Nawel Dombrowsky : une fois adoptée vous ne l’oublierez plus !
J’avoue. J’ai regardé, mais en replay, The Voice, histoire d’actualiser mes connaissances sur l’état de la chanson, ce qu’on en fait, comment on la malmène. Alors ? Qu’ils chantent en pas français ou en v.o. de l’Hexagone, reconnaissons que c’est pas mal, toutes et tous s’emploient à bien singer les modèles dominants, à bien investir la case qu’on leur a attribué, à être dans le bon format. Cette émission fabrique les hordes à venir de ceux qui squatteront outrageusement radios et télés.
Mais j’ai surtout écouté, comme un antidote, un remède de cheval, le nouvel album (CD + DVD) de Nawel Dombrowsky, capté en public au Forum Léo-Ferré en décembre dernier. De quoi se rassurer : même de fait exclue des radios et télés, la chanson de qualité existe. Et Dombrowsky est à ce titre exemplaire.
Parolier et compositeur, Yanowski fait dans la haute-couture des mots : les vers les plus soyeux, musiques assorties, on ne voit pas le moindre ourlet, tout est parfait, même si « la rue dégrafe sa chemise / Et fend sa jupe de velours / Laissant filer à contre-jour / Ses bas de soie ». Rien n’est formaté : c’est de la chanson sauvage comme on aime, rétive aux convenances, insolente et frondeuse, qui fout Les femmes à la cuisine pour mieux en faire ici une probante Calamity Jane, ailleurs une possible Louise Michel aux bas résille.
Il y a trente ans, portées par d’incroyables rimes féminines, la diva et divine Juliette s’imposait définitivement à nous, alors grâce aux mots sublimes de Pierre Philippe. C’est aujourd’hui, avec ceux, tout aussi importants de Yanowski, que Nawel, par ailleurs actrice, crève l’écran, apportant un nouvel élan à la chanson. Une chanteuse qui a la sagesse de se mettre en bouche les propos d’autrui, une féministe (avec deux musiciennes à ses côtés, l’une au piano et accordéon, l’autre à la contrebasse) et des mots d’homme complice de la femme, malicieusement rebelle, diablement efficace.
Nawel Dombrowsky mitraille. En cheffe de bande dans une banque comme contre nos valeurs éternelles, celles qui vous font femmes. Comme cet insolite concept d’« instinct maternel » : « Dites-moi quel idiot quelle tête perfide / Quel mâle infatué bref quel anthropoïde / A osé inventer ce concept immortel / Que l’on appelle l’instinct maternel ! »
Dombrowky/Yanowski, c’est un chien dans un jeu de quilles, des skis sur pente caillouteuse, des qui mettent le désordre apparent pour mieux rétablir un semblant d’équilibre social où, sous la soie et la dentelle, la femme porte le pantalon et la cartouchière bien garnie. Dombrowsky sait ce qu’elle veut, choisit la camelote et la tâte pour s’en assurer : tant dans les formes, l’intonation que dans l’esprit, Le Défilé de Nawel ressemble à s’y méprendre à la Revue de détail de Juliette sus-nommée.
Précipitez-vous sur cet enregistrement public : vous écouterez le CD sur votre auto-radio et prolongerez le plaisir par le DVD sur votre écran plat qui aura rarement été aussi fier de chanter : c’est en cela que ça vous changera de The Voice.
Achetez cet album, parlez de la Dombrowsky de partout, faites-lui triomphe. Elle le mérite autant que vous la méritez. Et, ultime conseil, méfiez-vous des femmes à la cuisine : ça peut être explosif !
Nawel Dombrowsky, Les Femmes à la cuisine, CD + DVD, EPM 2023. Le site de Nawel Dombrowsky, c’est ici ; ce que NosEnchanteurs a déjà dit d’elle, c’est là.
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