Sttellla lutte finale, grattons-nous des deux mains

Qu’on se le dise une bonne fois pour toutes : Sttellla est le plus grand chanteur que la Belgique ait jamais enfanté ! A côté de lui, Stromae peut se faire empapaouter, Maurane pleurer dans les bras de son Bob de frère et Jacques n’est qu’une brêle.

Vous ne me croyez pas ? Démonstration en cinq points avec son nouvel opus :

1 Les albums de Sttellla portent les titres les plus rigolos du monde. Après Manneken Pis not war, The darkside of the moule, Il faut tourner l’apache, Le plus beau jour de magie, voici son nouveau CD, le bien-nommé Regratte-moi dans les yeux. C’est quand même autre chose que _____________________________ (complétez vous-même, selon vos affinités), non ???

2 Bien mieux, chaque titre de chanson de l’album pousse à la réflexion métaphysique. Que veut-il dire exactement par son morceau d’ouverture Appuyez sur le mouton (référence au Petit Prince ?) ou par La preuve par meuf ? Ne chante-il pas la révoltante prédestination quand il évoque l’alcoolisme de son pauvre héros nommé Yves Remord  (qui s’endort comme imbibé) ? Et que penser de ce titre lourd d’interrogation Pourquwhy ? Autant de mystères nécessitant de multiples écoutes pour être seulement légèrement éclaircis (personnellement, je ne suis pas encore certain du sens à donner à son Parmesan autour de toi de 1992…).

3 Pratiquant le métissage des langues, Sttellla donne l’occasion aux Français, trop souvent si peu ouverts à la culture des autres, de s’initier aux délices du parler belgicain. Quelle joie que de penser que bientôt, grâce à l’œuvre civilisatrice de notre chansonnier missionnaire, des phrases sibyllines comme The fritkotsave the Queen ou On veut d’abord gletter et puis regletter ce qu’on a fait après n’auront plus guère de secret dans l’hexagone. Mieux, les auditeurs auront même eu l’opportunité de s’initier au néerlandais, nécessaire à la parfaite compréhension de certains passages aux relents ésotériques (une bise à celui qui saura expliquer ce que veut dire Andy Waarom ou Love story aanzee avec ma fi-aanzee).

4 Outre sa maîtrise langagière, Sttellla (qui a jadis vécu dans une chambre de Sorbonne, ne l’oublions pas !) n’hésite pas à solliciter nos esprits, habituellement laissés libres d’occupation par les chanteurs actuels, et à nous plonger dans le puits sans fond de ses pensées transcendentales. Qu’on en juge par ces deux interrogations qu’il soumet à notre réflexion, parmi tant d’autres contenues dans ses thèses universitaires de 3 minutes 30 : pourquoi les pommades anti-âge ont-elles une date de péremption ou est-ce qu’il faut croire un mythomane quand il dit qu’il est mythomane ? Peu d’artistes peuvent se vanter d’autant faire appel à l’intelligence de leur public !

5 Et même si vous ne pigez pas tout, les musiques sont rythmées tendance rock, entraînantes et chouettes comme tout !

Bref, vous l’aurez compris, la Belgique n’est pas un pays, c’est un état d’esprit ! Et Sttellla en est notre meilleur ambassadeur. Plongez dans son œuvre avec votre âme d’enfant, vous en ressortirez ragaillardis et prêts à affronter les vicissitudes que cette chienne de vie nous réserve. L’écouter, c’est combattre l’ennui et ses trop nombreux représentants, c’est faire fi de l’esprit de sérieux qui nous mine à petit feu, c’est s’offrir à domicile un plateau de fruits d’été où prédominent la pêche et la banane. Elle est pas belge, la vie ?

Sttellla, Regratte-moi dans les yeux, 2016. Le site de Sttellla, c’est ici.