Allain Leprest : le livre qu’il méritait
Ceux qui espéraient lire en cet ouvrage la biographie définitive de Leprest seront déçus. Encore qu’il y ait pas mal de façons de relater le parcours de ce natif de Rouen. Ici ce sont des bribes de vie et des ellipses, des séquences qui s’attardent sur quelques moments et en enjambent d’autres : « un livre à plusieurs entrées, récit entrecoupé de formes courtes », d’abord « à quatre mains », celles de Marc Legras (ex de France-Musique et de France-Culture, de Paroles et Musique et de Chorus), celles d’Allain. Puis demain, à deux mains seulement, dès après un funeste quinze août (à peine esquissé, d’ailleurs, par « des véhicules de police, au bas de l’hôtel » et cette nouvelle qui « fait le tour du village »). Nous sommes (ou nous nous croyons) tellement tous dépositaires d’un peu de la vie d’Allain Leprest que ce livre nous surprendra, qui élude des épisodes que nous savons ou que nous croyons savoir, tout en en réhabilitant d’autres à ce jour inconnus du plus grand nombre.
C’est pourtant, n’en doutez pas, un livre passionnant que celui-ci, parfois, souvent lumineux, qui éclaire des pans entiers de Leprest et nous fait comprendre sa métamorphose en parolier et chanteur, phare à son insu d’une certaine chanson. Qui trie, choisit, met en exergue ou non. Un vrai livre d’auteur, responsable de ses choix. Au final nous donne de quoi mieux connaître le bonhomme et comprendre son œuvre.
Ce livre attendu (nous savions sa mise en chantier depuis des lustres, bien avant le 11 septembre d’Antraigues), nous lui avions fait place depuis longtemps dans notre bibliothèque idéale de la Chanson. Place qu’il mérite amplement. L’amateur de Leprest y trouvera largement de quoi satisfaire sa curiosité, son pesant de révélations, de petites et grandes anecdotes. Et de textes inédits, grand luxe, comme quand on demande du rab à la cantine.
Quatre-cent pages, il pèse son pesant d’émotions, arrivant comme une enclume dans une soupe de larmes pas encore taries. Qui plus est dans un contexte favorable.
Les disques d’inédits de Claire Elzière et de Jean Guidoni, bientôt celui de Jehan dit-on, le spectacle de Torreton, ceux des Jamait-Guidoni-Didier et d’Entre 2 Caisses qui réensemencent Leprest (pensez bien à arroser les fleurs une fois par semaine…), c’est tout Leprest tout bonheur.
C’est dire si on sera néanmoins surpris, dans ce livre appelé à être de référence, de trop nombreux oublis dans la partie « discographie des interprètes d’Allain Leprest » (même le cd Je hais les gosses d’Entre 2 Caisses, de 2013, y est absent, comme le titre A l’assaut de l’île sur leur premier album de 2000, ça et d’autres omissions encore telles que Christopher Murray, Monsieur Poli…). Dommage.
Marc Legras, Allain Leprest, dernier domicile connu, L’Archipel 2014.
En compilant ce qui est paru, ce qui va paraître, on finira peut-être par avoir un portrait à peu près complet quoi que… Pour certains Leprest n’a eu qu’Ivry dans sa vie, pour d’autres, c’est Ménilmontant en oubliant les 40 années qui ont précédé, et chacun déteste cordialement les autres … J’exagère à peine…
C’est comme qui dirait « gens que j’aime » sauf les autres…
C’est un peu comme pour Brel : chacun a son Leprest, brandi comme SA vérité intime. Et tant pis pour les autres. C’est une sorte de hold-up de la mémoire en fait. C’est surtout pathétique. Et comme qui dirait un pote perfide : tous ces hommages, fallait le faire avant…
Quand je dis que chacun a son Leprest, je ne songe pas une minute à des gens qui l’auraient connu après coup, après sa mort. Non, mais bien de tous ses amis, de toutes ces connaissances et dieu seul sait qu’ils et elles sont nombreux. Moi, comme bien d’autres, j’ai mon Leprest, nourri d’anecdotes persos avec lui, entre nous. Des discussions, des confessions. Les siennes et celles de beaucoup de ses proches. Tous nous avons fait un bout de route avec Leprest, le célébrant de son vivant, faisant tout pour le sortir de la confidentialité dans lequel il était de fait confiné. « Fallait le faire avant » ? Nous l’avons fait, je crois. En ce qui nous concerne, à NosEnchanteurs, il suffit de lire es articles antérieurs à son décès. Et encore, NosEnchanteurs n’existe que depuis fin août 2009…
Je n’ai pas connu Leprest, je ne l’ai jamais vu sur scène , mais je sais le coup de poignard dans le coeur que j’ai reçu ce 15 août 2011 au soir, quand j’ai appris l’annonce de sa mort sur France Inter .
Sur ma table de nuit depuis hier, je ne sortirai pas non plus ce soir.
Oui, comme le dit M. Kemper on a tous son » Leprest » avec ses souvenirs personnels, ses rencontres, ses » engueulades » ( eh oui il y en a eu entre nous ! ), ses moments de tendresse et c’est tout cela pour moi Allain et j’ai toujours le coeur serré quand je l’écoute. D’Ormesson a raison, pour moi il a la puissance d’un Rimbaud…
On peut encore rendre « Hommage » à Allain Leprest…
Ce ne sera jamais assez…
Je ne peux oublier toute les émotions ressenties lors de ces prestations sur scènes.
Son absence me pèse et me peine toujours autant depuis trois ans, déjà…
Allain m’a tellement offert et je ne regrette que l’absence des radios lors de la sortie de ces disques avec Romain Didier ils représentent ce qui s’est fait de mieux depuis Brel et Tachan. Même si il y a des artistes majeurs comme Renaud, Lafaille, Pagani qui ont existe aussi et pour certains existent encore.
merci à votre journal pour les infos qu’il nous apporte
A noter également la réédition du recueil « Chants du soir » paru une première fois en 2007 aux Editions Folies d’Encre reprenant de nombreux textes d’Allain. Un vrai bijou et un Leprest authentique ! A posséder absolument ! Pour en avoir discuté avec lui en mars 2011 à Viricelles, son désir était fort de revoir publié cet ouvrage. C’est fait depuis peu alors précipitez-vous si vous ne l’avez pas !
Comme le chantait il y a vingt ans Pierre Louki à propos de Bobby Lapointe, lui aussi découvert après son départ :
« Quel dommage qu’on ne puisse mourir de son vivant « !
Salut Michel, c’est Emmanuel. J’avais répondu à ta demande de plumes pour nos enchanteurs et puis non finalement… Préparation d’album (enr. Pas avant novembre au plus tôt hélas). Marc est venu à un de mes concerts juste après la mort d’Allain. Tu sais, il a fait un gros taf de recherche, sinon il ne serait pas venu me voir !!! Je n’étais plus ACI mais chevrier et avais accepté la demande d’un pote de faire une « pige » pour son resto qui « boitait ». On a échangé après le »concert ». Il souffrait bcp de sa disparition et il cherchait comme un dingue. Il a fait un gros boulot mais je crois bien qu’il ‘ne faut pas trop lui en vouloir pour ces qq omissions… Le 15 août 2011 j’ai eu la mauvaise surprise d’être réveillé tôt le matin par un coup de fil que je n’oublierai jamais. Très belles lignes que les tiennes. À… Emmanuel (facebook que je quitte définitivement). Merci pour lui.