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Ceux dont la guinche est la gâche

0090-faut-qu-ca-guinche-pochette-album-mots-melesLeur raison sociale est à elle seule une incantation, une déclaration de fête : Faut qu’ça guinche ! Disons-le tout net : y’a pas tricherie sur la marchandise, ce qu’ils promettent ils le font. Effectivement, ça guinche et c’est peu dire ! « On a avec nous des sons métissés / Du rock de guinguette pour te faire guincher / Pour remettre à neuf ton imagination / On a mis en stock un bon paquet d’chansons… »

Ces grenoblois font de fait partie de ces groupes « festifs » dont on se dit que le disque n’est que simple échantillon, qu’il faut d’abord et avant tout les voir sur scène, que c’est là où ils se réalisent pleinement. On n’aura pas tort sauf que cet échantillon discographique est tout de même un beau produit, agréable quand il passe entre nos deux oreilles. Que ça guinche pareillement, que ça secoue vos neurones. Qu’à la fois ça s’écoute et que ça donne envie de bouger, de danser (attention aux voisins, y’en a des qui n’ont pas le sens du rythme !).

Comme d’autres du même cru, ce groupe cultive sa propre culture : ils se chantent, définissant mieux que personne, mieux que le moindre journaliste, ce qu’ils font. « A trop aimer Gainsbourg on copie ses défauts » chante Norbert, concédant que « [sa] voix est rocailleuse, certains diraient même abîmée / mais tant qu’elle tient encore je continuerai de chanter. » Ne croyez pas pour autant qu’ils chantent devant leur miroir : ils se présentent, se questionnent (« Si j’étais peintre plutôt qu’chanteur / Qu’est-ce qui sortirait d’mes doigts / Est-ce que j’aurais aussi une couleur / Est-ce que mes toiles parleraient de moi ? »)… Et parlent tant des kilomètres parcourus (« Alors on roule, roule, roule, on ira polir les pavés ») que des collages d’affiches pour annoncer les concerts (« …nos affiches sont plus sympas / Qu’celles du FN qu’on voit là-bas à cause des gens qui pensent comme ça »).

Le groupe se chante. Alors en connaissance, en complicité, nos cinq amis (Norbert, José, Romain, Emke et Justin) posent un regard sur le monde, un regard politique, critique, de bon sens.

Norbert chante presque pareil que Fredo des Ogres de Barback (des presque voisins !) : vite, comme si le temps était compté, vital. Ça doit être ça l’urgence de chanter…

Aux sonorités trad’ qui percent ici et là, on sait, on sent bien que Faut qu’ça guinche aurait été un groupe folk s’il était né il y a quatre décennies. Signe des temps et nouvelle tradition, on s’en va chercher des sonorités plus larges encore qui convoquent un monde bien plus grand, bien au-delà de son quartier, de sa région, de son pays. Au passage on se réinvente un monde bien plus plaisant qu’il n’est en réalité.

 

Faut qu’ça guinche, Mots mêlés, Quart de lune/Socadisc 2014. Le site de Faut qu’ça guinche, c’est iciImage de prévisualisation YouTube

4 Réponses à Ceux dont la guinche est la gâche

  1. Norbert Gabriel 24 février 2015 à 3 h 21 min

    Cher monsieur Kemper,
    Des étrangers au patois lyonnais ou au parler « gaga » – le dialecte stéphanois et environs – pourraient se fourvoyer à la lecture du titre: la « gâche » dans dans les traboules de la Croix Rousse, dans les banlieues de Pierre-Bénite (qui est très rouge cerise et politique, comme son nom ne l’indique pas) ou dans les rues de St Etienne, ou d’Unieux, la « gâche » disais-je, c’est la place, l’endroit où on se pose, où on se planque, où on vit sa vie, tranquille, de préférence… Une bonne « gâche » chez Guignol, Gnafron, la mère Cottivet, Paul Bocuse, Edouard Herriot, Anne Sylvestre, Michèle Bernard, Amélie les crayons, et autres lyonnais célèbres, c’est une sorte de nirvarna qui fait rêver.
    Rien à voir avec l’assimilation possible au verbe « gâcher » ou au terme « gâchis »… Rien à voir…
    Nous savons bien que Lyon est la capitale des Gaules, mais le temps a passé, et toute la France ne parle pas lyonnais… Je le déplore parfois, on ne guérit jamais de son enfance, et puis le patois auvergnat ou bourbonnais, c’est pas mal non plus…
    Bien à vous,
    Ppc Professeur Nimbus.

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    • Michel Kemper 24 février 2015 à 9 h 03 min

      Fourvoyons-nous, mon cher. Nos guincheurs n’étant de pas si loin (de Grenoble, on est vite à Lyon) auront apprécié cette gâche, eux. Et si parmi nos lecteurs, certains n’ont pas compris ce titre que seule la sonorité excuse vraiment, ben ce sera du gâchis. Tant pis.

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  2. Danièle Sala 24 février 2015 à 11 h 40 min

    Merci au professeur Nimbus pour le cours de sémantique ! si la gâche a plusieurs sens, on sait ce que guincher veut dire, et avec  » Faut qu’ça guinche », on ne gâche pas son plaisir .

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  3. catherine Laugier 25 février 2015 à 13 h 55 min

    Faut qu’ça guinche fait partie d’une nouvelle inspiration de jeunes groupes que je qualifierais de « Nouvelle Java », je ne sais pas si quelqu’un a trouvé un nom plus approprié à ce mouvement, mais ça me fait drôlement plaisir parce que c’est joyeux, intelligent, d’une grande richesse musicale, fille émancipée de la tradition française et des musiques du monde. Et vive l’accordéon , les cordes, les percussions et tout ce qui fait de la belle musique, et les voix qui ont du caractère ! Une pêche d’enfer, les Pavés http://youtu.be/TDeJ3UcmEJc

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