Gérald Genty, en avant Mars !
En 2019, Gérald Genty nous avait enchantés avec son superbe album Là-haut. Un disque léger et mélancolique, pudique et aérien, bien que placé sous le signe de la mort, en filigrane de toutes les chansons.
Quatre ans plus tard, le revoilà avec Marchons sur Mars, dans la parfaite continuité du précédent, avec toutefois un son plus organique, ayant été enregistré dans les conditions du direct (avec Mathieu Boogaerts en guest-star à la batterie). Exit donc les sons synthétiques et les bidouillages auxquels le chanteur nous a habitués. Dix chansons nouvelles mêlant douceur et gravité, nostalgie et humour, cocon et grands espaces. Comme une friandise qui, une fois le sucre disparu, laisserait un goût amer.
Prenons la chanson-titre, par exemple. Une mélodie imparable, des calembours pour le sourire (Marchons sur Mars / Puisque tout fait vriller), un chant acidulé… Mais si l’on dépasse l’écoute distraite, le sérieux du propos se révèle : ce voyage intergalactique évoqué vise à s’échapper d’une planète devenue étouffante à force de confinement. « Vois comme on s’entasse / En réa, alité » « Sortir du sommeil / Du coma des mortels ». Les jeux de mots, aussi plaisants soient-ils, recouvrent un tableau bien moins amusant.
L’album entier est à l’avenant. La grande faucheuse y règne en maîtresse. Parfois frontalement (Encore envie, dédiée à Catherine Grenier, son attachée de presse belge, disparue bien avant l’heure normale). Parfois en sourdine (Cher Nobyl) ou par contraste (Le bain, quand la naissance signifie aussi le début du compte à rebours). Parfois avec une insouciance de façade, qui ne fait que renforcer la douleur (J’y pense).
Quelques morceaux au propos moins grave viennent heureusement ranimer la flamme de la gaieté : S’y mettre un jour évoque le saut à la perche (avec ce but des 6 mètres à atteindre), Sans lac sans Vosgiens est un horrible jeu de mot (ça va, vous l’avez ?) chapeautant une chanson nostalgique, Tralalaponie une joyeuse comptine pour enfants…
L’album se clôt avec Vider les lieux, sensible évocation d’un déménagement, de la cruauté de l’arrachement que cela implique et des souvenirs douloureux que cela fait naître. Une chanson qui s’achève sur l’image d’une balançoire dans le jardin. Comme dans Planeur, la chanson-phare de l’album précédent, dont Gérald Genty reprend ici quelques vers au final, reliant définitivement les deux opus.
Les fans de la première heure de Gérald Genty doivent se faire à l’idée que le chanteur rigolo, brillant disciple de Boby Lapointe, cède doucement la place à un autre artiste, au talent d’écriture intact mais davantage porté sur la noirceur et l’émotion. Oserait-on dire que l’on gagne au change ?
Gérald Genty, Marchons sur Mars, 30 février/PIAS, 2023. Le site de Gérald Genty, c’est ici ; ce que NosEnchanteurs a déjà dit de lui, c’est là
Gérald Genty est en concert en Belgique en Trio à La Verrerie à Braine le Comte le vendredi 10 novembre 2023 et le 11 à Fallais chez Calo.
Le reportage photographique de Vincent Capraro à La Maroquinerie à Paris en 2019, c’est ici.
Merci pour ce bien bel article…
A noter que Gérald sera de retour à Paris, pour la sixième Carte Blanche, à la Dame de Canton, le 12 Avril 2024.
La Carte Blanche à Gérald Genty est un événement annuel où Gérald peut disposer d’une soirée pour inviter des amis ou jouer dans une configuration inédite, en faisant chaque année une soirée unique.
Mathieu Boogaerts a humblement joué de la batterie sur deux de ces soirées, qui ont vu aussi passer Ben Ricour, Fred Radix, Vincent Baguian, Benoit Doremus ou encore Guillaume Farley (entre autres)
http://www.damedecanton.com/event/geraldgenty/