Mouhet 2023. Mathieu Barbances : à l’eau à l’eau !
Sauvé dans En scène, Festivals, Pour les mômes
Tags: Mathieu Barbances, Nouvelles
Avec un petit temps de retard, retour sur le formidable festival de Mouhet, avec d’abord ce spectacle scolaire « Né quelque part » que quelques festivaliers ont tout de même pu apprécier, tant il est vrai qu’il est indispensable… C’était le 26 mai 2023 à la salle Joséphine-Baker de Bélâbre, dans l’Indre, dans le cadre du 11e Festiv’en Marche.
« Moi, c’est Tarek, et je suis né en Syrie… »
L’histoire est hélas banale, coutumière. Un truc dont les actus se sont lassées de nous raconter, d’autant qu’il indispose, je crois, Marine L.P., Éric Z., Gérard D. et leurs crétins d’électeurs.
Un pays en guerre, des gens qui fuient pour sauver leur peau et s’autoriser un avenir, rêver qu’ils puissent encore vivre demain. « Nous allons devoir partir pour l’Europe, là au moins il n’y a pas la guerre. Nous allons faire un voyage interdit. »
La chanson est de bon sens : « Je suis né quelque part / Laissez-moi ce repère / Ou je perds la mémoire… ». C’est avec la même que Mathieu Barbances termine son récit de voyage, une heure après. Le grand et dangereux périple de Tarek et de sa famille. Et de celle de son copain Ahmed. Des grains de poussière dans la nuit, qui affrontent le gros grain de la Méditerranée. Le décor est grand écran, aussi bleu que l’océan, sur lequel Mathieu pose au fur et à mesure du récit, du carnet de bord, des pays, ceux que Tarek traverse : Turquie, Macédoine, Serbie, Hongrie, Allemagne, Italie, France… Les pays forment continent, longue marche, longue fuite : Marek est clandestin. Tout ce qui porte uniforme s’acharne contre lui et les siens.
Maxime Le Forestier, Romain Didier, HK, Tiken Jah Fakoly et Sting mêlent leur art à celui de Barbances : en chaque fois trois ou quatre minutes, cette chanson-là nous dit le courage et la nécessité, cette lutte de chaque instant, ne serait-ce que celle de trouver de quoi se nourrir, un peu. De boire, de dormir, se laver… ce qu’on autorise même aux animaux, mais pas souvent à eux.
Le spectacle de Barbances est grande douceur, empathie et complicité : c’est un délit d’entraide, un merveilleux conte qui n’en est pas un. Comment expliquer à ce public d’enfants qui est là, devant soi, en des mots simples, évidents, ce voyage pour la survie ? Il vous faut voir ce spectacle pour le savoir, pour avoir envie d’à votre tour le programmer. C’est un spectacle d’utilité, de nécessité publique, un enseignement qui devrait être obligatoire, ne serait-ce que pour faire la nique à ces cons, de plus en plus nombreux, de plus en plus haineux, qui professent le rejet, le repli sur eux.
Comment, à leur retour de l’école, les enfants ont-ils raconté ce spectacle à leurs parents, quelle fut la réaction de ceux-ci ? D’autant plus qu’un CADA (centre d’accueil pour demandeurs d’asile) devrait s’implanter dans cette commune dès l’an prochain. Certains parents ont-ils depuis lors protesté, manifesté, pétitionné, tenté de brûler l’école ? L’histoire ne le dit pas. Pas encore. Ce qu’on sait, c’est le débat, ce sont les questions, les interventions après le spectacle, entre les enfants et l’artiste. Des mots simples, de bon sens. Et plein de gosses qui, eux-mêmes, sont originaires d’ici et de là, des enfants nés quelque part. Qui par ailleurs n’ont pas choisi leurs parents, leur famille… Et peuvent et doivent se poser la question : « Est-ce que les gens naissent / Égaux en droits / À l’endroit où ils naissent ? / Est-ce que les gens naissent pareils ou pas ? »
Le site de Mathieu Barbances, c’est ici ; ce que NosEnchanteurs a déjà dit de lui, c’est là. Prochains concerts les 13 et 19 juin à Corbeille-Essonnes (Représentations scolaires)
Commentaires récents