Les Oreilles en pointe 2021. Féloche, opération mandolines
18 novembre 2021, Le Majestic à Firminy,
De ces deux heures passées avec Féloche, que nous faut-il retenir ? Indiscutablement la sortie de la salle, ce long couloir étroit bouchonné comme le périphérique un jour de grève, lui en bonimenteur-musicien forain à côté du stand de friandises et de pop-corn qui, de sa mandoline, assure tant l’animation, la vente de ses disques et le service-après vente de son spectacle. Nous sommes à Firminy et ne risquions pas de louper le dernier métro.
C’est tout ? C’est bien mince comme souvenir…
Féloche, ce fou sorti des bayous, a imaginé une tournée où il n’est accompagné, à une mandole et une contrebasse près, que de mandolines, son instrument fétiche : The Mandolin Orchestra (visiblement en formule allégée par rapport au format d’origine). Un peu comme Amélie les crayons une semaine plus tôt dans la même salle, accompagnée que par les guitares des Doigts de l’Homme. Sur le papier-musique, l’idée est séduisante ; qui plus est, à ma connaissance, inédite. On se pourlèche les babines rien qu’à l’énoncé, on se nettoie plus encore les oreilles au coton-tige pour bien en profiter. Et puis…
L’ennui s’insinue dans les rangs : le fou des bayous n’y est pas, le chef de gang des mandolines ne semble pas animer, motiver sa troupe. A l’entame, ça commençait bien : dans la pénombre les musiciens munis de lampes frontales, façon spéléos, bientôt rejoints par Féloche, nous jouaient la grande scène de l’éternelle sérénade… De ci de là, entre deux titres de Féloche dont seul ressort vraiment le fameux Darwin avait raison, des reprises de chansons parlant de mandolines (c’est, n’en doutons pas, une intéressante thématique) comme ce Bambino de Dalida (« Et gratta, gratta sur le tuo mandolino / Mon petit bambino / Ta musique est plus jolie / Que tout le ciel de l’Italie »), cette Mandoline de Bourvil (« Je joue d’la man-doli-ne / Fa sol la, sol fa la, sol mi sol, fa do ré / Je joue d’la man-doli-ne / C’est moins gros qu’un tambour / Mais c’est plus compliqué ») ou Mes petites amoureuses de Beaudelaire et Ferré (eh, oui « J’ai dégueulé ta bandoline / Noir laideron / Tu couperais ma mandoline / Au fil du front »!).
Une Chic planète de l’Affaire Louis trio aussi. Quelques gags, les mandolinistes ne manquant pas d’humour… Et une diva virtuose et drôle, faussement sortie du public : belle idée que celle-ci.
J’ai, comme nombre de mes confrères, apprécié le disque. Moins le concert, car la mayonnaise prend rarement, jamais on ne retrouve la douce folie qu’on a pu jadis apprécier de Féloche en scène, et qu’on voudrait retrouver : tout semble englué dans une mécanique trop lourde. C’est ça, c’est la légèreté qui le caractérisait, qui était sa nature, qui fait aujourd’hui défaut.
En me levant de mon siège, je pensais qu’il me faudrait peser, soupeser mes mots pour le dire, l’écrire. Aux premières réactions recueillies auprès de mes voisins, j’ai compris que j’étais loin d’être le seul à penser que, si l’idée initiale était bonne, l’application est ratée.
Le site de Féloche, c’est ici ; ce que NosEnchanteurs a déjà dit de lui, c’est là.
ET AUSSI
Yvan Marc, chanteur de proximité, à tous les sens du terme
« Je suis Yvan Marc, je suis un ours, et ça va bien se passer ». Certes chanteur de proximité (il vit pas loin, dans une forêt de la proche Haute-Loire), Yvan Marc n’en est pas moins l’un des artistes les plus intéressants du moment, et ce depuis pas mal de temps.
Ici, deux postes fixes de travail : Loïs, aux claviers et batterie, et Yvan, à la guitare et aux chants. Chacun des deux immobiles, ou presque. Seuls les éclairages bougent, changent les ambiances. C’est le dedans des chansons qui bouge et nous remue, sème la terre, contemple la neige, s’inquiète de l’état de la planète, du nôtre aussi. C’est une poésie soucieuse, impliquée, militante, j’ose dire de nécessité. Une superbe poésie qui diffuse longtemps en nous, ne nous laisse pas indemne.
Ce ne fut qu’une grosse première partie, mais largement de quoi découvrir, si besoin était encore, le répertoire de cet homme des bois, ce chanteur à l’inspiration profondément ancrée dans son terroir. Et dans le travail et la dignité des hommes. Le set s’est achevé sur ces Grilles fermées qui, comme Frédéric Bobin et Bernard Lavilliers, Romain Dudeck et autres encore, nous parlent de ces usines fermées, de ces mains orphelines du travail. Magnifique !
Le site d’Yvan Marc, c’est ici ; ce que NosEnchanteurs a déjà dit de lui, c’est là.
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