Barbara « La Joconde »
Sauvé dans Catherine Laugier, L'Équipe, La Chanson du Jour, Thématique
Tags: Barbara, Colette Renard, Paul Braffort
C’est moi que je suis la Joconde.
Je suis connue par le monde.
Au Louvre où la foule abonde
Pour me voir, on fait la ronde
Et moi, faut que je me morfonde,
La Joconde, La Joconde.
C’est moi que je suis la Joconde.
Léonard me crut gironde.
Va quand Léonard vagabonde
Mais que voulez-vous
Qu’on réponde ?
C’est vrai, j’suis pas trop immonde,
La Joconde
Barbara
Paroles et Musique Paul Braffort. Extrait du Super 45 tours mono « La chanteuse de minuit », 1958
Cette chanson date de l’époque où Barbara, poussée par Jacques Brel, commence à composer ses propres chansons. On la surnomme alors La chanteuse de minuit. Dans ce vinyle, elle est l’autrice-compositrice de deux titres, J’ai troqué et J’ai tué l’amour. Elle est accompagnée sur cet album par l’orchestre d’Armand Motta et le disque a été enregistré au Studio rue Jenner à Paris en février 1958, réalisé par Pierre Hiégel. La vidéo ci-dessus est un montage sur un enregistrement à la radio en piano-voix pour l’émission « À pas de loup » produite par Henri Spade et Cora Vaucaire.
Dans ce 45 tours Barbara reprend aussi un succès de Colette Renard, L’homme en habit, adaptation par Pierre Delanoë de la chanson Vecchio Frack de l’acteur, chanteur auteur compositeur Domenico Modugno (parmi ses chansons, Nel blu dipinto di blu (Volare), triomphe du Festival de San Remo en 1958, et Piove (Ciao ciao bambina). Chanson dédiée au Prince Raimondo Lanza di Trabia, agent secret pour les renseignements anglais et américain, officier, diplomate, président d’un Club sportif de football, mort de façon suspecte en 1954, sans doute un suicide.
Je voulais réécouter La Joconde, parfois appelée Menuet pour la Joconde, reprise dans plusieurs albums de Barbara, le premier étant Barbara à l’Écluse, 1959, où elle chante des auteurs divers, puis dans le double album de 1965 chez La voix de son maître, reprenant ses titres chantés en 1958 et 1959. Chanson qui fait écho à ces moments de restriction du budget de la Culture, et paradoxalement au projet concomitant de rénovation du Louvre, et de la création d’une nouvelle salle dédiée à La Joconde. Un projet pharaonique semble-t-il, c’est le cas de le dire, qui pourrait s’élever à 1 milliard d’euros dont une (grosse) partie devrait recourir au mécénat. Un projet de prestige pour redorer le blason de la France, même si la culture semble à deux vitesses, la distraction à but commercial d’un côté face à la conservation d’un patrimoine de l’autre.
Il se trouve que l’auteur-compositeur de cette chanson, qu’il a lui-même enregistrée, écrite pour le Court métrage éponyme d’Henri Gruel, approche sarcastique du tableau de Léonard de Vinci ( La Joconde : Histoire d’une obsession), scénario et commentaires de Boris Vian, Paul Braffort (1923-2018) dont j’ignorais tout (la Culture n’honore pas toujours les plus méritants) est un monsieur intéressant à plus d’un titre. Licencié en Mathématiques comme en Philosophie, informaticien, ingénieur, chercheur, écrivain, grand admirateur de Charles Trenet, parolier et compositeur de chansons, ami de Raymond Queneau et de François Le Lionnais cofondateurs de l’Oulipo (Ouvroir de Littérature potentielle) dont il fera partie à partir de 1961.
Directeur d’un Laboratoire de calcul analogique, il a été détaché à Euratom et au Centre européen de recherche et de technologie spatiale où il dirige les recherches sur l’Intelligence artificielle, à ses débuts en 1954. Professeur à Orsay dans les années 70, ses recherches portent sur la logique et la linguistique. Dans les années 90, il est directeur de programme au Collège international de philosophie. Il participe à la vulgarisation scientifique, philosophique, littéraire sur France Culture. Il a publié un ouvrage sur l’Intelligence artificielle en 1968, sur l’algorithmique littéraire en 1981, un « Science et Littérature » en 1998… Disponibles sur son site !
Paul Braffort, c’est un précurseur qui s’est intéressé aux problèmes intellectuels qui nous agitent encore en 2025, et comme le disait Le Monde en 1957, « Un calculateur sachant chanter ».
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