Blankass, le bonheur possiblement

Blankass (photo Robin)

Souvenez-vous, c’était déjà en 1996. Nous découvrions sur les ondes deux titres enchanteurs, La Couleur des blés et Danse avec les vieux. Leurs auteurs ? Deux frangins, Guillaume Ledoux au texte et au chant, Johan Ledoux à la composition. Avec d’autres comparses, ils formaient le groupe Blankass. Coup d’essai couronné de succès, ce premier disque sera suivi en 1999 de l’album L’ère de rien, dont on retiendra la chanson homonyme et la survoltée Pas des chiens. Tournée, Victoire de la Musique, les portes de la gloire s’ouvraient en grand pour ce groupe de rock pas comme les autres… Et puis, allez savoir pourquoi, ça s’est calmé et Blankass, sans avoir jamais jeté l’éponge ni démérité, a quitté les feux médiatiques. Avouons donc, non pas avoir perdu la bande de vue, mais avoir quelque peu négligé de suivre sa carrière avec l’attention qu’elle méritait. Le plaisir de retrouver aujourd’hui ces vieux potes et les sensations d’antan n’en est que plus grand.

Sorti le 21 avril, ce nouvel opus de Blankass lui permettra-t-il de retrouver les faveurs des médias et de conquérir une nouvelle audience ? Croisons les doigts et constatons que ce ne serait que justice, tant l’album est une belle réussite dans le genre pop-rock. Onze titres où l’on retrouve intact le talent musical du groupe, champion des hymnes à reprendre en chœur. En mode électro doux, Je sais que tu sais, premier single du disque, est à cet égard exemplaire, avec ce refrain imparable et cette mélodie dansante irrésistible. Un peu lisse peut-être, mais totalement addictif. On imagine sans peine le feu qu’ils mettront sur scène avec un tel morceau.

Particularité : ce septième album studio est placé sous le signe de l’amitié. Pas moins de trois duos y figurent en effet. Vianney est le premier à mêler sa voix si caractéristique à celle – non moins reconnaissable – de Guillaume, pour nous conter les retrouvailles de deux frères séparés depuis trop longtemps (Manqué). Vient ensuite Gauvain Sers, pour la chanson donnant son titre à l’album (Si possible heureux), éloge plein d’espoir de la vieillesse, à contre-courant du jeunisme ambiant. Enfin, c’est le maître Stephan Eicher qui s’en vient chanter Un million, ballade ample et majestueuse, qui ne déparerait pas dans le répertoire de notre helvète adoré.

Que ces duos ne soient toutefois pas l’arbre masquant la forêt ! L’album contient encore de nombreuses pépites, comme Comment sèchent les fleurs aux cordes chatoyantes et au texte joliment tourné sur un sujet grave (le suicide), ou Cet incident, à l’accent reggae ensoleillé, sur le coup d’éponge à donner pour oublier les querelles et repartir d’un bon pied, ou encore le primesautier Changer d’époque. Autant de morceaux rythmés contrebalancés par le délicat Enfants abordant les victimes innocentes de la guerre ou le sensible Du papier, des crayons, hommage à leur ami Tignous tombé sous les balles à Charlie-Hebdo.

Si possible heureux est donc, pour les anciens, la meilleure occasion qui soit de renouer avec Blankass et, pour les nouveaux venus, de découvrir un groupe aguerri et sincère, qui trace sa voie avec savoir-faire et talent. Comme dans leur chanson, les frérots Ledoux nous avaient bien manqué.

Blankass, Si possible heureux, AT(h)OME, 2023. Le site de Blankass, c’est ici ; ce que NosEnchanteurs avons dit du groupe, c’est là.

« Je sais que tu sais » :