Éric Laurent, l’évident talent !
C’est un chanteur « de reprises » comme il y en a beaucoup, qui perpétue une tradition de colportage de chansons, de vulgarisation aussi du répertoire de quelques brillants artistes tels que Leprest, Vasca, Ferrat, Sylvestre, Le Bihan, Bertin, Ferré, Brel ou Béranger. Rien que du beau monde.
Dire que tous les repreneurs fassent du bon boulot serait beaucoup dire. Ce serait pieux mensonge. Lui, Eric Laurent, est assez remarquable, on n’ose dire exceptionnel. La chanson, il la sent, il l’adopte, la fait sienne, dans un lit de tendresse, de colère et d’indignation s’il le faut. Tant que quand il chante SDF, Avec le temps ou Voir un ami pleurer, vous ne convoquez pas en vous Leprest, Ferré ou Brel : non, vous écoutez Eric Laurent. Et l’applaudissez chaleureusement. Que pouvez-vous faire d’autre d’ailleurs, l’homme est ogre de talent. C’est pas facile d’interpréter l’Allain Leprest, homme fait pure émotion : sur cet enregistrement public, trois titres sont prélevés à son stock de chansons. Pour avoir vu bien souvent Leprest en scène, pour entendre ces interprétations de Laurent, c’est à mon sens, sans nullement et bêtement copier-coller, d’une émotion pareille, de pleurs semblables.
Sa notoriété est assez régionale, domicilié qu’il est dans l’Indre (vers Châteauroux). Ceux qui le connaissent le reconnaissent comme un bon, un grand chanteur.
Aux reprises, il ajoute ses propres chansons. Qui ne déparent pas du reste. Sur cet album, il n’y a pas moins de sept titres de lui, et deux autres dont il n’est que le compositeur. Beaux textes, accompagnement enviable (Denis Reignoux et Ludovic Rabier aux claviers) et toujours une interprétations sensible et sans faille. Des textes qui souvent tonnent, tonnerrent d’indignation : « D’être témoin vivant de ce monde de guigne / Je m’indigne [...] D’un monde d’équité jamais l’ombre d’un signe / Je m’indigne ». De ses propos, Laurent explore le monde à hauteur d’Homme : « Ça fait peur / J’voudrais bien tourner la page / Mais les temps sont à l’orage / Et les ghettos font fureur / Ça fait peur ». Laurent chante la folie de ce monde sapé, sali par l’humain : « L’inconscience de l’homme / Est à son optimum / La planète est en vrac / Le monde est mis à sac / Par une poignée d’banquiers / Qui fait son p’tit marché ». Ni dans le choix de ses reprises, ni dans celui de ses proches chansons, Laurent n’est neutre. Il est tout d’un bloc d’honnêteté, de bon sens. Et, je le redis, de talent. Qui plus est de bon goût.
Mon confrère et ami Francis Panigada disait déjà, en 2004 sur la revue Chant’Essonne : « Eric Laurent fait partie de ces chanteurs qui aiment la force des mots et de l’écriture et veulent que la chanson garde son rôle de témoignage. Une chanson de tradition, qui résonne avec force, parfois un peu d’emphase, mais qu’importe, car la passion est là ! Eric Laurent reste plus que jamais libertaire, un « colporteur d’utopie » pour qui l’amour est la seule arme. Généreux ! » Seize ans après cet article, on peut le reprendre mot pour mot. Mais comment se fait-il qu’un tel artiste ne soit pas encore parvenu à nos oreilles ? Comme il n’est jamais trop tard pour découvrir, découvrez-le !
A noter qu’Eric Laurent est par ailleurs un des organisateurs du Festiv’en marche, dans l’Indre, dont l’édition 2021 devrait se tenir du 24 avril au 23 mai. Le site et le programme de ce festival, c’est ici.
Eric Laurent, Je m’indigne, autoproduction/EPM 2020. Le facebook d’Eric Laurent, c’est ici.
Ravi de te voir reprendre ces quelques lignes d’une chronique vieille de 16 ans. Eric Laurent reste ce « colporteur d’utopie » et un artiste remarquable de justesse.
Belle expression que nous confirmons « un bloc d’honnêteté, de bon sens et de talent…
et nous rajoutons : la voix… chaude et unique, dosée, maîtrisée dans le moindre souffle !
BRAVO ERIC LAURENT. Les Kouro au couchant de l’Atlantique.
Eric Laurent est un de mes ACI préférés et l’hommage qui lui est ici rendu est bien mérité. En revanche je pense que les dates de Festiv’en Marche 2021 sont erronées ( du 24/04 au 23/05 impossible )
Que de chemin accompli depuis que je l’avais entendu en scène ouverte au festival d’ Artigues dans les Pyrénées Ariégeoises (1995), là ou sévissait aussi un certain Marc Gicquel.
J’ ai reçu il y a quelques jours le CD nouveau que j’ écoute progressivement chanson par chanson pour ne pas manquer un mot un souffle. Je suis d’ accord avec la chronique de Michel Kemper…
Il manque peut-être un petit sourire dans une chanson… mais ne m’en déplaise c’est certainement le ton souhaité par l’artiste tout au long de cet album !!! Osez découvrir.