Stavelot 2021. Dick Annegarn, unique à tout jamais
Trois-Ponts, « Une chanson peut en cacher une autre », 16 octobre 2021,
Le plus beau festival de Belgique, Une chanson peut en cacher une autre, avait vu sa version 2020 écourtée pour raisons sanitaires, en un atroce coïtus interruptus. Tel le phénix, le revoici pourtant en 2021, fier et vaillant, portant beau ses 20 ans d’âge. En guise de bouchée apéritive, pour une soirée exceptionnellement déplacée au tout proche et plus vaste Centre culturel de Trois-Ponts, les petits plats se sont emboîtés dans les grands. C’est en effet à Dick Annegarn himself qu’est revenu l’honneur et le plaisir d’ouvrir cette nouvelle édition.
On pouvait s’attendre à l’applaudir dans une formule en solo-guitare, à l’instar de son dernier album Söl, mais c’est accompagné de trois musiciens qu’il se présente à nous. Ceux-ci – un claviériste, un batteur et un guitariste-trompettiste – sont regroupés sur la droite de la scène, tandis que la vedette campe sur le côté gauche, derrière son pied de micro, armé de son inséparable guitare. Disposition étrange et inhabituelle. Mais comment croire un seul instant que Dick Annegarn puisse faire les choses comme les autres ???
Il ouvre le set avec Encore un verre, et ses paroles qu’on espère prémonitoires (Tout est si doux, si désirable / Que c’en est une grande joie), avant d’enchaîner avec un morceau, dont il nous avertit que lui-même ne comprend pas les paroles, mais pour lequel nous sommes invités à faire les chœurs ! Attention, nous dit-il, c’est la seule fois où nous serons amenés à chanter. Mensonge, évidemment, puisque le public ne se fera pas prier pour reprendre avec lui ses trois grands succès, les célébrissimes Bruxelles, Mireille et Sacré géranium. Pour le reste, c’est une autre paire de manches : le répertoire du Hollandais n’est pas de ceux qui donnent l’occasion de se trémousser ou de taper dans les mains, la rupture de tons et l’absence de mélodie identifiable étant plutôt la règle.
Le concert sera l’occasion de survoler sa vaste discographie, ne s’arrêtant qu’une seule fois sur le petit dernier (Modigliani). Des chansons interprétées de temps en temps avec sa seule guitare (et disons-le, c’est bien comme cela qu’on les préfère), le plus souvent avec ses trois compagnons dans des arrangements parfois très free-jazz. L’artiste est visiblement d’humeur joyeuse. Là, il se moque du public qui fait tout un foin avec un Apollinaire ayant vécu 3 mois à Stavelot, alors que Rimbaud était, lui, un véritable Ardennais (et de nous interpréter sa version de L’Eternité, dudit poète). Ailleurs, il plaisante sur ses collaborations avec Calogero ou Raphaël, adopte des poses de rock-star derrière son micro ou esquisse des pas de danse clownesques … Son élocution étant ce qu’elle est, on ne comprend pas toujours tout à ses marmonnements d’entre deux chansons, ni à ses textes empreints de surréalisme, mais on s’amuse de bon cœur de ses facéties, tout autant que l’on admire cette façon unique de faire sonner les mots.
En somme, assister à un concert de Dick Annegarn, c’est prendre un bain de musique total, c’est goûter à la liberté d’un artiste hors normes, c’est aller à la rencontre d’une légende de la chanson française, au style dépouillé immédiatement reconnaissable, à la voix rugueuse et l’accent venu d’ailleurs. Une catégorie à part, un électron libre, une sous-espèce qui s’éteindra avec lui.
La page Dick Annegarn sur le site Tôt ou Tard, c’est ici ; ce que NosEnchanteurs a déjà dit de lui, c’est là.
ET AUSSI
En première partie de soirée, découverte de la Liégeoise Val et ses bateleurs Une auteure-compositeure-interprète, Valérie Mathieu, magistralement entourée de quatre musicien.nes (batterie, guitare, violon et violoncelle). Un groupe acoustique bien au point, s’adonnant à un mélange de musique traditionnelle, de swing et de jazz manouche. Dommage que les textes des chansons ne soient pas à la hauteur de leur superbe écrin musical, manquant d’accroche et sans point de vue clair, tombant dans l’oubli à peine écoutés… (photo Annick Delperdange)
LE FESTIVAL : DEMANDEZ LE PROGRAMME
Le festival ne fait que commencer. Outre les matinées scolaires, comme chaque année, Une chanson peut en cacher une autre s’étalera encore sur les 2 vendredis et les 2 samedis à venir. Avec, chaque soir, un double plateau pas piqué des vers.
Vendredi 22 octobre : en lever de rideau, la chanteuse belge Marie Warnant viendra nous redonner de ses nouvelles, suivie de la classieuse Garance, son nouvel album Bleu tout frais sorti sous le bras.
Samedi 23 octobre : Marion Roch et son slam ouvrent le bal en trio, avant de céder le crachoir à la plume la plus extravagante du plat pays Daniel Hélin.
Vendredi 29 octobre : Ivan Tirtiaux, viendra nous faire goûter à la fraicheur de son Oasis. Lui succèdera le vétéran Gerard Pierron, immanquable vu la rareté de ses venues en Belgique.
Samedi 30 octobre : succombez aux charmes d’Ilia et de sa voix ensorcelante, et finissez votre soirée dans le rire et la folie avec Les Obsédés du monde.
Quatre belles soirées de découverte, qui nous promettent des sourires sur toutes les lèvres et des larmes au coin des yeux. Avec l’ambiance inimitable du plus convivial des festivals belges. Venez nombreux, bonheur garanti !
(J’aime beaucoup Dick Annegarn, mais il s’agit d’un message « pratique » à l’attention de Michel Kemper)
Bonjour, voici quelques mois, vous nous avez fourni ce lien pour écouter les archives de Jambon-Beurre (Saint-Pierre-et-Miquelon):
http://www.patrickboez.com/jambon_beurre/
J’ai pris l’habitude de fréquenter cette mine de chansons, mais depuis quelques semaines le lien semble « périmé »
Peut-être avez-vous un « tuyau » pour se rebrancher dessus…
Avec mes remerciements pour votre attention, recevez un cordial salut bas-alpin
Un talent tellement original, reconnaissable immédiatement…une chance pour la chanson française, avec des trésors à chaque époque.
Pour les enchanteurs : avez-vous des nouvelles du non moins unique Albert Marcoeur, qui joua un temps avec Dick Annegarn et qui nous offrit quelques albums inoubliables(pour moi en tout cas)?