Cris Carol, quand la musique est bonne !
En prélude à son nouvel album, le récent clip de Renaud face à Jean-Paul Rouve publié il y a environ un mois a peut-être ravivé chez vous le souvenir d’une compositrice qui a joué un certain rôle dans la chanson française des années 60 et 70. En effet – le saviez-vous ? -, on doit la musique de Si tu me payes un verre (sur un texte de Bernard Dimey) à Cris Carol, de son vrai nom Christiane Kauffmann, née en 1935 à Montigny-lès-Cormeilles dans le Val d’Oise. Serge Reggiani avait enregistré cette chanson sur le disque 33 tours, La Chanson de Paul, paru en 1975. Une bonne occasion de remettre en lumière un album EPM paru en 2019 (lire NosEnchanteurs).
Entendre chanter Cris Carol n’est pas une vraie surprise car la compositrice avait démarré sa carrière comme chanteuse yé-yé chez Festival. Ce n’était pas vraiment son domaine de prédilection car elle a toujours préféré les chansons à texte. L’épisode yé-yé ayant pris fin avec la faillite de sa maison de disque, elle s’était alors tournée vers d’autres horizons et allait devenir la compositrice de bon nombre de chansons de Mouloudji.
En 2019, elle décide donc d’enregistrer onze chansons. Pour ce faire elle fait appel à Jean Musy qui s’est chargé des orchestrations. En écoutant ce disque, un autre enregistrement également orchestré par Jean Musy m’est revenu en mémoire. Pierre Tisserand, pour son retour dans les studios d’enregistrement en 2003 sur l’album Les Mammifères, avait également collaboré avec ce fameux musicien. Les deux albums ont pour point commun l’extrême attention de Musy à créer une atmosphère différente pour chaque titre.
Au rayon des paroliers, Pierre Delanoë avait aussi en son temps chanté ses propres chansons mais avec un talent d’interprète bien moindre que Cris Carol. Je me suis amusé à comparer pour chaque titre la version chantée par l’interprète original et la version proposée par Cris Carol. Ce ne sera une surprise pour personne si Serge Reggiani, avant ses années de déclin, reste un interprète hors pair qui avait l’art de s’approprier, en combinant ses talents de comédien et de chanteur, des chansons spécialement écrites et composées pour lui afin de les rendre inoubliables, Si tu me payes un verre ne fait pas exception à la règle. Mais pour les chansons destinées à Mouloudji, Cris Carol tient la comparaison car ses interprétations sont très différentes et l’orchestration est de loin supérieure aux orchestrations de l’époque.
Nous sommes à mille lieues de l’hommage des jeunes générations à une figure du passé comme il en existe à foison. Ces hommages sont d’ailleurs plus ou moins réussis. Non, il s’agit ici d’une compositrice importante du passé qui jette un regard attendri sur quelques-unes de ses mélodies. Le choix est remarquable à la fois par la qualité des textes retenus (trois de Bernard Dimey qui n’est quand même pas le premier venu et huit de Marcel Mouloudji) et par la beauté de la musique. Ajoutez à cela un remarquable travail d’orchestration et des qualités indéniables d’interprète et vous aurez un bel album qui s’écoute plusieurs fois avec un plaisir à chaque fois renouvelé.
Cris Carol, Si tu me payes un verre, EPM 2019. Le site de Cris Carol, c’est ici ; ce que NosEnchanteurs a déjà dit d’elle, c’est là.
Nous retrouverons Cris Carol avec une vingtaine d’autres interprètes dans le prochain disque, consacré à Bernard Dimey, de la Collection NosEnchanteurs/EPM, à paraître en fin de cet été.
« Si tu me payes un verre » (Dimey) :
« Enfin tu me viendras » (Mouloudji) :
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