C’est Michèle Bernard qu’on fête !

Michèle Bernard et Juliette (photos Catherine Cour)

Samedi 26 janvier, à Vauvert, pas loin de Nîmes, une association très active dans le (petit) monde de la chanson « de parole » organisait une de ses soirées « spéciales » : la fête à Michèle Bernard.

De fête, en réalité, c’était plutôt celle du public !

Un programme de rêve, autour d’une des auteure-compositeure-interprète majeure de ces trente dernières années… Une des plus inspirées, dans les musiques qu’elle compose comme dans les textes qu’elle écrit. Depuis son premier disque, ses premières chansons, Michèle Bernard est devenue une compagne de route, une référence. D’autres l’ont rejoint dans ma médiathèque du cœur. Ce soir, ce sont vraiment les racines de tout ce que j’aime qui sont là.

Courant-scène a composé « mon » plateau idéal. Bien sûr, il aurait pu y avoir une dizaine d’artistes de plus (certain(e)s étaient d’ailleurs dans la salle, d’autres présentes par la pensée…), mais rien que ceux qui se donnaient rendez-vous sur scène, c’était déjà bonheur de les retrouver ! Un bonheur et une frustration… une, deux chansons et c’est tout ! J’en eu voulu au moins le double, le triple… qu’ils restent deux ou trois soirs faire la fête à Michèle ! Non… ? Quel dommage ! Mais ne pas boudons pas notre bonheur.

Chacun des artistes présents a, pour rendre hommage à leur amie, appris une ou deux des chansons de Michèle. Et c’est plaisir d’entendre interprétées par des voix aimées, ces chansons éclairées d’une autre et nouvelle lumière. Avec, quasiment tout le temps, la présence, l’appui de Michèle elle-même, accordéon en main, émotions à fleur de voix, rires, sourires, presque fou-rire avec Gérard Morel, presque larmes avec Anne Sylvestre…

Reprenons au commencement. La voix-off de Geneviève Sarguet nous informe d’abord, à la manière d’un Laurent Ruquier, des noms de ceux qui auraient bien voulu être là, mais qui n’y seraient pas…

Véronique Pestel, Michèle Bernard, Rémo Gary

Et puis Michèle (accompagnée pendant les trois heures du spectacle par son talentueux pianiste-complice Jean-Luc Michel : une sacrée performance physique !) ouvre la soirée, et accueille sur scène, un à un, les participants (tiens, ne devait-il pas y  avoir aussi Juliette ?). Le spectacle commence. Fort : LE duo avec Gérard Morel, « Par quoi tu commences ? », que je n’avais jamais encore eu la chance de les voir interpréter en direct. Il s’apparente, en drôlerie, à un autre duo incontournable : Anne Sylvestre et Boby Lapointe : «  Depuis l’temps que j’l'attends mon prince charmant ». C’est là que le fou-rire a bien failli commencer… après la troisième reprise, faute de trouver la bonne tonalité !

Ensuite c’est Presque Oui qui chante « sa » Nina, puis la « Lola et tout ce qui s’en suit » que se partagent maintenant Michèle Bernard et Francesca Solleville. Il reste sur scène pour accompagner Anne Sylvestre sur « Les vieux, les enfants ». Puis ce sera Entre 2 Caisses, Rémo Gary, Véronique Pestel qui me fait presque pleurer avec « La vieille chèvre », une des toutes premières chansons de Michèle, qui garde le pouvoir de m’émouvoir, trente-cinq ans plus tard… Jean Guidoni précède l’école de musique de Vauvert (j’ignore qui a composé l’arrangement musical de « Nomade » qu’ils nous interprètent, mais il est de toute beauté !). Retour d’Anne Sylvestre pour, en duo avec Michèle, nous apprendre « Le bon côté de la charité », Corentin Coko nous fait la surprise d’une nouvelle chanson (le programme annonçait bien « des surprises »… en voici une bonne !). Un trio se compose sur scène : Michèle, Véronique et Rémo. Puis c’est un quintet : Michèle se joint aux quatre Entre 2 Caisses. Gérard Morel est un sextet à lui tout seul (ne me faites pas dire ce que je n’ai pas dit !) quand il interprète une chanson habituellement chantée par les cinq filles d’Évasion « Nous, les baleines ». Retour de Michèle qui veut faire chanter au public le refrain de sa chanson grecque « Vassilis Kaimos ». C’est pas très compliqué : ça dit « lalala, lalala » ! Et vers la fin de la chanson Michèle se prend carrément pour Nana Mouskouri, elle emprunte la première paire de lunettes disponible et se met dans la voix les trilles de Nana. C’est alors qu’arrive du diable… vauvert (!) le Zorba le plus improbable de la soirée : Juliette elle-même, sirtakant, bouzouquant et caracolant autour de Michèle comme une troupe de cabris… deuxième départ de fou-rire de la soirée (dans le public, tout au moins ! Mais en regardant mes photos, je me dis que Michèle a bien du mal à résister, elle aussi !). Joie de voir arriver la deuxième « surprise » et de voir à quel point les deux chanteuses s’amusent de cette petite blague et se plaisent à se retrouver toutes deux sur scène ! Bien sûr, ce sont les lunettes de Juliette qui atterrissent sur le nez de Michèle pour la partie endiablée de la chanson… et les facéties de Juliette mettent le public en joie ! Il se reprend lorsque Jean Guidoni revient, puis sur le duo Michèle Bernard et Presque Oui… C’est alors qu’une voix « off » commence à réciter « Comme par hasard », un texte un peu triste de Michèle, une histoire de séparation… je me dis « tiens, je connais cette voix ! » Une belle voix profonde et grave… je finis par me dire « Ah ! Ils ont enregistré Joyet parce qu’il ne pouvait pas venir ? » et au même moment émerge de l’ombre… Bernard Joyet lui-même !!! Sacrée troisième super surprise ! Immense frustration, aussi, puisque c’est pratiquement la fin du spectacle ! Tout le monde reviendra chanter en chœur la « Comptine pour enfants sales » avant le salut final. Trop tôt ! Beaucoup trop tôt à mon goût…

Comme toutes et tous, je suis sortie ravie de cette soirée et me dis que tant d’amitié, de respect, de complicité… allons, lâchons le mot : d’amour entre ces chanteurs, ça fait du bien à tout le monde : au public qui le ressent et le partage… et aux artistes eux-mêmes. Ils ont quand même un métier de Eux, si solitaires malgré la présence du public, ont parfois l’occasion de se croiser dans des festivals ou des co-plateaux… mais c’est rare ! Alors j’espère qu’ils en profitent tous et que ce partage est aussi une multiplication (c’est des maths à ma façon…). Et que ce genre de spectacle va donner l’idée d’en imaginer plein d’autres. Michèle Bernard et ses amis sont capables de faire venir à Nîmes des gens de Lille, de Nantes, de Toulouse, de Bordeaux… Qui dira que la chanson « à texte » ne mobilise pas ? Il faut juste lui donner un lieu pour s’exprimer…