Le nouveau Projet Pyrate de Bémer

Emanuel Bémer (photo Patrice Saucourt)
Incidemment vous vous réveillez sur un bateau pirate. En fait, « pyrate » c’est écrit, malice typographique qui doit sans doute nous faire mesurer l’effroi de la situation, le péril en la demeure sur ce bateau. Convenez que le rêve est presque banal, j’en fais presque toutes les nuits. Mais ici les trois intrus sont des enfants, et l’un d’eux est une gamine : horreur, femme et enfants portent malheur à bord et, comme chacun sait, il n’y a rien de plus superstitieux qu’un pirate, surtout orthographié avec un « y » ! Voici voilà la trame de ce nouveau spectacle-disque d’Emanuel Bémer, qui allie – c’est sa marque de fabrique – poésie et humour grinçant. Qui, sur dix-sept titres, va mener la barque tumultueuse, aventureuse, de ces pyratons et pyratonne par mer forcément houleuse.
C’est 52 minutes d’un récit haletant, alternant narration et chansons, monologue du capitaine Bémer concernant le péril que seraient « des mioches des gamins des bambins des marmots des petits des loupiots, des lardons, des moutards, des chiards, des polichinelles dans le tiroir… » sur un bateau (aussi effrayants que des cordes ou des lapins, eux-aussi bannis à bord) : difficile pour lui de s’en occuper, l’emploi du temps d’un marin, à plus forte raison s’il est « pyrate » étant fort encombré, surtout en cas d’abordage. Au passage, c’est fou ce qu’on apprend de la vie en mer, Bémer étant aussi pédago qu’enchanteur…
Haletant vous dis-je et bien rendu, sur ce disque (qu’en est-il sur scène ?) par un soin tout particulier accordé aux sons. Car ils sont nombreux les musiciens sur le pont, ça fait même parfois ample et généreux orchestre, entre trompette, cor et trombone, violon et violoncelle, batterie, basse, guitare et piano, cloches tubulaires, guimbarde, indiens et cavalerie… Tiens, que viennent faire ces deux derniers ? C’est assez bavard mais les chansons se retiennent bien, et les mélodies collent à merveille à l’aventureuse dramaturgie.
Où on apprend au passage les vertus de la démocratie pyrate, bien préférable il me semble à la nôtre : tout le monde y est écouté et toute le monde partage tout à part égale. Bolloré ne s’y plairait guère lui qui n’aime pas partager, tout breton qu’il est il n’a pas le pied marin…
Après 145 représentations du Pompon, sa précédente création, Bémer se mue en pyrate et ça lui va bien. Du coup, ça fait sept albums jeune public à son compteur. Avec une égale qualité. Les gosses peuvent lui faire confiance, et leurs parents acquérir ce CD, mille fois préférable à un programme télé.
Emanuel Bémer, Le Projet Pyrate, L’Association d’idées/InOuïe 2025. Une page sur le Projet Pyrate, ici ; ce que NosEnchanteurs a déjà dit d’Emanuel Bémer, c’est là. « Le Projet Pyrate » au Zèbre de Belleville le 5 mars à 16 h.
Commentaires récents