L’adieu (provisoire ?) aux Didoudingues
8 juillet 2022, salle des Tilleuls à Viricelles,
De taille correcte, la scène est presque trop petite pour tous les contenir, elles, eux et ce décor familier, cocon fait de bric et de broc, cet intérieur cosy. Ils sont huit, et ce depuis sept ans, depuis qu’ils se sont rassemblés*, histoire de faire corps au moment de la lutte des intermittents. Il n’y a pas eu d’autres luttes sociales ni la moindre crise depuis (ça se saurait, je me trompe ?) mais ils sont toujours là, remarquez plus pour longtemps : ce serait leur dernière (prenons l’info au conditionnel toutefois) et, grand privilège, c’est à ce petit temple de la chanson qu’est Viricelles (pas même 500 habitants mais une saison culturelle que les grandes métropoles ne sauraient concevoir…) qu’ils l’ont réservé. Seule nuance, Coline Malice s’est fait la malle, réduisant plus encore une parité déjà malmenée, laissant Julie Rousseau et Marion Rouxin un peu seules. C’est Jonathan Mathis, en tenue estivale (short, sable dans les cheveux, âme estivale et chapeau de paille) qui la remplace : le musicien qu’on connaît s’y fait (excellent) chanteur pour exhumer Joe Dassin et sa Demoiselle de déshonneur (putain que ça fait du bien d’entendre du Dassin !). Les autres sont Gilles Roucaute, Davy Kilembé, Hervé Lapalud, Laurent Berger et Éric Frasiak. Nous les connaissons tous dans leurs prestations perso, les voici qui se la jouent collectif et, ma foi, ça fait bien belle équipe, solide répertoire même si c’est l’amitié qui transparaît plus encore sur scène. Amitié et fraternité, ce n’est pas pour rien qu’au son de sa kora, Hervé Lapalud entame ce spectacle par sa version toute perso et très musicale de Si tous les gars du monde, qui donne ainsi le la de la soirée. Chacun alors y va d’un bout de son propre répertoire : Mes copains par Lapalud, Mon pays par Davy Kilembé, De l’autre bout du monde par Marion Rouxin, Monsieur Boulot par Frasiak, Mon petit (en créole haïtien) par Julie Rousseau, J’ai voté front national par Gilles Roucaute… On fait des solos, des duos, des trios, des plus encore, des reprises bien venues (ainsi Les Marquises de Brel et Philistins de Brassens par Laurent Berger)… Pour ceux qui ne les connaissent pas, ou pas tous, ça fait comme rapide et probant échantillon de ce que chacun chante en temps normal. Les huit se répondent, parfois en chansons, souvent en postures, en regards, en sourires. Même Kilembé en fronçant les sourcils quand Roucaute interprète son « fameux » J’ai voté Front national…C’est un drôle d’assemblage où les titres se chevauchent, se répondent, s’interpellent. Avec amour et non sans humour. Et toujours Mathis qui, imperturbable, chante Joe Dassin, tant que c’est avec Salut les amoureux que tous, ensemble, finiront ce concert des plus chaleureux : « On s’est aimé comme on se quitte / Tout simplement, sans penser à demain / À demain qui vient toujours un peu trop vite / Aux adieux qui quelquefois se passent un peu trop bien ». Un peu trop bien, comme cette soirée pas comme les autres, entre copines, entre copains.
*En juin 2014, à l’occasion des dix ans du Festival Faites de la Chansond’Arras, l’association Di Dou Da a souhaité réunir des artistes accueillis dans ses cabarets découvertes. Lors de cette soirée qui devait être unique, quelque chose s’est passé, d’espéré et d’attendu à la fois, sur la scène et dans le public. L’aventure ne pouvait s’arrêter là. Ainsi sont nés « Les DiDouDingues», d’une envie de partage, de la curiosité de l’autre pour l’un, de la complicité de l’instant, de la fragilité du moment et de l’envie de défendre collectivement des propos singuliers.
Les Didoudinges à Jarny (concert complet, vidéo d’1 heure 44 mn) :
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