Barjac 2023. Batlik : est-ce encore chanter que d’être inaudible ?
Sauvé dans Anne-Marie Panigada, En scène, Festivals
Tags: Barjac 2023, Batlik, Nouvelles
1er août 2023, festival Barjac m’en chante,
Ça fait vingt ans qu’il est apparu dans notre horizon chanson, en un art atypique, à la marge, avec cette voix si particulière, scandée. Et des chansons si bavardes qui questionnent et se questionnent elles-même.
L’annonce il y a quelques mois de son retrait de la chanson nous avait interpellé. Lui n’a pas attendu pas le couperet du 49.3 pour envisager sa proche retraite.
C’est dire si savoir Batlik sur la scène de Barjac pouvait titiller notre envie, l’attiser. Envie d’encore le revoir, en quelque sorte lui faire nos adieux…
Je ne vous parlerai hélas pas de ses chansons : le disque ne sortant que le mois prochain, je n’ai pu en apprendre les paroles par cœur. Ce festival, longtemps nommé (et à ce titre renommé) Chansons de paroles, s’est privé hier de celles de Batlik, volontairement inaudibles. Ce n’était pas faute à la sonorisation ni aux techniciens du son, même s’ils n’ont pas tout le temps rendu justice aux instruments (pas plus que Batlik à ses musiciens et collaborateur). C’est un choix artistique, c’est celui de Batlik. Celui d’écrire des textes puis de les rendre invisibles. C’est ranger sa voix au rang du son, nier l’art dans lequel il s’inscrit pour en faire une simple élément du chant.
Outre la première chanson en créole (c’est osé !), deux seuls éléments nous restent de ce concert : le titre en rappel, tiré de son lointain passé. Là, les paroles étaient distinctes, audibles. Et cette (longue) anecdote sur son premier passage en cet endroit, narrée par le menu, d’un ton désinvolte, sur le registre « mes désopilantes et navrantes mésaventures à Barjac, avec la douche, mon chien, un vigile et Trintignant ». Ôté du contexte, ce grand moment de music-hall n’a aucun intérêt. Ça fait peu.
Batlik nous a volé ce pourquoi nous sommes venus : notre inextinguible soif de paroles, ce souci d’entendre les siennes.
Ça ne semble pas avoir chagriné ses fans présents hier. Je crois avoir écrit ici que ce je pense des fans, quels que soient les artistes qu’ils défendent. Ils ne comptent pour rien à mes yeux. Sans nullement être de ces « intégristes » souvent fustigés, seuls m’intéressent ici les amateurs de chansons qui, sans privilégier à outrance les textes (façon Ruiz ou Bertin, quasi obsolètes), attendent de simplement pouvoir comprendre ce qu’on leur chante. Ou par défaut d’être entraînés dans l’art, la folie, les rêves, les voyages du chanteur, même sans tout comprendre, même à leur corps défendant, comme le ferait un Arthur H. Hier, la force d’attraction de Batlik n’a pas opéré ou si peu, nous laissant Gros-Jean comme devant, bredouilles devant ce volapük que nous n’avons pu percer.
Le site de Batlik, c’est ici ; ce que NosEnchanteurs a déjà dit de lui, c’est là.
En concert ce soir 2 août à Conques, le 3 à Narbonne, le 22 septembre à Nice… Autres dates de cette dernière tournée sur le site de Batlik.
Batlik à Avignon en 2018 avait pris soin de distribuer ses textes dans son spectacle sur Cioran. Ça aidait bien, même s’ils sont toujours assez hermétiques. Un parti pris. Je citais dans l’article une phrase d’une chanson qui résumerait peut-être son art : « ça ne se voit peut être pas mais ça se perçoit. »
????? C’ est son choix ! pourquoi ?