Startijenn, le son moderne du trad’ breton
Des terres intérieures où nous sommes reclus, parsemées de rares menhirs dûment répertoriés par nos offices du tourisme, nous nous imaginons les indigènes de l’Ouest, entre Lannion, Vannes et Saint-Malo, comme de singuliers bardes aux folkloriques oripeaux, que nous allons visiter parfois, lors de l’Interceltique de Lorient ou des fêtes de Cornouailles à Kemper. Les seules incursions de bretons dans l’Hexagone s’étant longtemps résumées aux costumes bariolés et bas rock de Tri Yann, nous ne voyons en eux que cartes postales coloriées, images d’Épinal (bien qu’Épinal soit à l’Est, mais…).
C’est dire que, sur la pochette du disque, le costume costard-cravate et Ray Ban des cinq Startijenn (start comme start-up) devrait vous surprendre. Pourtant, écoutez, c’est pareillement joué, dansé, balancé. C’est du Breton (bombarde, biniou, uilleann-pipes, diatonique, guitare et basse) et, ma foi, c’est du bon. « Funkise le morceau, mon vers est profond comme une complainte / Afin d’unir la chaîne d’un peuple et qu’il se tienne debout / De faire trembler le sol avec un Plin haut placé sur la gamme de Richter / Un peuple qui danse est puissant comme un panzer / Un danseur est pour nous plus précieux que cent mille streams » chantent-ils (en breton dans le texte) même sur une musique hip-hop/funk qui nous ferait presque songer au Manau de 1998, en beaucoup mieux et bien plus sincère je vous rassure.
Startijenn est un groupe trad’ au sens où, à sa manière, il perpétue une musique, une culture issue de la tradition. Un groupe essentiellement musical qui, malgré ses qualités (assez remarquables, dit le musicien qui sommeille en moi), ne serait pas dans les pages de NosEnchanteurs s’il ne chantait ici deux titres (« Talm ur galon [Le Battement d’un cœur] » et « Skilfoù an noz [Les Griffes de la nuit] ») qui recèlent, même dans leur traduction en français forcément réductrice, une puissante poésie. On ne peut que l’encourager à cultiver la rime au sein de sa musique.
C’est le huitième opus de Startijenn (le premier, éponyme, remonte à 2006), qui est aussi présent dans quatorze compilations. La bio de Startijenn les présente ainsi : « Les cinq membres du groupe s’unissent comme les doigts de la main et créent une musique coup de poing. Armés des instruments emblématiques du fest-noz et d’une rythmique efficace, leur son brut et nerveux vise juste ! Ils font tomber le rempart qui oppresse trop souvent la musique populaire bretonne et défendent leur culture jusqu’aux scènes internationales. Enraciné et universel, le groupe carbure à la sueur et à l’énergie des danseurs. Ils prouvent par leur parcours unique que la musique est une histoire de sincérité et de constance. »
Avec plusieurs de leurs albums primés « Meilleur disque de musique bretonne », ces Bretons de plus de vingt ans d’expérience, qui en puisant dans leurs racines, « transforment une musique séculaire », « se sont taillés une réputation en un son moderne, innovant et rigoureusement efficace », et se sont fait connaître dans le monde entier. Leurs tournées en Chine, Malaisie, Australie, Danemark, Italie, Pologne, Allemagne, Suisse, Belgique et Espagne l’attestent sans mal.
Startijenn, Talm ur galon, Paker prod/Coop Breizh 2022. Le site de Startijenn, c’est ici. En concert le 2 avril 2022 à Pederneg / Pédernec (22) pour un fest-noz, le 16 à Groñvel / Glomel (22) et le 7 mai au Festival de Kleg à Klegereg / Cléguérec (56).
Présentation de l’album (en Breton, sous-titré en Français) :
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