Namur 2023. Adé dans les rails, Emilie Simon en hors-pistes
Les Solidarités, Namur, 27 août 2023,
Dernier jour déjà du plus solidaire des festivals de Belgique. La pluie annoncée et redoutée ne semble guère encline à montrer son nez, le public est venu en grand nombre mais ça circule quand même sans trop de difficultés, les bières sont fraîches et les frites salées à point, que demander de plus ? Des concerts inoubliables, peut-être ?
Je mettais beaucoup d’espoir dans la jeune Adé (photos ci-contre), au vu de son remarquable (et remarqué !) premier album solo paru à l’automne dernier Et alors ? Un disque de pop pétillante et fraîche, qui a la singularité d’arpenter les plaines de la country-music, peu fréquentées de ce côté de l’Atlantique. Sûr, sa transposition scénique allait nous faire voyager là-bas et nous offrir un bien agréable dépaysement. La déception fut donc à la hauteur de l’attente. Pas que le concert était mauvais, loin de là : l’ensemble se laissait écouter sans déplaisir et la chanteuse savait y faire, même si sa voix n’était pas toujours au top. Mais quelle idée que d’avoir abandonné tout ce qui fait le charme de l’opus pour l’échanger contre des arrangements de pop-rock passe-partout ! Exit les mandolines, banjos et autres dobros qui sortaient l’artiste de l’ornière de la pop coutumière, bonjour les guitares et la batterie entendues mille fois. Seul la guitare-slide et l’harmonica sont venus, en de rares moments, ramener une touche country à la prestation. Un choix artistique qu’on ne peut s’empêcher de regretter.
Heureusement, question originalité et sortie des sentiers battus, l’artiste suivante a assuré haut la main. Chance pour nous, les Solidarités ont en effet eu l’excellent idée de programmer Emilie Simon (photo ci-contre), bien rare sur les scènes belges.
Nous avions découvert la native de Montpellier en 2003, avec son premier album éponyme, familièrement baptisé « le disque aux coccinelles », because sa pochette montrant la chanteuse le dos nu recouvert de bêtes à bon dieu. Vingt ans plus tard, Emilie Simon a entendu rebattre les cartes et a totalement réenregistré ce disque fondateur (mêmes chansons dans le même ordre), mais avec des arrangements électro d’aujourd’hui. C’est donc ce nouvel et vieil album à la fois, intitulé ES, qu’elle est venue défendre ce dimanche.
Trois arches lumineuses délimitent un espace circulaire, telle une boule à neige, abritant les machines de l’artiste. La voici qui apparaît, seule en scène, dans une tenue brillante estampillée ES, perchée sur des bottes aux talons interminables. A la main, une guitare triangulaire, à son bras une télécommande qui lui permet de gérer ses engins de guerre musicale. Et c’est parti pour une heure de chansons électro, en français ou en anglais, que la chanteuse nous susurre d’une voix aux intonations enfantines, à mi-chemin entre Emily Loizeau et Vanessa Paradis. Des morceaux à la poésie cosmique, où la nature et l’univers occupent une place prépondérante, où la mort semble rôder en permanence. De l’électro pas joyeux, pas forcément dansant, parfois oppressant, qui aurait encore gagné à être programmé à la nuit tombée et non en pleine journée. Un univers unique, dont Emilie Simon, peu expansive mais souriante et attentionnée, semble être la grande prêtresse. Subjugué, le public lui a réservé un accueil chaleureux, n’en déplaise à ceux qui prétendent que les festivaliers n’aimeraient que la musique joyeuse et entraînante. La tristesse est parfois aussi un plaisir…
Le site d’Adé, c’est ici ; ce que NosEnchanteurs en a déjà dit, c’est là.
Le site d’Emilie Simon, c’est ici ; ce que NosEnchanteurs en a déjà dit, c’est là.
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