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Moussu T e lei Jovents : Artémis, leur disque étalon

2742235_vQuand, après plusieurs écoutes de disques décevants, un peu pâles, convenus, copiés-lissés-collés, arrive un tel album sur la platine, vous cessez toute activité : vous entrez dedans, vous plongez dans les eaux de la Méditerranée. Et plus vous repassez le disque, plus vous allez loin avec eux : dans un monde précis et large à la fois, entre hier et demain, dans une convivialité rare perceptible même dans un enregistrement studio. Dans l’idée qui prédomine ici d’un hommage à la femme, Artémis en figure de proue (déesse de Phocée et protectrice de Marseille, Artémis est tant à la fois la figure de la lutte pour le changement, contre l’exploitation, que l’image de la maternité et de la douceur du foyer).

Eux, ce sont Moussu T e lei Jovents et ce disque est un joyau, pièce de choix de toute discothèque ordonnée. Bien sûr on les connait depuis pas mal de temps, depuis qu’ils existent, quand ce groupe basé entre Marseille, La Ciotat et Recife sortait en 2005, au Chant du Monde, son premier album : Mademoiselle Marseille. Moussu T e lei Jovents fait dans le melting-potes mais plus encore. Par l’inflexion de sa, de ses musiques, il fait presque œuvre d’historien, d’anthropologue, recherchant dans la chanson les racines de ces rencontres, de ces fusions, de ce troc musical où chacun apportait pour dot un peu beaucoup de ses origines. L’origine presque du vivre et jouer ensemble.

Moussu T est un groupe de caractère, à la marge de toutes modes, qui inlassablement poursuit sa route. On peut leur coller comme des post-it tous les qualificatifs : chanson (c’est évident), brésilien, pop, rock, folk, troubadours occitans… Ils seront tous justes mais, pris un par un, ne traduiront rien de ce qu’est cette formation à nulle autre pareille. Si ce n’est cette entêtante idée de blues méditerranéen qui, plus que tout autre, semble les caractériser. Ce cinquième album studio est un bijou comme il est rare, que tout amateur de chanson tiendra pour chef d’œuvre. Marseille est le réceptacle du monde et Moussu T capte dans les sillons de cet album le chant du monde dans sa quintessence. C’est blues, c’est brésilien, c’est aussi presque trad, d’un art que ne renierait pas Malicorne, même si la touche provençale perce l’écorce. Ecoutez Le bateau et plus encore Le drapeau rouge, vous comprendrez : « Passe-moi mon drapeau rouge / Que je l’accroche au volet / Regarde-le comme il bouge / Dans la rue ensoleillée / Passe-moi mon drapeau rouge / Et le noir tant que tu y es. » Car Moussu T ne chante pas par hasard, au seul unisson des cigales : c’est un coeur qui chante, une conscience, un combat. C’est un blues de révolte, un protest-song à la Woody Guthrie : « Ma fée (républicaine) est jolie / Les nouvelles sont mauvaises / Les temps ne sont pas faits / Pour la beauté / Étoile rapide / Vole la chérie / Des passionnés / De la liberté. »

C’est captivant, dansant (on imagine le public danser sur Mistral) : « Sûr que quand tu viens il fait beau / Enfin les cigales se taisent / Mais quand tu souffles sur les braises / C’est le k.o / Mistral, mistral, mistral / On voudrait tant que tu t’arrêtes / Mistral, mistral, mistral / De nous farcir la tête. » En français comme en occitan, c’est populaire dans la construction, lettré parfois, engageant toujours. S’il fallait un oriflamme à Marseille pour tordre le coup à son image souvent dégradée, ce serait sans conteste possible Moussu T e lei Jovents.

Moussu T e lei Jovents, Artemis, Le Chant du Monde, 2013. En concert le 15 juin 2013 à Mazan, le 21 à Digne les bains et le 22 à Marseille. Le (très beau) site de Moussu T e lei Jovents c’est ici. On lira aussi l’article de RFI musique sur ce disqueImage de prévisualisation YouTube

3 Réponses à Moussu T e lei Jovents : Artémis, leur disque étalon

  1. René Troin 14 juin 2013 à 13 h 49 min

    Moussu T e lei Jovents chantent en catalan ! C’est un scoop. J’en conclus que le centre du monde s’est donc déplacé de la gare de Perpignan à celle de La Ciotat…

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    • Michel Kemper 14 juin 2013 à 13 h 56 min

      Loin de moi l’idée de déclencher une guerre régionaliste ! Merci d’avoir corrigé cette faute de frappe !

      Répondre
  2. corinne 14 juin 2013 à 20 h 09 min

    superbe hommage ! je les ai entendus dans « sous le soleil .. » de serge levaillant, ils sont très intéressants ! j’ai beaucoup aimé l’album et leur connaissance de marseille et la ciotat ! j’y réside depuis quelques années et il faudrait plus de monde qui pense comme eux ici !! merci

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