Cash Misère : le faste de l’incongru
Ils se disaient être un « duo dépressif de chansons humoristiques » et semblaient se tenir à cette définition, faisant et chantant tout pour la mériter : il faut bien avoir son identité en ce bas monde de la chanson. Sauf qu’en fait de duo, supputant leur potentiel commercial, ils ont doublé de volume, passant à quatre : Aurélien Le Bihan aux chant, mandoline et contrebasse, Benoît Hazebrouck aux chant et guitare, Thierry Nicolas aux chant, guitare et contrebasse, Alexis Revon à la batterie. Ceci dit, ils tournaient cet été en trio… Seule la géométrie de leur art, leur « ironie salvatrice », ne semble pas variable.
On ne sait l’origine de leur dénomination, on le devine : les paroles sont définitivement misérables, mais cash. Misérables mais, en même temps, adorables et ma foi unique : qui donc oserait en écrire de telles ? Ceci dit, et c’est pas pas cafter quiconque, elles viennent d’ateliers d’écriture avec des gens tels que Jean Fauque et Xavier Lacouture. En tout cas fidèles à la profession de foi de Cash Misère : « des textes bien tournés issus d’esprits mal tournés ; une sensibilité à fleur de pot, une poésie qui dérape ». Pour être franc, ils professent encore exhiber « avec insolence leur verve interminable et une belle paire de tessitures » (fin de citation).
On ne sait pas grand’chose de ces grenoblois, si ce n’est qu’on trouve de leurs traces vidéos depuis une décennie et qu’un précédent EP, Chansons en vrac, à précédé celui-ci il y a trois ans.
Voici leur nouvelle production : dix titres dont quatre haïkus, courts par définition, un peu plus d’une vingtaine de minutes, pas folichon donc mais largement de quoi vous donner le sourire, c’est l’essentiel.
Et de quoi nous causent-ils ces deux-là qui sont trois et enregistrent à quatre ? De la solitude d’un jeté-par-sa-femme qui ne s’adresse plus depuis qu’aux objets du quotidien, d’une Marilou qu’ils ont piqué à son gourou Gainsbourg maintenant qu’elle est libre de droit, de locataires de l’au-delà qui passent de vie à trépas (une chanson à peine décomposée), d’une liste sans fin de maladies bien dégueu, style coloscopie, fuites urinaires ou pontages (« Longévité, faut-il prolonger ce qu’on veut éviter ? »), d’un mâle dominant et chauffard, fournisseur d’accidents, et d’un tentant péché mignon ici partagé avec une inconnue (non créditée sur la pochette). La plupart du temps sur de délicieux fonds swing bien remuants, dansants. De la chanson pas surclassée, non, mais classe quand même. Je vous conseille d’aller voir, de les entendre…
Cash Misère, Carte posthume, Traquenard production 2024. Le facebook de Cash Misère, c’est ici. Pour acheter cet album, c’est là.
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