Les Fatals Picards, tellement de gauche…
Ils auscultent notre société, non dans ses faits d’armes mais par l’autre bout de la gâchette, par l’absolu quotidien. Fins observateurs, presque sociologues, qui plus est d’une finesse remarquable. Écoutez Française des jeux et vous aurez la juste étendue de la misère de ce pays, la nôtre. Oyez La sécurité de l’emploi et vous saurez, chers enseignants, le juste miroir que vos tendent ces Fatals-là.
Mon père était tellement de gauche, on a eu tout plein d’accident
Il refusait la priorité à droite systématiquement.
Ils ne sont plus que quatre ; l’une de leur plume et excellent chanteur, Ivan Callot (« Ivan avec un i », tient-il à préciser), a mis les bouts pour tenter à son tour l’aventure solo. Les 80% restants, après flottement, sont repartis comme en quatorze, dans la même direction, la même veine qui hémoglobine pareil, aussi rouge, aussi saignant.
S’ils aiment portraiter les anonymes de la France d’en bas, ils aiment tout autant se faire leurs collègues. Ce fut Bernard Lavilliers en 2006, secoué comme pas permis, taillé en XXL. Qui, pouvait-il faire autrement, eu l’élégance de jouer son propre rôle dans le clip de la chanson. Ce fut Johnny Hallyday (voir vidéo ci-dessous) prévu pour l’album suivant. Là, les Fatals reprenaient sans vraiment le savoir (on le suppose) l’idée originale d’Éric La Blanche et traitaient à leur tour de la mort à venir (soyez patients, ça vient…) de l’idole sacrée. Mais Warner, leur maison de disques commune (à l’icône et à eux), a tiqué et le titre fut retiré in extremis. Sur leur nouvel album, c’est Yannick Noah qui a l’honneur de servir de cible, de punching-ball aux Fatals : à nouveau savoureux. À qui le tour ?
Alors elle achète des bouts de rêve avec écrit française des jeux
Pendant les trois secondes ou elle gratte elle tremble un peu
L’argent de la cantine des mômes il est passé dans le Kéno
Madame soleil elle va faire gagner les gémeaux !
Toujours revue sociale et politique, le récent opus, Coming out, est une charge impressionnante qui mesure les avancées et reculades dans La France du petit Nicolas. Les historiens auront avantage à se pencher sur l’œuvre des Fatals Picards un jour pour mieux comprendre l’état du pays France au début du XXIe siècle. C’est du brut, à peine poli… surtout pas poli ! Juste malaxé, régurgité par ce quatuor-là. Là où Delerm et Bénabar ne verraient que bobos, très chics, très classe, les Fatals Picards opposent une société majoritaire et quasi souterraine : celle des hlm, celle de la misère intellectuelle, celle des fins de droits, celle qui, demain, votera Marine sans le moindre mal de mer, sans roulis, sans tangage. Écouter les Fatals, c’est mieux comprendre le quart, la moitié et le monde en son entier.
Ah la la une avalanche en Haute-Savoie et un barrage qui vient de craquer
Faut appeler Bernard Lavilliers
Mais qu’est ce qu’on va pouvoir faire un volcan vient de se réveiller
Vite appelons Bernard, il aura une idée
Le site des Fatals Picards, c’est ici (ce billet a été précédemment publié sur l’écran du Thou’Chant).
Ha les fatals !
J’ai le souvenir d’avoir partagé de bons moments avec Jean Marc, le Batteur, il y a de celà bien longtemps, bien avant les fatals. Des nuits de musique, des enregistrements dans sa cave, et dejà un sens du spectacle de Jean marc qui n’hésitait pas à quitter la batterie pour venir chanter devant la scène. Alors, fatalement, c’est naturellement que je l’ai retrouvé quelques années plus tard sur de plus grandes scènes qu’à l’époque, et j’en suis très heureux.