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Les Excellents, appellation non mensongère

Nos Excellents

Nos Excellents (photos extraites du livret du disque)

Les Excellents. Tel est le nom de la formation emmenée en petites pompes par Ramon Pipin, grand maître ès galéjades, déconnades et autres marrades. Avec ses trois comparses Sylvain Fusée, Camille Saféris et Jérôme Sétian, il sévit sur le Net depuis quelques années, s’amusant à revisiter les grands classiques du rock ‘n roll à grands coups de calembours et de ukulélés destructeurs. Des vidéos bricolées entre deux éclats de rire, pour un résultat approximatif totalement hilarant, qui totalisent des paquets de vues. Un tel succès méritait évidemment d’être gravé dans la cire pour l’éternité (même si c’est en CD…).

En prenant connaissance du corpus delicti, l’évidence, aveuglante, nous assaille : les Excellents portent bien leur nom ! Ne cherchez aucune trace d’ironie ou d’autodérision dans ce patronyme, qui se la pète certes, mais est totalement justifié.

D’abord l’objet. Il faut bien être conscient que nous nous trouvons face à une œuvre appelée à devenir un classique, que les musicologues de toutes obédiences disséqueront à l’envi. Dès lors, sous la houlette du prestigieux label « Moche Gramophone », dans une pose et avec la mine renfrognée qu’affectionnent les tenants de la musique sérieuse, le quatuor pose avec solennité, leurs instruments à la main (notez la subtile allusion pour le percussionniste !). Le nom de leur opus ? Ukulelum trucidatio. Le magnifique livret, orné de portraits de grands compositeurs, indique par ailleurs clairement quelle place Les Excellents sont amenés à occuper dans le panorama musical, entre Antonio Vivaldi (marchand de 4 saisons) et Meyer Kansékui (ashkénazophone).

Après le contenant, place au contenu. L’album des Excellents est sous-titré Ein 31 musikstücke-massaker. On pourrait traduire cela par « 31 morceaux de musique revisités ». Car c’est bien cela qu’il nous est donné de découvrir : 31 standards du rock anglo-saxon du siècle dernier revus, corrigés et adaptés. Des chansons réparties sur quatre décennies, des années 50 (Johnny Bigouden, de Chuck Berry) aux années 80 (Massage dans un bordel, de Police). Des morceaux livrés à nos oreilles dans une version dépouillée, permettant d’en apprécier au mieux les subtilités mélodiques, tant il est vrai que le ukulélé, le cor de chasse ou le kazoo permettent d’en souligner les harmonies comme aucun autre instrument. Notons cependant que le groupe n’a pas hésité à appeler en renfort quelques compagnons de route pour étoffer quelques titres, ce qui nous vaut l’apport de cordes classieuses ou d’un synthé bien pourri.

258136537_1100768514013516_6584009362051488818_nCette pureté musicale serait toutefois confiture jetée aux cochons, si elle n’allait de pair avec des paroles audacieuses issues d’une plume virtuose. Les Excellents, en effet, ont choisi de s’attacher à l’esprit des morceaux choisis, plutôt que de tenter d’en donner une vaine et plate traduction, conscients qu’ils sont de la véracité de l’adage « traduttore, traditore ». Ils ont certes veillé parfois à respecter l’histoire initiale (Hotel California devient ainsi Hôtel Formule Un), mais le plus souvent, n’ont pas hésité à s’en écarter pour retrouver les sonorités anglaises, ayant bien perçu que, dans le rock, le son des paroles importait plus que leur sens. Cela nous donne donc des merveilles, comme cette sombre histoire – inspirée de Deep Purple – du gars coincé dans les toilettes en pleine réception mondaine (En smok dans les waters), ou celle – très Beatles – d’une passionnée de ballon ovale (Elle adore le rugby). Nous laissons le plaisir aux amateurs des Rolling Stones de deviner quelles chansons se cachent derrière Star myope ou Mes sous, aux fans de Léonard Cohen de découvrir Ah les nouilles ! et aux admirateurs de Bowie de goûter aux joies de L’Iphone marche. Quand aux Beach Boys, pas sûr qu’ils avaient en tête les mêmes Bonnes vibrations que celles évoquées par le quatuor, qui sait se montrer égrillard à ses moments perdus.

On l’aura compris : l’album des Excellents est une merveille. On se sait que saluer en premier, du culot d’oser concevoir un tel album, de la drôlerie des adaptations à l’excellence (mais oui !) de sa réalisation. Une heure d’amusement, de sourire, voire de rire franc et massif (mention d’honneur à leur Chatte tirée de Tears for Fears !). D’un mauvais goût exquis et dès lors indispensable. A s’offrir pour soi. Puis à offrir à vos vieux copains. Succès assuré.

 

Les Excellents, Ukulelum trucidatio, Ramon Pipin Production, 2021. Le site de Ramon Pipin, c’est ici ; ce que NosEnchanteurs a déjà dit de Ramon Pipin, c’est là.

CD en vente sur le site ramonpipin.fr et en téléchargement numérique sur ramonpipin.bandcamp.com. Les Excellents seront à Paris, au Café de la Danse, le 5 décembre 2021, pour un concert exceptionnel.

« Retire ton doigt – Les bites gisent » (puis laissez défiler, y’en a d’autres et des pires !) : Image de prévisualisation YouTube

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