?
Catherine, je retiens le terme florilège. Littéralement « qui choisit les fleurs ». Quand on connait « le pouvoir des Fleurs » on aurait tord de s’en priver. Pierrot nous donne des jardins
d’où on r’vient des p’tit’s fleurs à la main. On peut aussi Respirer la violett´ à Parme. N’oublions pas non plus qu’ Elle avait de chouettes mirettes sa petite violette ….