Marie-Josée Neuville, 1938-2023
Elle fut « la collégienne de la chanson », surnom qui lui fut donné à l’âge de seize ans, à la sortie de son premier 45 tours (sur lequel figurent Johnny Boy et Une guitare, une vie) qui la rendit populaire du jour au lendemain, tant que sa tenue vestimentaire et ses nattes de fillette (qu’elle devait obligatoirement garder, c’était spécifié sur son contrat avec sa maison de disque) firent école. Quatre ans auparavant, elle avait triomphé devant huit cents autres concurrents à la Kermesse aux étoiles, un concours d’amateurs.
Un autre concours gagné la fit se produire en supplément de programme en mars 1956 à L’Olympia. Quatre chansons seulement dont une qui a le goût du scandale, Le Monsieur du métro, tant que tous les journaux en parleront, qu’elle fera la une de Paris-Match : un monsieur aux mains baladeuses et la stratégie de la demoiselle pour s’en sortir… Cette chanson fut interdite de radiodiffusion ainsi qu’une autre, Nativité, tant il est vrai qu’on ne peut tenter d’expliquer ce grand mystère de la naissance, surtout dans les années cinquante.
Josée Deneuville, dite Marie-Josée Neuville fut, huit années durant, d’abord un phénomène puis une vedette de la chanson. Le yéyé n’avait pas encore saturé l’espace public et les mange-disques n’existaient pas encore ; la révolte du mois de mai était encore loin dans le temps, douze ans plus tard. Qu’à sa manière, Neuville préfigurait par des vers insolites, inhabituels, surprenants aux oreilles de certains. Car derrière ses p’tites chansons sages parmi lesquelles on peut trouver une lointaine parenté avec Brassens s’insinuaient déjà des propos incongrus voire choquants pour l’époque gaullienne.
Marie-Josée se tournera par la suite vers la radio, où elle débutera par un feuilleton radiophonique, Cécilia, médecin de campagne, sur Europe1. Puis la télévision (on la verra dans l’émission Les Animaux du monde) comme animatrice, et comédienne dans de nombreux téléfilms ou feuilletons, tels La voie Jackson, de son mari Gérard Herzog, avec entre autres Guy Marchand et Sami Frey.
Elle retentera la chanson en 1980, sans succès ; les chansons qu’elle enregistre alors ne sont pas publiées, mais seront reprises dans l’album Couleur sépia en 1998 avec quatre nouvelles.
S’il est un artiste des années cinquante qu’on peut sans mal poser encore sur sa platine, c’est bien Marie-Josée Neuville, tant ses chansons légères, drôles, curieuses et insolentes, progressistes, d’une toute autre mentalité que celle en vigueur, parfois à plusieurs lectures possibles, s’écoutent sans mal : le temps n’y a guère de prise. Il y a peu, EPM a sorti une double compilation, Sur deux nattes (photo ci-contre) : de quoi la retrouver, le cas échéant vous la faire découvrir.
Marie-Josée Neuville est décédée le 1er juillet 2023.
« Les Petites pestes » 1956 :
» J’aurais aimé être un garçon » INA 1957
« Nativité » 1957 :
Très coquine, et renversant les conventions de l’époque. Mais le public aimait ce contraste entre petite fille (faussement) sage et ses chansons, et quand elle s’est habillée en femme, ils n’en ont pas voulu comme chanteuse.
Alors elle est devenue animatrice radio et télé et une belle comédienne de teléfilms et feuilletons à succès, notamment sur l’alpinisme, car elle était mariée à Gérard Herzog, alpiniste comme son frère Maurice, cinéaste, réalisateur de Télé en fictions et en politique. Tout « La voie Jackson »(1981), adapté de son roman, est sur YouTube, avec Marie-Josée Neuville dans le rôle féminin principal. J’ai rajouté un lien sur un extrait de ce film dans l’article de Michel Kemper. Ici la première partie, merci Yves Le Corre
https://www.youtube.com/watch?v=a2Jy2wHnk4E
Je ne connais que « Johnny Boy »… et impossible de me rappeler d’où je connais cette chanson… Mais je suis ravie de découvrir le reste du répertoire ! Merci Michel !
Damned… Je n’avais jamais entendu ce nom… Je crois que je vais regarder de plus près le catalogue d’EPM…
Je n’ai pas su… elle fut ma toute première entrée au royaume de la chanson. Je peux encore chanter de mémoire les 4 chansons de ce 45 tours à la pochette jaune. Sans elle, je n’aurais peut-être pas rencontré Brassens, Anne Sylvestre et toute la famille. J’espère qu’on l’accueille là-haut parmi les grands… Merci Madame.
On peut ajouter qu’elle a été la deuxième ACI francophone, juste après Nicole Louvier et juste avant Anne Sylvestre …
Une gamine de quinze ans qui chantait dans les années 50 :
« On voudrait, on peut pas
Faire son pipi partout comme le chien de Grand-mère… »
C’était assez audacieux. Non ?
Une voix claire qui a rempli ma jeunesse….et ce grâce à ma mère qui l’écoutait étant jeune…
Et je suis très heureux que ma fille me réclame avant de s’endormir « Johny Boy » ou « Mon gentil camarade » ou bien encore « par derrière ou par devant »!
J’ai appris sa disparition en regardant les victoires de la musique !
Je tiens à lui rendre hommage, ses chansons ont bercé mon adolescence, quel talent d’autrice, j’ai acquis le double CD best of.
Chapeau Madame.