Chanson : livres en vrac, récentes parutions
LE Cherche Midi poursuit les rééditions de sa collection Brassens d’abord en format semi-poche. Après le Brassens par Brassens de Loïc Rochard (prologue de René Fallet) et le Georges Brassens Premières chansons (1942-1949) (prologue de Gabriel Garcia Marquez, voici le Georges Brassens Journal et autres carnets inédits (préface de Francis Cabrel et avant-propos de Jean-Michel Boris). Un livre qui rassemble une partie des fameux documents confiés à Pierre Onteniente qui ont failli, il y a quelques jours, être dispersés aux enchères par l’héritière de celui-ci, vente gelée in extremis par décision du tribunal. Réédition bienvenue pour contenu parfois surprenant, toujours captivant, où Brassens disait lui-même « dans ce cahier, j’écris tout ce qui me passe par la tête ». Allez, un très court extrait : « J’écris, je chante, pour m’échapper, pour échapper aux automobiles, aux réfrigérateurs, aux bruits. Je chante pour couvrir la radio, les bruits des voisins. Chaque fois que je chante une chanson, je [me] fais la belle ».
Georges Brassens Journal et autres carnets inédits, Le Cherche Midi, 16,80 euros
CE n’est pas particulièrement sur la chanson, pas du tout même, mais c’est du Michel Bühler, donc respect ! Notre Helvète fétiche fait retour sur une lutte citoyenne contre « un parc industriel éolien projeté sur les hauteurs dominant Sainte-Croix et L’Auberson depuis plus de vingt ans, par des gens qui semblent se prendre pour les maîtres du vent ». Cette perspective divise la population. Michel Bühler se fait journaliste militant, se penchant sur cette histoire, afin de scrupuleusement fixer la mémoire de ce combat. Sérieux, documenté et instructif.
Les Maîtres du vent, Bernard Campiche Éditeur, prix non communiqué.
LE sérieux, le talent et l’honnêteté de ce biographe fait que nous avons souvent parlé de ses ouvrages. Frédéric Quinonéro nous sort un beau gros livre, richement iconographié, qui ferait presque hors-série, comme un tiré à part de luxe d’un hebdo people, s’il n’était pas si bien écrit. Voici donc son abécédaire de Patrick Bruel : l’auteur de Casser la voix y est pris à ses propres mots, que Quinonero dissèque avec plaisir et érudition. « Tout Bruel est rassemblé dans cet album » en dit l’éditeur. C’est en tout cas une façon nouvelle d’envisager une biographie (celle des artistes bankable, il va de soi, et ils ne sont pas si nombreux), pareillement à tous ces livres en vogue où l’auteur passe en revue la discographie de l’artiste.
Patrick Bruel au fil des mots, L’Archipel, 24,95 euros
FIXER pour mémoire les chansons et goguettes du premier quinquennat de Macron, tel est l’objet de ce nouveau livre de Michel Kemper, à paraître dans la Collection NosEnchanteurs. Il fait suite au Si Sarkozy m’était chanté paru en 2016. C’est un trésor pour tout amateur de la chanson, et je ne parle pas de ses historiens. Tout tout, vous saurez tout et chanterez tout sur la gestion de la pandémie, sur les 49.3 à répétition, sur l’instinct guerrier du président et son mépris de ceux « qui ne sont rien », sur la répression des Gilets jaunes, sur les affaires de la macronie. La tonalité de ce livre est à la mesure de la réaction de la chanson : très anti-Macron ! Des chansons bien plus graves que sous Sarko. Si la chanson est le thermomètre de la société, alors Jupiter a largement dépassé le mercure : ça nous prédit un avenir qui paradoxalement ne chante pas. Hors-commerce. Couverture conçue par le chanteur-dessinateur Eric Mie ; l’auteur de la préface n’est pas encore rendu public.
Si Macron m’était dé-chanté, 26 euros (20 + 6 de frais de port. Parution prévue en décembre 2022. Souscription en cours ici.
C’EST un OVNI que ce livre qui, mois par mois, presque jour par jour, détaille la chronologie de la vie de l’anar monégasque. Quelle peut être sa cible, y a-t-il encore suffisamment de fous de Ferré pour s’enquérir de chaque instant de sa vie, privée comme publique ? « C’est un ouvrage qui traque systématiquement la précision, et s’en tient rigoureusement aux faits » est-il précisé en page quatre de couv’. Avec pour argumentaire que, « si une vie ne peut se résumer à une série de dates, il reste que celles-ci, incontestablement, articulent une existence et se posent en jalons, en balises, en repères particulièrement significatifs ». Récidiviste, l’auteur, Jacques Layani, en est à son cinquième livre sur Ferré.
Léo Ferré, jour après jour. Une chronologie. Le Bord de l’eau, 20 euros.
IL n’existe que peu d’ouvrages consacrés à Anne Sylvestre. Autant dire qu’on peut se précipiter sur celui-ci, écrit avec un talent fou par la journaliste (du Monde) et auteure Véronique Mortaigne. Ce n’est pas une biographie (même s’il y a de vrais morceaux de bio dedans) mais un jeu de miroirs entre Sylvestre et Mortaigne. C’est un livre où le « je » prévaut, qui baigne à chaque paragraphe dans le sensible, épiant, révélant les fêlures comme les forces de part et d’autre. Nous sommes dans les intimes, c’est dire si la lecture est passionnante, loin de tout le conformisme et des non-dits d’une bio. Mortaigne maîtrise sa plume, nous le savions depuis ses ouvrages tant sur Manu Chao que sur Cesaria Evora.
Anne Sylvestre, une vie en vrai, Équateurs, 20 euros.
Pas aimé du tout le livre de Véronique Mortaigne sur Anne Sylvestre. Trop de pages sur le Père de Anne et la collaboration. Anne avait réglé cela dans Télérama en acceptant un entretien pour la revue avec Maris Chaix. Véronique Mortaigne voulait parler d’elle même bonne idée. Se servir des chansons de Anne comme d’un miroir OK pourquoi pas. Si Anne s’est confiée à Daniel Pantchenko c’est pour que l’on évite d’écrire sur elle et qu’elle même aborde les thèmes qu’elle souhaitait aborder. Le seul souhait c’est que son œuvre vive. De cela j’en suis certain.