Thiéfaine, vieille branche toujours branchée

Hubert-Félix Thiéfaine (photos Vincent Capraro)

par Jean-Michel Gaudron, 

14 avril 2023, Zénith Paris/La Villette,

Il avait tout débranché l’année dernière, dans sa tournée « Unplugged ». Tellement fort qu’il en avait même perdu ses cordes vocales, usées jusqu’à l’extrême. Au point de devoir arrêter les dégâts avant la fin, privant ses inconditionnels des derniers concerts de son programme, notamment celui du 22 novembre au Casino de Paris, censé refermer le livre.

Le temps de recharger ses accus et voilà Hubert-Félix Thiéfaine reparti de plus belle sur les routes, entre hiver et printemps, pour une tournée « Replugged » dans les grandes salles, achevée en beauté le 14 avril dernier au Zénith de la Porte de la Villette.

Le tout avec une setlist 100% renouvelée par rapport à l’année dernière et un Sofiene Yahiaoui bondissant à la guitare, rendant le jeu de Lucas Thiéfaine plus sobre, mais toujours aussi «habité» par les esprits de la musique. Et toujours aussi brillant dans les arrangements.

À bientôt 75 ans, Hubert n’a peut-être plus la pêche de ses tournées précédentes. Il reste bien sagement à proximité de son micro sur pied, avec tout de même une jolie entourloupe en ouverture, sur Droïde Song, chantée dans un coin de la scène, invisible, et seulement révélé par les spotlights sur le dernier couplet: « Le jour où les terriens reprendront figure humaine, j’enlèverai ma cagoule pour rentrer dans l’arène ».

L’arène, HFT n’a pas hésité à y replonger treize fois pour cette tournée « électrique », offrant plus de deux heures de survol de son répertoire, allant parfois rechercher très loin dans ses cartons quelques vieilleries remises au goût du jour.

De la fille un peu rétro qui rêve d’être un Panzerfrau (Groupie 89 Turbo 6) jusqu’à la môme un peu mariole qui frimait dans sa Studebaker (Dies olé sparadrap Joey), le tout en traînant sa vieille caisse marquée fragile (Whiskeuse image again) : pas un seul des huit premiers albums du grizzli des montagnes jurassiennes n’a échappé à la sélection marquée du sceau de la diversité et de la maturation.

La voix toujours plus posée et prenante, Hubert-Félix Thiéfaine prend aux tripes quand il s’interroge sur Combien de jours encore à regarder l’horloge et passer l’infini dans [sa] loge ou quand il garde, pour la route, sa rage, sa haine et sa connerie (Redescente climatisée).

Porté par un public toujours acquis d’avance, démarrant au quart de tour avant même le début du concert, sur la mélodie entraînante de la fille du coupeur de joints, HFT traverse les époques – déjà 44 ans de turbulences scéniques d’agitations verbales et mélodiques telles qu’il les décrivait lui-même lors du concert mythique de 1998 à Bercy en y posant profondément sa patte d’ours.

Et il a beau se décrire comme étant fait d’une matière débile indélébile, non, il sait très bien quoi faire pour ne pas nous décevoir. En attendant la tournée estivale des festivals qui l’emmènera notamment au Festival interceltique de Lorient et quelques dates d’automne qui les feront même traverser la frontière jusque Bruxelles (le 18 novembre).

Le site d’Hubert-Félix Thiéfaine, c’est ici ; ce que NosEnchanteurs a déjà dit de lui, c’est là.

Le reportage photographique complet de Vincent Capraro (à Amiens), c’est ici.

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