Les délices d’Adélys
Le mois dernier, vous avez pu lire sous la plume de ma chère consœur Catherine Laugier un alléchant compte-rendu du spectacle en Avignon d’Adélys, jeune chanteuse normande et bourlingueuse cosmopolite. Un tour de chant mêlant stand-up, danse et chansons, que l’on espère avoir l’occasion d’applaudir au plus vite.
Pour patienter, on se rabattra avec le sourire sur son album intitulé Toutes les fenêtres et les ruisseaux, disponible depuis le 1er septembre. La pochette nous la montre dans sa tenue scénique, un superbe ciré jaune, s’encadrant dans le carré de ciel que dessine un ensemble d’immeubles. Pas de ruisseaux en vue, mais des fenêtres, plein !
Cet album, nous révèle le livret, a été écrit et composé entre la Normandie, la Belgique, le Canada et la Laponie. On en trouve effectivement des traces. D’abord dans la chanson d’ouverture, Bruxelles les voiles, qui permet à Adélys d’adhérer au club des artistes amoureux de la capitale belge (de Brel à Dick Annegarn, en passant par Bénabar, Angèle, Michel Delpech ou Boulevard des Airs, ils sont nombreux à être tombés sous le charme…). Une chanson légère et acidulée, à la gloire de la ville, de la liberté et du vélo. Puis on traverse l’Atlantique et c’est Ottawa Chambre 703, lieu de naissance – on le suppose – d’un bel hommage à ces travailleuses de l’ombre que sont les anonymes femmes de chambre. Pour le dépaysement, on se laissera plutôt tenter par Torneträsk, dont Wikipedia nous apprend qu’il s’agit d’un lac situé dans la commune de Kiruna en Laponie, au nord de la Suède. Peut-être retiendra-t-on dorénavant que c’est aussi le titre d’un morceau d’Adélys, par lequel elle exprime l’osmose avec la nature qu’elle a ressentie là-bas.
Pas nécessaire toutefois à l’artiste d’entreprendre des longs voyages pour trouver l’inspiration. C’est au fond d’elle-même que devaient se nicher les non-dits révélés dans Les tiroirs, sa lassitude de l’apparence de Ton corps, le portrait auto-défensif de L’araignée ou la plénitude retrouvée de Calme comme un arbre. Intimisme qui atteint son paroxysme avec La montée des eaux, qui aborde de front la montée du désir féminin jusqu’au bouquet final.
Au total, douze morceaux d’électro-pop à la production discrète, mais jamais pauvre. On pense à Clio, à la Suzane des débuts, quand l’économie de moyens a pour effet bénéfique de décupler la créativité. Des chansons mêlant ouverture au monde et intimité de l’auteur, amour de la nature et envie vitale, peur de l’avenir et espoir de s’en sortir. L’album d’une jeune femme d’aujourd’hui, entre cri du cœur et cri de rage.
Adélys, Toutes les fenêtres et les ruisseaux, La Voix d’Aile / Absilone / Baco Music 2023. Le site d’Adélys, c’est ci ; ce que NosEnchanteurs a déjà dit d’elle, c’est là.
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