Jean Duino : tant que la musique est joyeuse !
« Comment va le monde ? / Il est rouge sang / Et à mon avis, il l’est pour longtemps » nous chantait naguère Lavilliers dans ses Faits divers. Ce Monde, Jean Duino l’explore sur tout un album et, aussi pessimiste que réaliste, affirme que « Le Monde comme il va : / Pas sûr qu’il s’en remette un jour ».
Ce nouvel album est un état des lieux de nos vies, de ce Monde, de ces réseaux sociaux qui sont comme déversoirs de nos petitesses, des guerres de Poutine et d’ailleurs, d’humeurs et de rumeurs, de cette Terre que nous détruisons et meurt pendant que nous nous distrayons de choses bien futiles, des vertus de la chloroquine aux yeux des gogos, de… De plein de choses
« Calamités sur la planète : / Typhons, cyclones et tempêtes / Pandémies, famines aussi ; / Éruptions, tremblements de terre / Sont occultés par un mystère : / L’arrivée du Messi ». Mais si, même ça, Duino le chante, sauf que, pour ce titre-là, c’est pas lui qui tient le micro, mais son copain Joël Favreau.
Dit comme ça, c’est pas jouasse et ne donne guère envie.
Sauf que c’est Jean Duino et que, même s’il nous dit des horreurs, il le fait avec gaieté, avec bonhommie, à la manière de p’tites chansonnettes pas bien farouches qui donnent plus envie de se trémousser que de construire fissa un abri anti-atomique. Que voulez-vous, Duino est ainsi que quand la planète explosera, lui, soul ou samba, gigue ou mazurka créole, nous incitera à danser tout son soûl.
Remarquez que l’accent du chanteur, nougaresque en diable, aide à dire, à chanter le pire. Et les musiques sont belles, douces, câlines… Ils sont pas moins de dix sur ce disque, chanteur inclus, à jouer qui de la clarinette, de la flûte et du violon, du cor anglais, de guitares à profusion, du violoncelle, de piano, shaker et tibwa, d’accordéon et de batterie, à donner le meilleur de leurs instruments, à renforcer les propos du chanteur quand perle un peu, sinon d’optimisme, au moins de résolutions : « Qu’un beau jour, de guerre lasse / On en ait assez / De tous ces maux et qu’on s’enlace / Sur l’autel du passé. »
Si les chaînes d’infos relataient l’actualité à la manière de Duino, ça ne changerait pas beaucoup la teneur des infos, mais en modifierait singulièrement l’approche et le ressenti. Mais, que voulez-vous, l’infâme Pascal Praud ne sait pas chanter !
Les dernières plages de l’album sont tout de même plus sereines, qui nous parlent d’été, nous parlent d’automne… Et de ciel, d’océan, d’une île aux belle eaux, « ouassous et crustacés mêlés / tourments d’amour ou blancs-mangers / punchs ananas, rhums arrangés… » Comme un oasis, un refuge, un paradis après tant de vilénies. Merci.
MICHEL KEMPER.
Jean Duino, Le Monde comme il va, MNC/BeDooWap 2023. Le site de Jean Duino, c’est ici ; ce que NosEnchanteurs a déjà dit de lui, c’est là. On commande cet album ici.
Pas de vidéo de chansons de cet album, une précédente de sa plume paroles et musique, dans le même esprit, favorite de Georges Moustaki, « Comment être indulgent » :
« Epidermes », chanson de Jean Duino par Véronique Pestel :
Jean Duino est un orfèvre, un baladin chaleureux qui parle du monde avec acuité, sans forcer le trait mais avec une extrême lucidité. Un album en finesse et générosité.
Ca change des égouts des réseaux sociaux et comme d’habitude c’est excellent. Ce n’est que justesse en finesse, avec des musiques plus Caraïbes que Brésil cette fois ci. Toute l’équipe de musiciens au service d’un ACI de la plus grande qualité. Ca rend joyeux, ça rend content et pourtant ça dénonce sans violence.
Jean Duino égal a lui même avec des mots justes très bien assemblés et remarquablement musiqués. Merci Jean.