Marka : le retour du daron

Marka (photos Rudy Lamboray)

Connaissez-vous Marka ? Si vous posez cette question en Belgique, il y a de fortes chances que vous obteniez une réponse positive. Les anciens sauront que c’est un chanteur, même si citer un de ses titres risque d’être déjà plus ardu. Les jeunes vous diront, avec un peu de chance, qu’il est le papa de Roméo Elvis et d’Angèle, c’est déjà ça ! Ceci pour dire que l’homme a une petite popularité dans son plat pays, sans y être une star pour autant. En France, la question ne se pose pas : la réponse négative à 99,99 % étant connue d’avance.

La reconnaissance du grand public, Marka l’a pourtant frôlée en 1995, avec son titre rigolo et dansant aux senteurs arabo-andalouses Accouplés. Puis le soufflé est retombé et Marka a continué sur son terrain, imperturbable, avec la foi du charbonnier et la fougue des passionnés. Des lustres qu’on le voit et l’entend en Belgique, trop souvent inégal sur disque, toujours irrésistible sur scène.

C’est donc avec un sourire de confiance aux lèvres qu’on a découvert son nouvel album, intitulé Terminé bonsoir. Non pas qu’il veuille laisser entendre qu’il compte arrêter après cela, non ! Juste un titre à l’accent belge pour dire avec malice « Place aux vieux ! ». Parce que les jeunes chanteurs, et en particulier sa progéniture, ça va un moment ! Même si, comme il nous le chante dans Le Daron, son titre clin d’œil : « Ils font c’qu’ils veulent / Les jeunes loups / Tandis que les ieuvs, ils font c’qu’ils peuvent / Surtout » !

Marka nous a donc mijoté un retour en fanfare. Un disque court de douze chansons d’environ trois minutes chacune, qui file bon train, variant les climats pour le plus grand plaisir de l’auditeur. Avec un instrumental pour ouvrir le bal : le westerno-morriconien Maftaboule. Et puis une kyrielle d’ambiances musicales, allant de la pop et du reggae au funky-disco en anglais de cuisine, en passant par une ballade en duo avec Blankass (Avant après) et un final flirtant avec le slam (En bas). Non sans au passage, les connaisseurs apprécieront, nous recycler avec Tu es formidable, le jingle qu’il a composé pour les Francofolies de Spa.

Tout cela est-il bien raisonnable ? Jamais avec Marka ! C’est qu’en bon belge, il a l’auto-dérision chevillée au corps. Son pseudo ne vient-il pas d’une abréviation de Marcassou, une marque de charcuterie des Ardennes ? Comment le prendre au sérieux après un coup comme celui-là ? Pourtant il fait des efforts. On lui avait conseillé : « Si demain tu reviens / Faut vraiment qu’ce soit bien / Que t’impressionnes tout ton monde / Avec des chansons profondes ». Peine perdue ! S’il aborde le sujet grave de la métempsychose, il ne peut s’empêcher de lancer un scud au refrain « Avant d’être un homme / J’étais un géranium / Avant d’être une femme / T’étais Paco Rabanne » ? Ou de nous narrer une sombre histoire d’escroquerie à la praline avariée (Garanti 100%). On en appréciera d’autant plus, devant cet humour omniprésent flirtant parfois avec la facilité, les morceaux teintés d’une réelle émotion, comme le philosophique Des hauts, des bas ou le poignant En bas qui clôture le disque.

Terminé bonsoir est donc le nouvel album de Marka. A l’instar de ceux qui l’ont précédé, il s’écoute armé d’un sourire et se sifflote sous la douche. Des chansons bien tournées, bien produites, bien interprétées, qui donnent la banane et la pêche. Ce n’est pas rien.

Marka, Terminé bonsoir, Daring Music/At(h)ome 2021. Le site de Marka, c’est ici.

« Le daron » :

« Si demain je reviens » :