La Marquise : tout va très bien !
Sans défrayer l’actualité plus que de raison, La Marquise poursuit son bonhomme de chemin. Mine de rien, le groupe créé et animé par Daniel Ferrat accuse déjà quinze ans de scènes au compteur. Et un répertoire qui toujours s’étoffe d’un tissu sans cesse amélioré. Un artiste homonyme disait qu’il ne chantait pas pour passer le temps : La Marquise non plus. Si on peut se distraire en l’écoutant, on tombe chaque fois sur des chansons plus fortes que d’autres, qu’on dira sinon engagées, au moins diablement concernées. Car La Marquise aime à s’inviter aux débats de ce temps, à ces ébats qui secouent notre République : « Il y a des couacs dans la République / Il y a des hic / Ça tangue ça craque / Comme le Titanic ça coule à pic / Et ça tangue la République ». De Libé à Médiapart sans doute, Ferrat est observateur de la vie politique et a volontiers la plume lourde et sans pitié quant à d’autres publications : « Fébrile il brandit son magazine préféré / Photos, éditos ils font dans la dentelle / La vie est belle belle belle chez Valeurs Actuelles / Français dégénérés la France islamisée… » Album écrit au temps du Corona, il fallait bien qu’on en trace sinon le virus au moins le QR-code. En l’occurrence dans Le con, la lutte et le truand où chacun en prend pour son grade : « Je me souviens du prophète au temps d’la pandémie / Au temps d’la pandémie il jurait c’est promis / Le jour d’après on s’rait prêt à changer la vie […] Et c’était sans compter les banquiers les experts / Allez fini de confiner il faut redémarrer surtout ne rien changer / Faut r’lancer les affaires ».
Au champ public, Ferrat adjoint depuis toujours une autre et belle facette de son art : le chant privé, qui nous vaut là d’autres pièces importantes de cet album. Les affres du couple (« Au début tout baigne c’est si facile climat exceptionnel état fébrile / Tout au début tout baigne c’est romantique romantique voir sympathique…« ), la jalousie… Et cette touchante chanson sur les pères, ceux qui pensent savoir l’être, ceux qui ont du mal (« Il y a des pères, il y a des pères et c’est comme ça / Quand il y a un père on n’y échappe pas / Il y a des pères c’est comme si on les avaient posés là / Eux se voyaient Zorro ou bien Robin des bois… »). Et cette autre sur Les enfants des parents séparés… Des sujets sensibles, bien traités, posés, qui n’en trahissent pas moins la difficulté, voire la douleur. Et quelques portraits attendrissants…
Pour le groupe (Daniel Ferrat déjà nommé, Richard Gusti aux basse contrebasse et guitare, et Elsa Gourdy à l’accordéon), ce cinquième album est celui « le plus abouti tant par l’angle des sujets traités que par la diversité des styles musicaux« : il a raison. Autant c’est riche en texte, ici charmant, ailleurs urticant, autant ça groove, entre ballades acoustiques contrebasse-accordéon et rock soupçon funk qui ne s’en cache pas. « Il s’agit de faire chalouper le propos » en dit Ferrat : c’est vrai que ça tangue ! Et que ça tente ! Investissez dans La Marquise : c’est un utile placement.
La Marquise, Il n’y a plus de saisons, Music’O Fil/InOuïe Distribution 2021. Le site de La Marquise, c’est ici ; ce que NosEnchanteurs a déjà dit d’eux, c’est là.
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