Marc Fichel « Manureva »
Où es-tu, Manu Manuréva?
Bateau fantôme toi qui rêvas
Des îles et qui jamais n’arriva
Porté disparu Manuréva
Des jours et des jours tu dérivas
Mais jamais-jamais tu n’arrivas
Là-bas
Marc Fichel
Paroles Serge Gainsbourg, Musique Alain Chamfort et Jean-Noël Chaléat. Extrait de l’album cinq titres « Mes années cover »(2020).
Vidéo de Thomas de France avec la danseuse Marie Gaudillière.
Enregistrée par Alain Chamfort à Los Angeles en 1979 dans son album « Poses », en hommage au navigateur Alain Colas disparu en mer en novembre 1978 à bord du trimaran du même nom.
En 1974 il bat le record du Tour du monde en solitaire avec son multicoque, puis en 1975 Colas fait construire à Toulon un monocoque quatre mâts de 72 m de long, le Club Méditerranée (devenu plus tard le Phocéa). Pendant la construction, il est victime d’un accident en s’entraînant sur son multicoque, entraînant de multiples opérations pour sauver sa cheville. En 1975 il effectue la transat anglaise en solitaire sur son grand monocoque, essuyant plusieurs tempêtes.
C’est avec son multicoque Pen Duick IV Manureva qu’il embarque en 1978 pour la route du Rhum, et disparaît dans l’œil d’un cyclone après avoir passé les Açores. L’espoir subsiste de le retrouver jusqu’à fin décembre, certains messages radio semblant avoir été interceptés de sa part, jusqu’à la fin des recherches officielles, et des hypothèses et des espoirs variés subsistent quelques mois, transformant le marin en personnage mythique. Outre la tempête, on a accusé sa fatigue, ou le mauvais état du bateau d’être la cause de sa disparition. Cette disparition a beaucoup marqué l’époque, et de nombreux hommages ont été rendus au marin d’exception avide d’exploits toujours plus difficiles, et parmi eux, cette chanson de Gainsbourg.
« Bateau fantôme toi qui rêvas / Des îles et qui jamais n’arriva »
La chanson, disque d’or en 1980, relança la carrière d’Alain Chamfort, qui la chante toujours, en laissant tomber l’orchestration disco très datée pour une plus rock, ici avec Blankass.
Marc Fichel a choisi d’interpréter cinq titres de chansons dites de variété, fin 70-80, souvent de style disco ou post-disco, en toute intimité, en piano-voix. Ralentie, vibrante, la chanson Manureva prend une nouvelle profondeur, redonne au bateau comme à son marin, jamais nommé, une âme propre. Les anglais parlent des bateaux au féminin…
Love me, please love me de Michel Polnareff abandonne l’orchestration très produite piano, chœurs, cordes et envolées lyriques, pour une version simplifiée, épurée avec a contrario un clavier très électronique, et des petites notes acidulées envoyées comme des larmes d’amour.
Aimons-nous vivants, consigne adressée par François Valéry, avec Pierre Delanoe et Jacqueline Misrahi, a connu un sort étrange. La chanson sortie en 1989 avec là encore une orchestration très datée, considérée comme l’archétype de la chanson de variété, limite ringarde, a laissé son refrain comme un message quasiment philosophique, cité à tout propos, et particulièrement celui des artistes qui ne connaissent souvent le succès qu’une fois morts. « Aimons-nous vivants / N’attendons pas que la mort nous trouve du talent ». Fichel en fait une chanson d’amour et d’espoir, délicate et tendre.
Les absents ont toujours tort, de Chedid, est sans doute la chanson qui évoque le plus son interprète d’origine, reprenant même le fond d’orgue électronique, mais là encore, avec la voix plus retenue, délicate et nuancée : une chanson qui génère l’émotion, déjà dans sa version d’origine.
L’adaptation la plus surprenante est sans doute cette Nuit de folie, du groupe Début de soirée, tout en retenue, laissant découvrir le caractère fragile, au bord de l’abîme, de la personne à qui s’adresse la chanson : « Ton cœur est un saphir de pick-up / On a trouvé des décibels dans ton check-up ».
Merci donc, à Marc Fichel, pour bousculer nos a priori !
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