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Avignon 2012 : Si c’est d’ l’Akrich, c’est pas d’la triche !

On s’accroche à l’Akrich (photo L’Union)

J’ai des lacunes… j’ai même de grosses lacunes ! Et je bats ma coulpe. Si je connaissais Hervé Akrich de nom, je n’avais encore point eu l’occasion de le voir ni de l’entendre. Quoi ? Comment ! Quid ?… entends-je déjà s’offusquer certains fidèles lecteurs de NosEnchanteurs : dire qu’on aime la chanson et ignorer Akrich, ce serait un peu comme se piquer d’être un gourmet et n’avoir jamais mangé d’oeufs en meurette.

Comment ça, certains d’entre-vous ne connaissent pas les oeufs en meurette ? Pour le bourguignon que je suis, ne pas avoir dégusté ce plat apparemment simple (mais roboratif et d’une délicatesse qui requiert un tour de main attentif et une cuisson particulièrement précise des oeufs dont le blanc doit être cuit à point, tout en laissant le jaune tout juste liquide à l’intérieur, avec une sauce au vin rouge, mais pas n’importe quel vin rouge… mais, bref, je m’égare car je ne suis pas là pour vous faire de la retape gastronomique… mais un compte-rendu de spectacle), constitue un manque évident de culture culinaire (et même s’il y a deux fois la syllabe « cul » dans ce que vous venez de lire, pas d’histoire : comme je sais que le cul lasse, je sais qu’il me faut, du coup, l’ôter). STOOOP !!!

Oui, je m’égare, mais c’est à cause d’Akrich, aussi : c’est quand même pas de ma faute s’il me fait penser aux oeufs en meurette ! Mais, pourquoi j’écris ça, moi aussi ?… Ah oui, ça y est : roboratif et délicat. Voilà, Hervé Akrich me fait penser aux oeufs en meurette car, tout en étant d’une subtilité et d’une finesse rares, vous ne repartez pas de son spectacle avec le ventre vide, mais avec la tête pleine de belles images, de bons mots et de bonnes idées.

Et ça vous donne envie de partager cette découverte. Que pleins d’autres gourmands de chansons viennent goûter ces oeufs dont la sauce doit être parfaitement dosée sous peine de devenir un plat lourd et indigeste. Et merde, voilà que ça me reprend cette analogie avec la cuisine !…

Il faut dire aussi que Hervé m’a furieusement fait penser à ces grands chefs, dont on voit bien que la bonne chair leur profite pleinement, tout en sachant parfaitement que leur geste est d’une finesse, d’une dextérité et d’une technicité parfaitement maîtrisées.

Voilà, j’ai trouvé ! Si le chef Akrich parvient à me faire saliver de la sorte, c’est parce que, déjà, il sait séparer le bon grain de l’ivraie et choisir de bons produits. Chez lui, les mots sont des mets. Peut-être qu’il se gourre, mais (y a pas de mais !), pour lui, il n’y a apparemment pas de mets honnêtes sans aimer le son qu’ils font en bouche. Et de ce plein de son (céréales qui leurrent), bon comme du bon pain, il utilise levain qu’il faut pour nous faire lever la patte (la pâte ?) sans qu’on s’encroûte.

Je sais, ça devient n’importe quoi et cette chronique part en live, mais, à vrai dire, je ne contrôle plus grand-chose. En fait, je pense que Chef Akrich a pris la main sur mon esprit, qu’il est en train de fouetter comme une crème à lécher.

« Toute naturelle, faite à l’humain », sa p’tite chanson me monte à la tête comme le f’rait un bon verre de vin. De sa belle voix pleine (qui prend parfois des inflexions à la Nougaro), il barrit, tonne, chantonne, entonne et cartonne avec des chansons qui sont des plats qui ne tombent jamais à plat, qui me regonflent et jamais ne me gonflent : bref, tout ce qu’il mitonne m’étonne et, sans en faire des tonnes, il me chattertonne (il me scotche, quoi !).

Bon, outre sa voix (qui doit en faire tomber, sans être, pour autant, d’outre-tombe), il faut aussi ici écrire qu’il est formidablement accompagné par son second de cuisine, Michel Kanuty. Celui-ci sait mijoter de beaux morceaux à s’en pourlécher les 20 doigts (ben ouais, ceux des pieds aussi, tellement c’est bon !) depuis son piano à feu et à jeu doux : il réussit ainsi à lier la sauce (l’assoce ?) avec la petite goutte qui fait déborder le jazz sans piment, mais avec sentiments. Sans mettre le feu à nos papilles ni à nos pupilles (de la ration), les deux maîtres queux se la jouent donc jazzy sans trop ouvrir les gaz.

Pour autant, s’il n’y a point de brûlot chez Akrich, celui-ci sait aussi parfois agrémenter un plat (ou une chanson : vous aurez des ors mets compris que, chez lui, c’est un peu la même chose !) avec la dose d’acide si trique cynique qui peut le relever à la hauteur des mets xicains (et c’est un mec si con qui vous le dit !).

Une dose d’écriture précise, une mesure d’humour subtil, un zeste d’acide (pas) si triste, une pincée de musique cool qui coule, une voix bien timbrée pour un mec complètement toqué : bref, si Jean-Claude trichait, on peut dire que Akrich, lui, ne triche pas et qu’il chante sa vérité avec la sincérité des oeufs en meurette. Un café et l’audition, épicé tout !

Hervé Akrich chante au Théâtre des Vents, Festival Off d’Avignon 2012, dans « Il faudrait qu’il m’arrive quelque chose », 63, rue Guillaume Puy (à 2 pas de la rue des Teinturiers) – Réservations : 06 20 17 24 12; tous les jours pairs jusqu’au 28 juillet inclus, à 22H45. Le site d’Hervé Akrich, c’est ici.

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2 Réponses à Avignon 2012 : Si c’est d’ l’Akrich, c’est pas d’la triche !

  1. Chantal Bou-Hanna 26 juillet 2012 à 6 h 33 min

    Ah ! Franck ! Tu aurais pu ne pas signer ce papier, on aurait deviner son auteur sans aucun doute possible possible! Se lever d’un œil morne et tomber comme ça tout de go sur ton article ça fait un bien fou !!! Tes écrits précédents étaient excellents, celui-ci est savoureux et subtil, enfin on retrouve ton style si particulier qui oblige parfois à plusieurs lectures mais qui fait finalement écrouler de rire. Quel jonglage de mots ! On en oublierait presque l’ingrédient de base à savoir Monsieur Akrich, mais peu importe, on connaît son talent. Un peu plus n’aurait pas été de trop, j’en reste sur ma faim, mais quel régal!

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  2. Olivier Durupt 28 juillet 2012 à 15 h 58 min

    Je connaissais les oeufs en meurette mais pas Hervé Akrich…
    Je savoure !
    merci

    Répondre

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