White Velvet, à contre-courant dit-elle
Juliette Richards m’est grande énigme. Malgré son blase qui sans mal pourrait passer pour de l’anglo-saxon ou de l’étasunien, cette Havraise, après un petit tour sur Liverpool il y a quelques années, s’est choisi pour pseudo « White Velvet ». Ça aurait pu n’être que le titre d’un projet, d’un caprice d’inspiration british. D’ailleurs son précédent et premier album, catalogué « alternative pop », est entièrement en anglais. Nous avons, ici même, souvent dit ce que nous pensions de ces Français qui braillent en anglais.
Voilà que Juliette sort un autre album, qui non seulement nous parvient mais titille nos oreilles. Toujours sous le même nom, qui lui sera difficile désormais de porter, White Velvet chante dans sa langue maternelle, à contre courant. Et, mazette, chante bien !
Que des chansons qui font sens quant à l’objet de ce disque : l’amour. Sept titres (plus un interlude ou ne chante que la mer, c’est plutôt vagues…) aux ingrédients qui nous interpelle. Deux dont elle revendique paroles et musique ainsi qu’un troisième qu’elle co-signe : du banal, convenu, genre postulante aux variétés. Bien fait mais sans réel intérêt, qu’on oublie même en l’écoutant.
Et, plus encore à contre-courant, des reprises qu’on se demande bien ce qu’elles foutent là mais qu’on est bien content d’écouter, qui plus est de si belle façon, qu’on a même envie de la remercier. Il n’y a pas d’amour heureux, de Louis Aragon et Georges Brassens ; La Vie ne vaut rien, d’Alain Souchon ; et, le choc est d’importance, Dis-moi oui, de François Béranger ! Vue la tonalité de ce dernier titre, le rythme (lent, bien que secoué par une batterie), les puristes vont crier à l’imposture ; moi je salue une telle reprise et, pour vous dire le fond de ma pensée, je trouve cette interprétation nettement plus intéressante que les reprises de ce même Béranger par Sanseverino, notre Speedy Gonzales de la chanson qui bouffe tout, en premier lieu les mots.
Très belle reprise de Souchon, intéressante reprise de la chanson de Brassens (un peu façon Hardy, mais en plus osée, ne serait-ce que parce qu’elle est tronquée, n’y figure que le dernier couplet de la version de Bassens). Reprise fort probante aussi de Tout simplement, le tube de Bibie de 1985.
Artiste étrange, disque étrange aussi, qui bouscule un peu nos étiquettes, nos codes-barres, nos QR-code. Une chanteuse à l’improbable nom anglo-saxon qui revient au français et chante moitié ses propres chansons pas plus intéressantes que ça, moins que ça même, et moitié fait revivre avec une très grande qualité des chansons importantes du répertoire. Ça se salue : bienvenue donc à White Velvet au sein de NosEnchanteurs !
White Velvet, Encore à contre-courant, Melmax Music 2021. Le facebook de Juliette Richards, c’est ici.
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