Sarclo, l’amour, la mort, la connerie
Sarcloret, 4 février 2012, Centre culturel Le Sou à La Talaudière,
Toujours l’art du bon mot, de la phrase qui tue. C’est un rite chez Sarcloret, tant qu’il l’a gravé dans la pierre, pierre tombale il va de soi. Sur l’écran blanc de ses nuits noires, il projette ses ici-git pas toujours de bon goût, néanmoins délicieux pour qui sait apprécier. Ah ! Sarcloret (il récupérera son diminutif de Sarclo au départ proche de son presque homonyme élyséen). Un bon concert de Sarclo n’existe pas (hors celui, jadis, gravé sur cédé avec le guitariste Bob Cohen) : rien n’est jamais tout à fait raccord, la voix est de plus en plus approximative, quelques mots tombent de haut, pas nus mais sans effets. Tel est Sarcloret, on s’y fait. Là, il s’est accouplé et, sur scène fait semblant de ne pas vraiment connaître sa partenaire, le goujat, à toujours feindre de confondre son prénom. Mélanie Depuiset joue son rôle de « Coccinelle-de-Gotlib », fait les petites percussions et la grande voix, reprise chaussettes et chansons, et c’est pas con. Elle fait souffleur aussi, colmatant les oublis, les erreurs, les omissions de son barbu d’homme. Car, pour sa belle, Sarcloret s’est aussi laisser pousser les poils. C’est pas bête.
Le répertoire fait anthologie. Avec un triptyque entre tous particulier : l’amour, la mort et la connerie des hommes qui sont tous que « du brun ».
C’est un public d’abonnés. A la saison culturelle j’entends, pas nécessairement à Sarclo. Ça tique, ça tousse un peu, ça s’étrangle. Les saillies de notre helvète ne sont pas toujours partagées par tous. Derrière moi, c’est le carré du troisième âge, à qui il ne faut pas trop parler de la mort. Car, si pour moi c’est encore une idée abstraite, pour eux c’est de la proximité, ça brusque, ça rappelle à sa triste condition, au lendemain qui déchante mais cantique. Pendant ce temps, les stèles défilent sur l’écran, pensées figées dans le marbre, telle ce « Dieu est mort, moi aussi »…
La mort donc. Et l’amour, où les nichons protubèrent et prolifèrent, en des termes forcément inédits : n’est pas Sarcloret qui veut ni qui peut. Il aime « à fond les manettes, à fond les ballons. » Lui, c’est rien que des tendresses et de merveilleuses cochoncetés.
Mais c’est pas ça encore qu’on retient le plus de ce récital. C’est, j’y tiens, comment Sarclo traite ses contemporains. Traiter ? non, il les observe et simplement restitue. « Cent ans sans guerre c’est trop longtemps / Le jour où l’horreur doit venir saura-t-on seulement réagir ? Faut-il apprendre à nos enfants comment violer les mamans des autres ? » Il se passe pas trois chansons sans qu’il revienne à la charge, sur qui nous sommes, nous collectivement. De sa voix calme, pas même colère, il dit quelques vérités bonnes à chanter.
Paré de ses guitares, chantant aussi Jean Villard Gilles, parfois se levant pour interpréter Dylan, pour faire le beau, pour faire le Bob, Sarcloret déroule un récital incongru, fait de hauts et de bas, lisant même quelques monceaux d’horreur tirés de la très sainte bible. Il blague et philosophe : « La vie savez-vous n’est pas longue / Et à faire les choses à moitié / On la traverse à peine et on voit qu’on est passé à côté. »
Le fan-club des premiers rangs réclame son dû et bisse l’artiste. Quelques rangs derrière c’est applaudissements minimum, comme quand on fait la politesse. Mais c’est pas dit que notre Suisse ne touche pas. L’effet Sarclo distille les consciences longtemps après encore. Son bon sens est urticant. J’en connais qui doivent encore se gratter aujourd’hui.
Sarclo sur le net, c’est ici ; sur NosEnchanteurs, c’est là.
Pas aussi fort que le Y’en a marre de Léo Ferré, magnifiquement repris par Louis Ville : « En même temps que nos chagrins / Vous pouvez préparer vos larmes / Un jour nous ferons notre pain / Dans vos pétrins avec nos armes / Y en a marre ! » Mais urticant et décapant, oui. Rien qu’à voir son sourire plein de malice sur la photo, on peut le deviner.
Ce que j’aime particule hier ment, chez Sarclo, c’est qu’il est à la fois l’art brut, le con et le Bruand…
oups pardon, j’ai oublié de refaire le monde… allez faire du pain avec vos armes si ça vous branche, je le mange sans graisse de culasse… c’est fou comme ces révoltes de CM2 peuvent me fatiguer
Sarclo c’est ça : ça grogne, ça rit, c’est tendre…
claire Falisse
à chacun ses révoltes : « c’est logique et démocratique… »