Hélène Grandsire, en quête de chimère

Hélène Grandsire (copie d’écran)

« Je chante au silence des nuits / D’autres chansons de contrebande / Se peut-il que tu les entendes / Au jour l’on nous fait tant de bruits / Tant de misèr’s et tant d’ennuis / Je chante au silence des nuits… »

Lui écrit, elle chante. Nos lecteurs connaissent Hélène Grandsire dont nous avons déjà dit les mérites. Mérites à partager moitié-moitié avec Jimmy, son parolier de mari. Voici leur nouvelle et gourmande livraison : seize titres qui passent en revue nos vies – parfois des restes de vie –, celles qu’on vit, celles qu’on espère sans plus d’espoir que ça, sauf à partir, ou plutôt fuir, en Chimérique. – Maman, c’est où la Chimérique ? – Tais-toi et rame !

Le titre du disque vient d’une des chansons qu’il recèle : On est partis en trois secondes. « Déjà la veill’ quand il a dit / On a l’ résultat du scrutin / On est restés abasourdis / Leur objectif était atteint / On a pris notre mappemonde / Et on a posé notre doigt / Là où la mer est si profonde / Que même les chansons s’y noient ». Que ce soit la réélection de Macron où – autre catastrophe – le climat qui, à trop chauffer, jette un froid, il y a de quoi vouloir « Vivre en chimérique / Ce pays on le trouvera / Sinon ce sera en musique / En poétique, en romantique / En utopique ou fantastique / C’est là, c’est là, là qu’on se retrouvera ». La pochette du disque illustre cette destination, hélas par une photo plus sombre et moins jolie que le propos.

Qu’elle imagine Rimbaud à travers elle, tente de deviner celui ou celle dont il ne reste plus que tas de cendres au fond de l’urne funéraire, apprenne par corps et par cœur son bien-aimé (on écoute en se disant que, hé hé, c’est lui qui justement écrit les paroles…), visite Le Musée de l’indifférence (comme on l’imagine bien achalandé…), nous raconte un SDF, se détend à contempler la mer, Hélène Grandsire explore de sa voix belle, grave mais modulée, autant de pistes qu’il y en a sur l’album. Beau catalogue bâti dans le sensible, le délicat.

C’est encore et toujours, marque de fabrique autant qu’économie, un piano-voix (son huitième en douze ans), rendez-vous précieux à terme échu où, bien qu’on sache d’avance la qualité de l’ouvrage, où on est toujours étonné, à la livraison, de la précision tant de l’écriture que de l’interprétation : sans faille, sans faute.

La Guerre est là, passée et présente. Sans jamais nommer le monstre du Kremlin, son ombre maléfique survole cette chanson : « Je tue, je viol’, je brûl’, je casse / J’ai des menac’s plein ma besace / Je te préviens si tu répliques / Je déclench’ la bombe atomique ». Mais il n’y a pas que Poutine et, dans Le Chaudron de Jupiter : « Ils mélang’nt à tour de bras / Cette potion millénaire / Qui jamais ne changera ». De là, plus que jamais, vouloir partir en Chimérique…

Un conseil, sur le parcours, de ce long voyage en quête d’un meilleur, d’un plus juste, d’un humain, mettez dans votre lecteur CD ce disque de Grandsire et les précédents. Elle vous donnera le la et la clef de toute la gamme.

Hélène Grandsire, Partir en Chimérique, CD + recueil des paroles, autoproduit 2023. Le site d’Hélène Grandsire, c’est ici ; ce que NosEnchanteurs a déjà dit d’elle, c’est là.

 On commande ce disque ici.

« On est partis en trois secondes » :