Natacha Tertone « Tous ces moments »

C’est comme un petit tourbillon
qui m’emporte
La mélancolie m’assomme
petit à petit
patiemment
Je crains d’oublier tous ces moments
Près de toi
La lumière de ton regard,
le son de ton pas,
Ton visage

Natacha Tertone 

Paroles et musique  Natacha Tertone. Extrait de l’album Le grand déballage (2000, 2024)

 Chuchotements et crachotements. Des mots égrenés puis une répétition entêtante, collante comme friandises de fêtes foraines ou valse tiersienne — en plus étrange. Natacha Tertone sait imprégner d’étrangeté ses chansons, nous gardant dans un entre-deux du doux et de l’âpre (cette saturation finale, comme l’oubli qui prend le pas sur le souvenir). De l’âpre ou du « sale », comme le qualifie elle-même son autrice-compositrice. Qui travaille d’ailleurs le mot comme du son et le son comme de la matière : « J’ai parfois un mot qui me percute comme un son, que je n’entends plus comme un mot mais comme un objet. […] Comme quand tu éclaires autrement ce que tu croises au quotidien et que ça fait ressortir quelque chose de nouveau (1) »

Ressortir quelque chose de nouveau, c’est le mot : on l’avait découverte sur une de ces fameuses compils des Inrocks à l’aube des années 2000. Les cartes postales (de Deauville…), un autre titre « sale » à l’électro saturée, qui berçait avec deux-trois autres nos années adolescentes. Un quart de siècle plus tard, nous la retrouvons, exhumée de nos souvenirs – intacts et bien vivante : réédition de l’album, scènes à venir. Et ce clip : Tous ces moments, réalisé à partir d’images en Super 8 retrouvées dans les archives familiales. Une mise en abyme du souvenir, si l’on peut dire.