Off Avignon 2023, Alissa Wenz, entre elle et nous
« Je, tu, elle », c’est une écriture au féminin, mais qui parle aussi des hommes. Universelle, intemporelle, comme Alissa Wenz, petite silhouette en noir qui peut évoquer les chanteuses des Cabarets Rive Gauche – d’ailleurs elle se produit souvent dans des lieux parisiens qui en sont les dignes héritiers. Elle a quelque chose de Piaf, de Gréco, de Barbara ou d’Anne Sylvestre, mais surtout… d’Alissa. Une femme en toute liberté, chevelure lâchée, crinière qui ne doit rien aux coiffures communes aux influenceuses, petite robe noire, chaussures de danseuse de flamenco, hors mode.
Ne croyez pas pourtant qu’elle ne soit pas de notre siècle. Rien de ce qui touche à la conscientisation des relations homme-femme, des relations entre individus, plus largement, ne lui échappe. Féministe, et parfaitement femme, dans la lignée d’une Anne Sylvestre. Passionnée, drôle, avec ce qu’il faut de distance par rapport à tout ce qu’on veut nous imposer comme modèles, où la dame dans la boîte (vous savez, celle à qui l’on parle comme si elle pouvait nous répondre), en même temps sketch humoristique, petit chef-d’œuvre scénarisé par le jeu génial de la pianiste, rejoint les femmes de la publicité, pour dire non à tous les injonctions, aux convenances, aux modèles de jeune filles douces et dociles et de femmes parfaites. « Mais j’aime le vent, et l’océan, et le feu, et les adieux… »
La mise en scène est sobre, tandis que Nathalie Fortin martèle ou caresse son piano, Alissa est debout au micro. Elle nous parle en confidence, cite Pierre Reverdy « On ne peut plus dormir tranquille quand on a une fois ouvert les yeux », fredonne l’air de Blanche-Neige a cappella (A-t-elle donne son accord pour recevoir le baiser du Prince?), échange avec Miss France, fait même un petit quatre-mains au piano avec Nathalie. Alterne douceur et énergie, nostalgie et humour. Se réfugie enroulée comme en position fœtale sur un haut tabouret pour cauchemarder sur ses Insomnie(s) : « Quand je n’dors pas je vague et je vogue et j’espoir ». Dans la chaleur accablante d’Avignon, c’est un vent de fraîcheur et de tendresse que son Viens (écouter la pluie) : « Oh viens / on dit que les gens / Qu’on aime vraiment / Ne meurent jamais » comme en écho à la Météo bretonne de ses sentiments « Mal aux absents de la table / Mal aux méchants, mal aux cons ».
Ses chansons sont des films, où la maîtresse s’adresse à Madame, la femme de son amant, comme une complice dans le grand manège de la vie. Mais c’est peut-être ce Brin de paille que le marin illettré glissait dans l’enveloppe pour dire à sa femme qu’il était en vie et l’aimait, qui nous émeut le plus. Ce n’est pas un hasard si Alissa Wenz est aussi écrivaine, autrice de romans reconnue. On se quittera sur l’humour de 20 recettes faciles pour faire fuir l’homme idéal, qui rend justice à ses talents de comédienne et d’humoriste.
Plus qu’une séance à Avignon pour vibrer, s’émouvoir, penser, rire avec Alissa Wenz, « Je, tu, elle » (spectacle Contrepied productions) le samedi 15 juillet à 13h10 à l’Arrache-Cœur salle Boris Vian, 13-15, rue du 58° régiment d’infanterie (tel:+33 9 85 09 97 42)
Alissa Wenz est programmée le samedi 7 octobre 2023 à la MJC Allain-Leprest à Venelles (13)
Le site d’Alissa Wenz, c’est ici ; ce que NosEnchanteurs a déjà dit d’elle, c’est là.
« Météo bretonne », clip
« La dame dans la boîte », audio
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