Barjac 2023. Lou Casa : Brel et Barbara, drôle de trame
Sauvé dans Anne-Marie Panigada, En scène, Festivals, Non classé
Tags: Barbara, Barjac 2023, Jacques Brel, Lou Casa, Nouvelles
30 juillet 2023, festival Barjac m’en chante,
S’il en est un qui, en terme de sympathie, de simplicité aussi, a fait rare unanimité (et pas qu’au sein de l’équipe de NosEnchanteurs) lors de ce Barjac 2023, c’est bien Marc Casa, ce géant blond (il dépasse les deux mètres) omniprésent parmi les festivaliers, le boss du trio Lou Casa. A ce titre, il marquera durablement les mémoires.
C’est cependant plus contrasté en ce qui concerne sa prestation sur la grande scène dans l’insolite rôle d’un passeur, d’un tisseur de liens entre nous et deux légendes de la chanson. Entre Barbara et Jacques Brel, dans un récital fait de titres empruntés tant à l’une qu’à l’autre.
Ça débute par un extrait d’interview des deux, réunis sur le plateau du tournage de Frantz, premier film de Brel tourné en 1972. Le décor est ainsi posé. Et bien posé.
Le gigantesque dos de Casa se courbe au vent qu’il souffle, qu’il suggère, qui grandit. De ce souffle renaissent des chansons, certaine évidentes, d’autres sinon oubliées au moins plus confidentielles. C’est Barbara qui lance la conversation… « Tous les passants s’en sont allés / Plus rapides que la mémoire / Écrire un petit bout d’histoire / Les uns debout, d’autres couchés ». Et Brel qui lui répond en suivant un enterrement : « Dire qu’il est mort, Fernand… »
Marc Casa fait drôle de trame, tissant, croisant les vers de l’un avec ceux de l’autre, les arrimant comme un dialogue à distance. Et, croyez-moi, ça fait du bien de réentendre, sur cette scène d’importance, des titres fameux comme Vesoul, Les Vieux amants, Perlimpinpin, Il faut savoir, Jaurès, Sur la place, Au suivant, Le Bel âge, La Solitude, Mon enfance…Et cet évident Gauguin, lettre de Barbara à son ami Jacques : « Bonjour monsieur Gauguin / Faites-moi place / Je suis un voyageur lointain / J’arrive des brumes du Nord / Et je viens dormir au soleil / Faites-moi place… » Chacun des deux à ses deuils, ses absences qui durent, ses douleurs. Lui c’est avec Jojo, elle c’est par La Petite cantate…
Que les collègues musiciens de Marc Casa (Julien Aellion et Stéphane Gasquet), au demeurant méritants, ne m’en veuillent pas, mais Lou Casa c’est lui, ce grand corps, cet échalas jamais las, qui brasse tant les mots que l’espace, et frappe, dérisoire, son petit tambour pour plus encore rythmer son émotion. Qui toujours tente sa démonstration, cette rencontre au sommet sur cette scène, convoquant l’absence pour la rendre plus encore présente, faisant facilement du public son complice. Convoquant même les larmes quand Barbara/Casa convoque son enfance : « Il ne faut jamais revenir aux temps cachés des souvenirs, du temps béni de son enfance / Car parmi tous les souvenirs, ceux de l’enfance sont les pires, ceux de l’enfance nous déchirent… »
C’est beau, évidemment, fatalement beau. Alors pourquoi, pour être franc, ce public fut-il tout de même partagé ? L’interprétation et les partis-pris d’arrangements, les inter-chansons faites d’une sorte de dialogue avec le public n’ont-ils pas convaincu ? Faut dire que Brel et Barbara sont deux îlots quasi imprenables de la chanson : en aborder les rives soulève parfois de tendres mais passionnés remous. Public enthousiaste pour partie, sceptique pour le reste mais, et c’est l’essentiel, loin d’être indifférent à cette offre, ce don.
Le site de Lou Casa, c’est ici ; ce que NosEnchanteurs a déjà dit d’eux, c’est là.
Petit addendum à ton bel article Cher Michel. Des couleurs d’arrangements tout à fait inattendues et peut être clivantes sur ce répertoire. Difficile de toucher aux monstres sacrés. Mais si bon de redécouvrir leurs chansons. Bravo à Julie de donner la voix aux interprètes.
Il m’a touché, coulé ! Par sa grandeur, ses interprétations et ce répertoire que j’affectionne particulièrement… géant gentil… et attentionné pour tous les bénévoles du festival… la grande classe ! Merci Marc Casa !
Au plaisir de te recroiser sur les routes musicales…
Bel Article Michel Kemper !