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Malaquet, l’effroi et l’espoir

Malaquet en concert Collection personnelle du groupe

Malaquet en concert Collection personnelle du groupe

C’est une voix, grave, chaude, assurée, qui pourtant se brise parfois. Elle passe la rampe, complètement audible au sein de l’orchestration rock, puissante, subtile en même temps, qui rend compte des émotions qui animent l’auteur, en fusion avec ses écrits. Quatre chansons, presque toutes dépassant quatre minutes, cela suffit pour décrire un univers, une vision. Tout en révolte calme et forte contre un monde qui ne donne plus sa part à l’humain éclairé qui, on l’espère, sommeille en chacun de nous. Les textes ? Il sont sobres, d’une poésie noire et lumineuse en même temps. Nul premier degré, pas de pamphlet, pas de tract politique, pas de démonstration, pourtant on en sent bien la tension, et les émotions, contenues, y sont à fleur de peau.

La chanson la plus sombre peut-être de l’album est cet Ange et le chacal, lorsque l’être humain s’aperçoit que le mal suprême gagne la terre, se rapproche, peut être dans son voisin, dans ce chacal autrement appelé loup (insulte d’ailleurs à ses animaux rarement aussi pervers que ne peut l’être l’homme), et que ce proche, c’est peut-être lui-même. Même si face à lui, il se sent ange. «  Depuis Dagerman la terre / Est une fosse commune / Ophélie, Hugo, Himmler / Sous le même sable funèbre (…) Et j’en suis effrayé ».
La voix, posée sur deux notes délicates qui résonnent comme un gong, se fait plutôt douce sur les riffs de guitare qui se baladent en boucles mélodiques, montant sur cet effroi sur le rythme entêtant de la batterie.

Graphisme Ophélie Etienne

Graphisme Ophélie Etienne

Viennent des sujets plus cernés, celui venu de Varsovie, Jacek, qui cherchait sa liberté dans l’égalité et la fraternité, et qui n’a trouvé que trois lettres, S, D, F « J’habite la rue, oui, mais laquelle ? ». Son épopée, rythmée par une batterie lancinante, suit des guitares si expressives, jamais semblables, légères sur les confidences, et ce final « Jacek s’endort avant la nuit », soutenu de chœurs discrets, laisse planer une menace encore plus grande.
Toujours ceux qui fuient l’horreur, et marchent vers ce qu’ils croient être l’humanité, par delà les mers, « 
Sous les cascades de tes parfums / À contre-vague et sur les bords / De tes écumes à tes embruns / Je marche, je marche », sans doute la plus poétique des quatre chansons, même si elle évoque des faits tragiques. Cette quête de la beauté, du bien « Depuis Lampedusa je marche » prend une valeur symbolique « entre les chiens et les chevaux fous, entre le beau et l’immonde, à contrevague et sur les bords… toujours vers toi ». On ne peut s’empêcher de penser que ce toit, ce toi, c’est une femme. Une Europe, une Marianne qui ne serait pas indifférente, repliée sur elle-même, mais qui accueillerait l’exilé les bras ouverts… La batterie lancinante, les vagues que l’on devine, le chœur enveloppant accompagnent cette marche tendue dont le nom, L’alarme et la mer, fait penser à une autre chanson épique, celle de Ferré.

Enfin, il y a cette ballade déchirante que NosEnchanteurs vous a déjà présentée, comme un adieu, comme une prière,
La ballade d’Emiliano où l’auteur donne une dernière fois la parole au jeune footballeur argentin, Emiliano Sala, éternel absent, éternel présent pour ceux qui l’aimaient.

Un album court certes, mais si rempli d’émotion que peut-être plus serait difficile à entendre, avec un accord rare entre la musique, la voix et le texte. Pourtant on a hâte d’écouter l’album complet qui nous est promis, qui sans doute mêlera l’amour aux chansons de révolte et de souffrance. Merci à Christophe Tregret l’auteur, à Jean-Baptiste Ayoub (à la batterie et à la basse) aux arrangements avec Manuel Etienne (à la guitare et à la basse), les compositeurs. Malaquet. Qui arrive à la quintessence du rock et du texte.

 

Malaquet, Les vents dominants, EP quatre titres Lafolie records, 2022. La page facebook  de Malaquet, c’est iciCe que NosEnchanteurs en a déjà dit, là

L’alarme et la mer Image de prévisualisation YouTube
La ballade d’Emiliano Image de prévisualisation YouTube

 

 

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