Frasiak : il était une fois dans l’Est
10 février 2024, Théâtre du Forum, Feurs,
Ils et elles viennent parfois de bien loin, deux ou trois cents bornes… C’est dans l’ex capitale historique du Forez qu’ils se sont donné rendez-vous pour applaudir leur chanteur à chapeau ici en grande formation. C’est qu’ils le connaissent et l’apprécient leur Frasiak sans « z » et, quand on aime, on ne calcule pas son bilan carbone. On sait tout de lui, à l’Est rien de nouveau, mais on vient revivre, avec empathie, cette région désertée par le boulot, ses friches industrielles, la vallée des Anges, la jeunesse du chanteur dans la ville de Rimbaud… Et les herbes folles qui se sont emparées du jardin de papa. Même si « le vieux monde qui pleure / ça fait pas rêver… », y a du monde ce soir.
De toute cette salle bien pleine, bien peu ont regardé la veille les prétendues Victoires : nous ne sommes pas dans le même monde, pas les mêmes valeurs. Nos « aujourd’huis qui chantent » ne sont pas les leurs : « Y’a dans mes valises qu’un peu d’poésie / Et puis vous êtes là, de l’amour dans l’cœur / C’est comme un cadeau, du bonheur / Bienv’nue dans mes chansons militantes / Mes aujourd’huis qui chantent ». Ah, chansons militantes, comme dirait son pote Béranger « c’est pas ça qu’il fallait dire / on ne va pas s’en sortir » ! Frasiak chante la vie, sa vie, la nôtre, sans négocier ses mots, ni leur poids ni leur nombre. Ça doit dépendre de comment on les ordonne, de ce qu’elles nous racontent. La vie est politique et la chanson de Frasiak l’est tout autant. Et ça dégomme, nom d’un p’tit bonhomme ! Pour Frasiak, un chat est un chat. Et un gros con est un gros con, comme celui qui dit « qu’Marine va tout changer / Et qu’quand l’grand jour va arriver / Les blacks, les gris et les pédés / Z’auront intérêt à s’planquer ».
Souvent nous avons vu Frasiak en solo, en duo… Là, sa musique est en costume trois-pièces, en stéréophonique : ça prend de fait une autre dimension encore, ça fait de l’écho, ça tonnerre plus encore quand il orage. Nommons le bien bel équipage : Benoît Dangien au piano, Philippe Gonnand à la basse et au sax, Raphaël Schuler à la batterie et le p’tit nouveau qu’est Paul-Emmanuel Delaunoy à la guitare électrique. Au-delà des mots ils sont un peu pour beaucoup dans le relief des chansons du boss, un peu comme les hauts-fourneaux sont les cathédrales de leur plat pays.
Pas de surprise ici, c’est la réplique de son concert au bercail, dans son chez-lui de Bar-le-Duc, qui vient de sortir en double CD il y a quelques semaines. Un disque très bien, mais le voir en chair et en tatouages, c’est quand même mieux.
J’y étais avec deux amis qui, deux heures avant, ne savaient pas même son nom, pas la moindre de ses chansons. Et deux spectateurs, deux admirateurs de plus dans les amis d’Éric ! Si vous voulez gagner des gens à la chanson (c’est facile avec Frasiak), sabotez leur antenne télé, privez-les de ces victoires qui sont autant de défaites, et emmenez-les avec vous : c’est comme arroser des fleurs, vous les verrez à nouveau éclore. De là à ce qu’ils ensemencent à leur tour le jardin du papa de Frasiak…
Le site de Frasiak, c’est ici ; ce que NosEnchanteurs à dit de lui, c’est là.
Deux de plus. .. mais par un prompt renfort nous fumes plus de deux milles …Merci Michel pour cet article…et Merci Eric .Manquait peut être Normandin ( c’est une boutade!) .C’est difficile d’être en même temps Morlaisien, Canadien, et Normandien .
Génial toujours l’ami Frasiak !