Barjac 2020. En ces jardins fleurirent des chansons
Sauvé dans Anne-Marie Panigada, En scène, Festivals, Francis Panigada, L'Équipe
Tags: Anne Pia, AnneliSe Roche, Bertrand Hagenmüller, Dom Kovacs, Dominique Babilotte, Françoise Tettamanti, Léonor Bolcatto, Les Abeilles aussi, Lily Luca, Marie Pellerin, Mathieu Barbances, Natasha Bezriche, Nouvelles, Pascal Mary, Rémi Constant
Voila l’automne qui s’annonce et, avec lui, l’horizon lointain qui s’assombrit, les visages qui s’effacent derrière les masques, les voix qui s’étouffent, les étreintes qui ne se serrent qu’au vide. Pourtant le soleil fait de la résistance, ne se résigne pas à céder devant les ombres qui s’avancent comme pour nous rappeler cet été où nous nous sommes sentis renaître, ou la peur de la rencontre a fait place à la joie des retrouvailles, aux sourires, au plaisir du partage, où, dans de jolis jardins, ont éclos des chansons.
Pour faire pousser des chansons, il fallait une terre d’accueil, un terreau, et quel plus beau lieu que Barjac qui apporte depuis plus de deux décennies sa moisson d’artistes, de chants, de poésie. Pandémie oblige, « Barjac m’enchante », comme nombre de festivals, ne pouvait assumer ce rendez-vous mais pour beaucoup d’entre nous, celui-ci était pris. Il fallait montrer notre attachement à ce village, à cette chanson. Nous irions quand même à Barjac en juillet ! L’idée était en germe, il n’y avait qu’à semer.
Il fallait des semeurs et à l’initiative de Laurence Keel, barjacoise, comédienne et metteure en scène, fut lancée une page Facebook, afin de recenser les éventuels présents, festivaliers fidèles en mal de spectacle ou nouveaux venus. Surprise de taille, l’afflux fut conséquent et vit bientôt près de 250 membres dont environ 150 participants à Barjac. Les graines venaient d’être semées à la volée… A Laurence se joignirent Marie et Eric Pellerin, bretons acteurs du Festival les Originales de Morlaix, et Anne-Marie Panigada, spectatrice assidue de Barjac, organisatrice de spectacles et photographe à ses heures. Il leur revint d’orchestrer des moments artistiques dans des lieux privés en toute indépendance de Barjac m’enchante. Au fil du temps ce sont quatre événements qui virent le jour. Et, malgré les contraintes sanitaires et celles de l’accueil limité en nombre de places, ce furent des instants de partage, de plaisir et de douceur retrouvée.
Du côté de chez Laurence s’était constituée une résidence avec Léonor Bolcatto, Annelise Roche, Mathieu Barbances et Bertrand Hagenmüller. Cette soirée fut tout à la fois une restitution de ce travail, un florilège d’instants artistiques travaillés en petits groupes éphémères autour du thème « C’était mieux après » et, en final, un « karaoké vivant » où une multitude d’artistes présents avaient choisi des titres du répertoire accompagnés par une formation constituée pour l’occasion. Entre la tendresse d’un Rémi Constant reprenant Au café du canal de Pierre Perret et la démesure d’une Lily Luca dans une interprétation de Marcia Baïla des Rita Mitsouko, ce soir là l’émotion, l’énergie et le rire étaient au rendez-vous.
En ce qui concerne la journée marathon qu’Anne-Marie et moi-même avons organisé, je vous invite à lire le chaleureux compte-rendu qu’en a fait Franck Halimi. Peut-être faut-il encore une fois remercier tous ceux, et ils sont nombreux, qui ont apporté leur aide, tant pour la technique, l’accueil ou les repas. Là encore que du bonheur !
Quant au jardin des Pellerin, ce sont deux programmations qu’ils nous offrirent. Premier bouquet, première moisson avec Dom Kovacs, chanson piano voix de facture classique, Léonor Bolcatto et Pascal Mary. Que dire de Leonor Bolcatto, si ce n’est qu’elle fut un de mes coups de cœur de cet été tant ses progrès sont immenses. Tout concourt à ce qu’elle soit une belle promesse : une voix douce et mélodieuse, une diction parfaite et cette « poésie des choses ordinaires » si sincère, si émouvante. Quant à Pascal Mary, nul est besoin de le présenter ici, il est de ces artistes rares qui peuvent nous faire passer des larmes au rire, de l’émotion à fleur de peau à l’humour noir et décapant. Le second soir nous permit de découvrir nos hôtes, Marie et Eric, respectivement interprète, auteur et musicien dans des chansons fort bien écrites, généreuses et en prise sur le monde. Soirée bretonne oblige (crêpes et cidre au rendez-vous), viendront ensuite Anne Pia et Françoise Tettamanti (Les Abeilles Aussi) avec leur regard poétique sur le quotidien et Dominique Babilotte, avec sa force, sa puissance, ses indignations, dans ses propres textes ou ceux de Reggiani qu’il chérit. Pour conclure, surprise et bouquet final, ce sera Natasha Bezriche qui remplacera Hélène Piris indisponible. A capella, elle saura nous faire vibrer au seul son de sa voix, magnifique instrument. Enfin tout se finit autour d’un verre et de chansons reprises en chœur.
Que rajouter sur cette semaine, si ce n’est que ces quelques mots, et ces photos ne pourront à elles seules restituer l’intensité des moments partagés, cette envie irrésistible de communiquer, de s’émouvoir ensemble aux accents de cette chanson qui nous réunit. Au-delà des masques, il y avait les sourires, les regards, au-delà de la distanciation, le désir de la rencontre. Ces instants resteront fugitifs et uniques, il faut l’espérer, quand reviendra le temps des festivals. Mais une leçon sûrement se fait jour : l’envie de ne pas être de simples spectateurs, le souhait qu’en contrepoint des concerts existent des temps pour se retrouver, partager un repas, échanger… A méditer !
Rémi Constant, Tu danses quand je fredonne :
Léonor Bolcatto, La poésie des choses ordinaires (mise à jour vidéo 7 août 2022) :
Merci Francis pour cet article. Ce furent de beaux et chaleureux moments de chanson qui restent chers à nos cœurs.