Virgule, étonnante ponctuation de la chanson

Il sera dit que la chanson fait étonnante ponctuation : voici Virgule, une voix qui, sans être belle, interpelle par sa tonalité faite d’audace, de fragile assurance, d’une posture rock affirmée qui rêve de lyrisme (« entre rock sauvage et folk apprivoisé » dit la bio), d’un univers un rien déjanté. Elle nous chante « reprisez-les vos vieux smokings » comme Rouget de L’Isle entonnerait un chant de combat à Marseille, comme si son propre dressing faisait barricades. Étrange fille qui ne semble rien savoir de la chanson aseptisée, qui ne sait stériliser ses mots avant de se les mettre en bouche. Et, de fait, nous réveille un peu de notre torpeur. Notamment par la chanson-titre où le désir est palpable, chaud comme la « braise à la chemise », immédiat, sans fard : « Les précieuses pucelles se penchent à la balustrade / Leurs poitrines frétillent là-bas sur l’estrade / Et je me pends à leurs yeux sans brillance. » Les textes sont parfois énigmatiques, tourmentés, impressionnistes, un peu comme l’équivalent féminin de Wladimir Anselme. Art étrange et ma foi séduisant, où des mots fanfaronnent tandis que d’autres se cachent dans la pudeur des sentiments… « Okinawa me soulève / Et le soleil se couche encore / J’ai le cœur insonore. » Huit titres c’est suffisant pour se faire une idée de cette presque trentenaire, cette parisienne qui, par ce cédé, autoproduit ainsi une belle carte de visite, suffisante pour interpeler des directeurs artistiques, s’il en existe encore dans les maisons de disque. Car si c’est encore un peu confus, on sent la potentialité, comment pétrir la dame (avec douceur et retenue), mettre au point la Virgule, faire de cet ep un promontoire, un tremplin  : « Elle a un truc qui m’Fait tilt / Qui m’fous l’trac » chante-t-elle et c’est à peu près ça.

Virgule, Les précieuses, autoproduit (2012). Le site de Virgule c’est ici.