Rika Zaraï, 1938-2020
Fasse que l’imagerie populaire ne retienne pas d’elle que ses fameux bains de siège et sa médecine naturelle qui lui valut moult tracasseries avec l’Ordre des médecins. Quitte à faire, préférons ses utiles livres de cuisine et, malgré quelques tubes plus exécrables que d’autres (Sans chemise sans pantalon, c’est elle), retenons la chanteuse qu’elle fut, indissociable des années Guy-Lux, et de certaines chansons qui pavent nos souvenirs : Balapapa, Tante Agathe, Casatchok, Tournez manèges… Vu les millions de 45 tours écoulés, vous en avez sans doute chez vous, ou alors vous me mentez.
C’est en 1960, à l’âge de 22 ans, que Rika Gussmann quitte Jérusalem pour Paris où, est-ce naïveté, elle se présente Boulevard des Capucines, à Bruno Coquatrix. Elle ne parle alors qu’hébreu et anglais : le directeur de l’Olympia refuse de l’engager, tant qu’elle ne parlera pas français. Elle fait le circuit des cabarets et, rapidement, rencontre Eddy Barclay, en recherche de chanteuses à accent, très en vogue en ce temps-là. Un premier 45 tours, L’olivier et Hava Nagila, passe en radios. Tout va vite. Elle fait la première partie de Jacques Brel à l’Olympia, est invitée de Denise Glaser à Discorama, fait une deuxième puis une troisième première partie de Brel, celle des Chaussettes noires aussi… La bonne étoile de Rika en fait vite une star qui longtemps brillera au firmament de la variété des années soixante puis soixante-dix malgré un sérieux coup du sort, en fin 1969, accident de voiture qui la laisse huit mois dans une coquille de plâtre.
Reconversion professionnelle dès les années quatre-vingt où, profitant de sa notoriété, elle se lance dans le commerce de plantes et dans les livres de cuisine. Régulièrement elle fera des retours à la chanson mais sans le succès d’antan, on n’ose dire en se plantant.
En 2008 elle sort un nouvel album, fait de quelques inédits ainsi que de chansons de Brassens et de Duteil, pour célébrer ses cinquante ans de carrière. Une tournée doit avoir lieu, ruinée par un AVC. La survie discographique de Rika Zaraï ne tiendra plus dès lors que par des compilations et anthologies. Son ultime apparition scénique eut lieu en février de cette année 2020 à La nuit de la déprime, où elle chanta un titre, un seul : sa première chanson, Prague. La boucle était définitivement bouclée.
C’est une familière du petit écran en noir et blanc, de notre jeunesse, qui disparaît, pas forcément une artiste incontournable. Simplement quelqu’un au sourire enchanteur, au rire ravageur, à l’accent tonique, qui chantait la joie pour cacher sa tristesse. Et partagea nos vies et nos repas devant la télé, de qui nous aimions reprendre ses p’tites chansons pas farouches. Alors, je chante…
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