Barjac 2024. No Mad, joyau en son écrin
Ajouté par Michel Kemper le 2 septembre 2024.
Sauvé dans Festivals, Lancer de disque
Tags: Barjac 2024, No mad, Nouvelles
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1er août 2024, festival Barjac m’en chante,
La salle Trintignant est décidément lieu étrange en ce festival. C’est là qu’à onze heures moins onze la chanson s’explique, se prolonge, que des discours s’élaborent. Puis, deux à trois heures plus tard, des concerts curieux, intimes, par nature différents, qui ne trouveraient leur place ni leur logique en d’autres lieux de la ville, s’offrent à un public peut-être plus connaisseur encore. On y a entendu Guilhem Valayé, on y a ouï Marie Fortuit… De petites pépites qui font grandes lumières dans la programmation.
Autres et fameux lumignons, ces cinq chanteurs et musiciens de No Mad. « On dirait qu’ils volent / Et parfois même ils volent / Comme des oiseaux la nuit […] On dirait qu’ils volent / De leurs baisers il volent / Quelques heures à la nuit… » Des artistes ici baignés d’obscurité, sans éclairage ni sono. Et pourtant incandescents, lumineux comme rarement. Des voix et quelques instruments, cordes surtout, un bodhrán et une clarinette. Des bougies aussi. Le temps est suspendu. En fait, nous sommes hors du temps, et presque de l’espace. Des effluves trad’ venues de loin, une poésie sans âge qui semble charrier le passé et scruter nos émotions. Sans effet de manches, nulle mise en scène : seulement une admirable poésie sans rien d’autre, dans sa presque virginité. « Le temps est une caresse aussi chaude que le vent… »
No Mad ne peut être que rebelle aux code-barres, aux trop faciles étiquettes. L’art de ce quintet se nourrit de tant d’influences qu’il est presque orphelin. Et vous laisse sans voix. Cette chanson semble cependant être l’héritière du trad’ (ne parlons pas de folk, ce terme tellement galvaudé qu’il ne veut plus rien dire), non au sens de paroles et musiques traditionnelles (si ce n’est l’évocation des sentiments, rien ici est repris aux thèmes traditionnels) mais comme la persistance d’un genre dans le temps, sa logique évolution. Il y a chez eux, dans leur ADN, de cette démarche jadis entamée par Gabriel Yacoub ou par Évelyne Girardon, par Dalila & Christian Laborde aussi. Et de cet art complexe, baroque et raffiné de Piers Faccini… No Mad nous apparaît pour ce qu’il est : une bulle d’oxygène dans la chanson, tellement étrange qu’elle en est presque incongrue, surprenante au-delà de tout. Qui plus est luxueuse malgré et paradoxalement à cause de son extrême dépouillement.
Tout est beau, tout est calme, apaisé. L’assistance est plus attentive qu’en n’importe quelle autre occasion, à l’unisson de ce récital d’exception qui nous est offert, dont chacun mesure l’importance. Dans un festival où, plus encore cette année, la chanson est plurielle comme jamais, No Mad nous offre encore un autre possible, une autre voie de la chanson, une facette plus rare encore, peu explorée, précieuse. Comme un joyau, dont cette salle Trintignant est décidément le plus bel écrin.
Découverte et retour aux sources.
Ils sont nos enfants et je pense à nos recherches avec Crëche début des années 70.
Des routes s’ouvraient, le monde changeait et nous n’avions peur de rien.
Merci Michel pour ce partage délicat, délicieux