Natasha Bezriche au Féminin pluriel
Rien que l’histoire de cet album est tout un roman, avec ses avancées, ses coups du sort et, comme un conte qui finit bien, l’impatiente et tenace solidarité de nombre de souscripteurs pour qu’enfin cet album naisse. Bien que l’annonce soit depuis quelques temps éventée, je vous donne le résultat de cet accouchement au forceps : c’est une fille !
Ils ont eu raison ces souscripteurs : c’est un album splendide et, sans mal, je fais chorus avec tous les superlatifs glanés à son propos sur ces réseaux sociaux qui, pour une fois, ne disent pas que des sottises. Natasha semble même y faire l’unanimité.
La chanteuse Natasha Bezriche et le pianiste Sébastien Jaudon ont pioché dans le Répertoire des titres qui ne nous parlent que de femmes, quand bien même certains ont été écrits et créés par des messieurs (Jules Jouy, Serge Gainsbourg, Allain Leprest, Léo Ferré, etc) : comment d’ailleurs se refuser aux superbes Sarment et Filles d’ouvriers ? Plus qu’un disque sur les femmes, c’en est un sur la place des femmes de par le monde : la focale est donc toute autre et ça devient passionnant. C’est un survol de celles « qui luttent, qui aiment, qui souffrent ou qui espèrent ; de ces femmes fatales, celles soumises, celles au foyer ou à l’usine, filles, mères, amantes ou militantes. »
Comptez sur les goûts sûrs de Natasha Bezriche : on ne convoque pas Juliette Nourredine, Barbara, Brigitte Fontaine, Michèle Bernard ou Anne Sylvestre pour rien. Derrière chacune de ces dames, comme dans chacun de ces messieurs (ceux déjà cités ainsi que Claude Nougaro, Max Viterbo, Francis Blanche et André Benedetto), de fines et alertes plumes qui ont fait grandir la chanson et la poésie et éveiller les consciences. Comptez aussi – mais vous le savez, je crois – sur le talent d’interprète de Bezriche, attesté depuis belle lurette, ne serait-ce sur ses récentes créations sur Léo Ferré et sur Barbara, par la scène, par le disque.
Bezriche qui d’ailleurs ne donne pas sa part au chien et, par quatre interventions poétiques, résolues et parlées, se joint à celles et ceux qu’elle interprète, donnant un intéressant « contrepoint »
Plus que jamais, ce disque est pour Natasha, pour son remarquable et fidèle complice Sébastien aussi, un engagement total, que les conditions de sortie du CD n’ont pu qu’en renforcer la détermination. Il s’agit, en ces temps difficiles où, malgré de notables avancées, la femme, le corps de la femme, son identité, sont trop souvent bafoués, violentés, où la parité est loin d’être acquise, où des bannières politiques sinistres, aux couleurs du chagrin, ne préfigurent rien de bon en ce domaine, de réaffirmer un nécessaire combat pour l’égalité et le respect. Les mots ont leur poids, les chansons pareillement. Celles-là sont un panel d’émotions, comme un entêtant tourbillon.
C’est une fille ! est un hommage aux femmes, taillé dans la pure sensibilité, dans la beauté. Qui nous dit trop souvent ce qu’il en coûte d’être femme : et c’est bien de le dire, en des textes bien écrits, en une diction audible. Car trop souvent des chanteuses à la mode, trop vite baptisées féministes par les médias, chantent on ne sait quoi en un sabir inaudible. Quand on chante la femme, le combat des femmes, autant le faire en des interprétations audibles, articulées. Tiens, comme la Bezriche qui, encore par cet album, fait un sans faute.
Natasha Bezriche, C’est une fille !, Chant pluriel 2023. Le site de Natasha Bezriche, c’est ici ; ce que NosEnchanteurs a dit d’elle, c’est là. On commande cet album ici.
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