Jean-Loup Baly, 1948-2022
Il fut, avec Jean-François Dutertre (avec qui il chantait déjà depuis 1967), le fondateur de Mélusine, qui deviendra (avec entre autres Malicorne, La Bamboche et Tri Yann) un des piliers de la scène folk des années soixante-dix. La formation originelle de ce groupe mythique fut un quatuor : ces deux-là rejoints par Dominique Regef et Emmanuelle Parrenin. Puis trio, celui qu’on connaît (Jean-François Dutertre, Jean-Loup Baly et Yvon Guilcher), dont le premier album, éponyme, sortira chez Polydor à la mi-1975. Souvenez-vous : « C’est le matin au point du jour / J’entends battre ce maudit tambour / Qui nous appelle à faire l’exercice… », une chanson mise à l’index sur les antennes de la radio publique en raison de son caractère « antimilitariste ».
Mélusine comptera neuf albums (le dernier, Voix contrevoix, en 1990 ; les deux derniers en quatuor avec le renfort de Jacques Mayoud, ex-La Bamboche) : que des merveilles polyphoniques ! Et d’autres en périphérie du groupe : Chants à répondre et à danser, Le Roi Renaud, Le Galant noyé ainsi que l’instrumental L’accordéon diatonique (de 1973 à 1975). Seuls les deux premiers 33 tours de Mélusine sont ressortis en un CD en 2013 (label Compagnie Mélusine). Multi-instrumentiste, Baly joue entre autres de l’accordéon diatonique, de la flûte à bec et du pipeau, du hautbois rustique, de l’épinette, du bodhran, du cromorne, de la chalémie…
A la cessation d’activités de Mélusine, Jean-Loup Baly s’absente de son art durant une longue période. Pour le moins radical, il décide de ne plus chanter, aussi vrai qu’il prend par ailleurs la décision de ne plus prononcer la lettre « u » mais de la siffler, de ne plus prononcer la syllabe « con » et de lui substituer le mot couillon (un concombre est dès lors un couilloncombre…), de n’envoyer ses vœux que le 1er mars de chaque année…
La rencontre avec Bruno de La Salle, qui s’accompagne d’un orgue de verre en Cristal Baschet, est décisive, qui l’orientera vers le conte. Avec Jean Léger, « frère de planches et de joie de vivre », qu’il a rencontré vingt ans plus tôt, il se lance dans des contes musicaux au sein de la Boîte à Spectacles, collectif d’artistes qu’ils créent avec Rémo Gary, puis de la Compagnie Baly-Léger. Baly écrit des contes issus de la tradition mais réinventés, contes d’abord régionaux (Haute-Saône et Jura) qui peu à peu gagnent la mythologie ; Léger en crée la musique.
A noter que Baly, Guilcher et Dutertre sont été largement mis à contribution, ensemble comme individuellement, dans l’imposante Anthologie de la Chanson traditionnelle (concoctée, pour le compte d’EPM, par Marc Robine avec l’aide de Gabriel Yacoub et Emmanuel Pariselle, en 1994). Et que Dutertre retrouvera ses deux compères sur disque en 2002 sur le disque Chansons traditionnelles de Normandie.
Jean-Loup Baly est décédé dans la nuit du 15 au 16 février, « emporté par cette pourriture qui vous ronge le cerveau » comme le dit dans un post son ami et complice Jean Léger.
Je remercie Jean Léger et Jacques Mayoud pour leurs précieux renseignements qui m’ont aidé à rédiger cet article.